Le constat est unanime : à six jours de l’élection présidentielle, le « Hirak » ne montre aucun signe de résignation. Alors que le pouvoir maintient le cap pour la tenue du scrutin, le mouvement populaire, pour ce 42e vendredi a fait une véritable démonstration de force réitérant sa détermination à le rejeter.
Ce vendredi à Alger, la foule était tellement impressionnante qu’on n’a pas manqué de qualifier la manifestation de parmi les plus importantes depuis le début du mouvement le 22 février dernier.
Femmes, hommes, jeunes enfants, avec une écharpe autour du cou, un drapeau ou une pancarte ou encore des portraits à l’effigie des détenus et autres héros de la révolution, tous ont déferlé, dés la fin de matinée notamment sur les principales rues de la capitale pour crier haut et fort le rejet de l’élection.
Par endroits, il était même difficile de se frayer un chemin, comme à la rue Asselah Hocine qui a vu déferler une vague humaine en provenance du quartier populaire de Bab El Oued et la Casbah, ou encore la rue Didouche Mourad.
Une image, pancarte brandie par un citoyen, au milieu de la foule, résume l’état d’esprit des manifestants : les cinq candidats barrés d’une croix rouge avec cette légende : « Vendredi 13, destin de l’horreur, jeudi 12, route barrée ».
Comme lors des vendredis précédents, la foule de manifestants reprenait en chœur les slogans devenus rituels : « Nous sommes les enfants d’Amirouche, pas de marche arrière, la liberté, nous l’arracherons ». Il y a aussi : « Dawla madania machi askaria (État civil et non militaire) », « Pas de vote avec la bande » ou encore « Libérez les détenus ».
Mais à côté des slogans hostiles à l’élection et chants devenus classiques, notamment ceux entonnés par la foule amassée sur les escaliers jouxtant le lycée Arroudj, non loin de la fac centrale, deux nouveaux slogans, liés à l’actualité ont fait leur apparition.
Il y a d’abord l’appel à la grève générale à compter du dimanche 8 décembre relayant ainsi les étudiants : « Grève générale pour que chute le régime » ou encore « Je jure que je ne travaillerai pas et que je ne voterai pas ; le 8 décembre, je fermerai mon commerce », ont scandé des manifestants.
Il y a ensuite, la réplique au ministre de l’Intérieur, Salah Eddine Dahmoune dont les propos ont visiblement choqué. « Ya Dahmoune, Ya Djebane (lâche), Had Echâab la youhane, (ce peuple ne se laisse pas humilier) » ou encore « Ole, Ola, wazir Ghir Charii (ministre illégitime), zid machi mrebbi (mal éduqué) ».
Mercredi, le ministre de l’Intérieur avait réagi violemment à la résolution du Parlement européen sur l’Algérie en traitant ceux qui appellent à « l’ingérence étrangère » de « pervers, homosexuels, traîtres ». Des propos qui ont été interprétés comme des attaques contre les opposants au vote.
Des manifestants ont également annoncé une marche pour le jour de l’élection.
Il faut dire que allègement du dispositif policier, notamment la réduction des véhicules formant la haie sur la Rue Didouche Mourad et le temps printanier ont permis de donner un meilleur aperçu du volume de la mobilisation.
Si à Alger, la mobilisation était sans doute la plus importante, des manifestations non moins imposantes se sont déroulées également à Oran, Mostaganem, Bejaia, Constantine, Annaba, Blida, Bouira, Tizi-Ouzou, Sétif, Batna, Ouargla, Jijel, Tlemcen, Mila, Ain Defla, Chlef, Ain Temouchent, Bordj Bou Arreridj… Un avant-goût annonciateur de la poursuite du bras de fer même au-delà du scrutin auquel la participation s’annonce dérisoire.