L’affaire Lola, dans laquelle une Algérienne en situation irrégulière est soupçonnée d’être impliquée, a relancé le débat autour de l’immigration en France. Notamment autour des personnes sans-papiers et de leur prise en charge.
Si les membres du gouvernement français ont appelé à ne pas instrumentaliser le meurtre de la petite fille, ils s’activent pour redéfinir le cadre des autorisations de séjour en France. Le ministère de l’Intérieur français prévoit d’ailleurs de légiférer sur la gestion de l’immigration légale comme illégale.
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Un projet de loi dit "immigration" sera examiné début 2023. Il prévoit de gros changements aussi bien dans l’accueil que l’expulsion des étrangers. Dans un entretien accordé au journal Le Monde, les ministres de l’Intérieur, Gérald Darmanin et celui du travail, Olivier Dussopt, détaillent la vision de ce projet de loi. Faut-il s’attendre à un durcissement des conditions d’immigration vers la France et du contrôle des personnes en situation irrégulière ?
La France veut l’équilibre dans son immigration
Pas de chasse aux sorcières mais un tri assumé des étrangers. Voilà ce que proposent les deux ministres dans leur projet de loi "immigration".
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« Si je devais résumer, je dirais qu’on doit désormais être méchants avec les méchants et gentils avec les gentils », explique Gérald Darmanin au Monde. Le ministre de l’Intérieur veut donc classer les étrangers en deux catégories : ceux qu’il estime comme potentiellement dangereux et ceux qui répondent aux besoins de la France.
Le ministre de l’Intérieur promeut d’un côté le « renouvellement automatique des titres pluriannuels de ceux qui ne posent aucun problème, qui n’ont aucun casier judiciaire », comme « les chibanis de 70 ans » de sa circonscription par exemple. Mais de l’autre côté, il se bat pour la levée des contraintes qui ralentissent les expulsions d’étrangers.
Faciliter et accélérer les OQTF
Avec l’affaire Lola et la mise en examen de Dahbia B. qui faisait l’objet d’une Obligation de quitter le territoire français (OQTF), cette mesure d’éloignement est au cœur du projet de loi.
Gérald Darmanin souhaite s’attaquer aux recours qui suspendent l’exécution des OQTF. L’objectif est de "fortement simplifier les procédures et de passer de douze à quatre catégories de recours, pour exécuter beaucoup plus rapidement les mesures", explique-t-il au Monde.
Le traçage des départs des personnes visées par une OQTF sera également établi dans un fichier de personnes recherchées. Que ce soient les départs forcés comme volontaires, l’Etat français veut s’assurer que les personnes en situation irrégulière ont effectivement quitté la France. Dans le cas contraire, Gérald Darmanin promet de leur rendre la "vie impossible" en les privant notamment de droit au logement social et aux prestations sociales.
Le ministre de l’Intérieur français ne s’arrête pas là et explique sa volonté de mettre un terme aux « réserves d’ordre public » qui « empêchent d’éloigner des personnes arrivées avant 13 ans » en France. Leur autorisation de séjour sera alors entre les mains de la justice française.
La vigilance sera également accrue autour des personnes venues avec un visa temporaire, tels que le touriste ou l’étudiant et qui dépasse son autorisation de séjour. Le cas Dahbia B., encore une fois, venue d’Algérie pour mener ses études en France, est encore utilisée pour durcir les conditions de séjour.
Création d’un titre de séjour « métier en tension »
A l’inverse, les deux ministres semblent s’orienter vers une immigration de plus en plus choisie notamment pour répondre à la pénurie de travailleurs dans certains secteurs.
Gérald Darmanin a rappelé que 20 % des médecins très actifs durant la pandémie étaient d’origine étrangère. On sait par exemple que les médecins algériens sont largement accueillis pour répondre au manque de ressources dans ce domaine, notamment dans les déserts médicaux. En février 2022, ce sont près de 1.200 médecins d’origine algérienne qui ont été autorisés à exercer en France.
C’est donc ce genre d’immigration qui va être favorisé en France. Plusieurs mesures dans ce sens sont proposées pour faciliter l’insertion professionnelle des travailleurs immigrés, précise quant à lui le ministre du Travail Olivier Dussopt. Les ministres de l’Intérieur et du Travail envisagent la création d’un titre de séjour « métier en tension« , pour recruter dans les secteurs qui sont en pénurie de main d’œuvre.
La suppression du délai de carence qui empêche les demandeurs d’asile de travailler pendant leurs six premiers mois en France est également envisagée. Mais seulement sous certaines conditions qui permettraient le contrôle de cet allégement.