Politique

13e vendredi : le peuple achève les espoirs du pouvoir

Pour la treizième fois en moins de trois mois, les Algériens sont sortis en masse réclamer du changement. Ils étaient des centaines de milliers dans certaines villes, des millions sur tout le territoire, à braver la faim, la soif et le soleil qui a tapé fort ce vendredi 17 mai, douzième jour de ramadhan.

À Alger, les images des principales artères et places du centre-ville noires de monde sont devenues routinières. À Bordj Bou Arréridj aussi, Tizi-Ouzou, Béjaïa, Constantine, Oran, Tiaret, Tlemcen, les mêmes images de forte mobilisation, de détermination et de sacrifice. La revendication reste la même : le départ de tous les symboles du système et l’engagement d’une vraie transition démocratique.

Cela fait treize vendredis que ça dure et pas un seul signe d’essoufflement. La lassitude a, au contraire, gagné le camp d’en face. Cela fait deux semaines que le pouvoir ne parle plus, ne propose rien, faute d’arguments, de solutions, peut-être de conviction. La dernière sortie d’un officiel de haut rang remonte au 5 mai, lorsque le chef de l’État par intérim Abdelkader Bensalah avait appelé à un dialogue devant permettre l’organisation de l’élection présidentielle « dans les délais », c’est-à-dire le 4 juillet.

Avant lui, c’est le chef d’état-major de l’ANP qui avait dit et redit pendant des semaines la nécessité de rester dans le cadre des dispositions de la Constitution, c’est-à-dire aller vers les urnes sous la supervision des personnages contestés, hérités du président déchu. Cela fait autant de semaines que le peuple dit non à une telle transition qui n’offre aucune garantie de déboucher sur le changement rêvé.

Le pouvoir, pour imposer sa solution, a tout misé sur l’essoufflement du mouvement notamment à l’avènement du ramadhan et sur son opération « mains propres » fortement médiatisée. Mais après treize journées de grande mobilisation étalées sur trois mois, il n’y a plus d’illusions possibles.

Les Algériens ne sont dissuadés par aucun aléa et aucune mesure ne leur a fait perdre de vue leurs revendications qu’ils ont réitérées ce vendredi : le départ du chef de l’État par intérim et du Premier ministre et l’annulation de l’élection présidentielle. Même s’il ne s’est pas exprimé sur la situation depuis trois semaines, Ahmed Gaïd Salah en a eu aussi pour son grade. Les slogans le visant directement ont été nombreux et beaucoup de manifestant l’ont exhorté de choisir son camp et lui rappeler que la dictature militaire n’est pas une option.

Le succès des marches de ce treizième vendredi est sans doute synonyme de la fin des espoirs du pouvoir d’imposer quoi que ce soit et annonciateur de la mort définitive de la solution constitutionnelle. Il n’est en effet pas à écarter que le report ou l’annulation de l’élection présidentielle du 4 juillet soit annoncé dans les prochains jours. Ce dimanche 19 mai marquera l’expiration du délai de dépôt des candidatures au Conseil constitutionnel.

Jusque-là, aucune candidature sérieuse n’est annoncée et on voit mal les décideurs choisir d’aller vers une élection censée régler la crise avec des personnages sans troupes ni aura comme Abdelaziz Belaïd ou Belkacem Sahli. Reste à savoir ce que le pouvoir substituera à sa solution constitutionnelle : une vraie transition ou un plan B qui risque d’allonger encore la crise, voire l’aggraver.

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