Politique

2019, année de toutes les incertitudes politiques en Algérie

L’année 2019 qui commence sera évidemment marquée par l’élection présidentielle – si elle est maintenue à sa date initiale – et surtout par les vingt ans du président Bouteflika au pouvoir.

Le 15 avril prochain, le chef de l’État aura bouclé deux décennies à la tête de l’Algérie qu’il risque de laisser – s’il ne brigue pas un autre mandat – presque comme il l’a trouvée. Hormis la paix retrouvée qui reste un acquis indéniable de la présidence de Bouteflika, le reste, tout le reste est discutable.

Économiquement, le pays a aggravé sa dépendance à l’égard des hydrocarbures et les politiques publiques se définissent encore au gré des fluctuations du prix du baril. Politiquement, c’est aussi indéniable, l’Algérie n’a pas réussi à se doter d’institutions fortes et d’un mécanisme d’alternance démocratique au pouvoir.

La légèreté avec laquelle est triturée la Constitution à chaque fois que l’ont exigé les agendas du moment ont fait de la loi fondamentale du pays une coquille presque vide. La preuve, à trois mois de l’élection présidentielle, soit l’événement le plus marquant dans la vie d’une nation régie par un régime présidentiel, on en est encore à spéculer sur la tenue ou non du scrutin.

C’est en effet avec cette grosse interrogation en tête que les Algériens vont commencer l’année 2019. Beaucoup a été dit au cours de l’année 2018, notamment ces dernières semaines, à propos du rendez-vous crucial à venir. Il fut d’abord question d’un cinquième mandat en bonne et due forme pour le président Bouteflika en dépit de son âge et de son état de santé. On a toujours prêté au chef de l’État la volonté de mourir sur le fauteuil présidentiel et rien ne permettait de penser qu’il n’en sera pas ainsi.

Les principaux soutiens du pouvoir ont commencé à entonner le refrain dès le printemps dernier avant de sortir subitement un autre tube au mitan de l’automne : la continuité. Vagues dans un premier temps, les contours du concept ne tarderont pas à se dessiner avec plus ou moins de clarté à la faveur des sorties publiques des partis de l’Alliance et même de certaines formations de l’opposition. Pendant un moment, on a cru voir le pouvoir se diriger vers une révision constitutionnelle qui permettrait le prolongement du mandat actuel de Bouteflika d’une ou deux années, le temps de trouver un consensus sur son successeur. Mais comme pour le cinquième mandat, les clairons se sont subitement tus fin décembre.

À l’orée de la nouvelle année, on ne sait rien des plans du pouvoir. Deux jours après, le renouvellement partiel du Sénat a donné l’occasion aux chefs des deux plus grands partis du pays de s’exprimer, quoique brièvement, sur le sujet qui tient en haleine les Algériens. Ahmed Ouyahia, Premier ministre et chef du deuxième parti en termes de représentation dans les assemblées, renvoie aux déclarations du porte-parole du parti début décembre : « Au RND, on ne voit pas d’éléments qui puissent justifier le recours ». Mouad Bouchareb, coordinateur provisoire du FLN, donne presque la date de la convocation du corps électoral, « dans 25 jours au plus tard » et prend le soin de préciser que le parti majoritaire ne peut concevoir une candidature autre que celle de son président, Abdelaziz Bouteflika.

Le même jour, la partie dont l’avis compte le plus dans ce genre de questions, l’armée, sort de son silence pour recadrer un de ses généraux retraités qui l’avait appelée publiquement à ne pas permettre la transgression de la Constitution avec la prolongation du mandat présidentiel.

Si le communiqué du MDN du 30 décembre a le mérite de clarifier les choses quant à la position de la grande muette et l’immuabilité de son principe de non-interférence dans la chose politique, il a, en revanche, ouvert la porte à d’autres interrogations qui viennent s’ajouter à celles déjà nombreuses qui taraudent l’opinion : le général-major Ali Ghediri a-t-il réellement des ambitions présidentielles et, surtout, quelles sont ces « cercles occultes » qui commanditeraient son action ?

Une autre grosse interrogation qui vient rendre la situation encore plus illisible. L’année 2019 apportera des réponses, c’est certain. Mais le plus tôt sera le mieux. Cet épais brouillard n’a que trop duré.


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