L’Algérie fête ce mardi 5 juillet 2022 le 60e anniversaire de son indépendance. Après six décennies d’efforts pour se débarrasser des séquelles de la longue nuit coloniale et amorcer un véritable développement économique et humain, la halte est propice aux bilans.
Les autorités ont choisi de célébrer cette date par, entre autres activités, deux événements phares : un défilé militaire d’une envergure jamais vue en Algérie et une distribution de logements d’une ampleur tout aussi inédite.
La parade militaire, qui s’étalera sur une quinzaine de kilomètres, a nécessité la fermeture de la circulation sur toute la rocade nord de la capitale pendant six jours. Les préparatifs ont commencé il y a plusieurs jours.
Les répétitions se déroulent en présence du public. Des vidéos publiées sur les réseaux montrent la qualité et le type d’armements qui participeront au défilé : des chars, des batteries de missile, des hélicoptères, des engins blindés, etc.
Les logements à distribuer à travers tout le territoire national sont au nombre de 160 000, toutes formules confondues.
Il y a beaucoup de symbolique dans ces deux événements. Ils traduisent et résument à eux seuls l’intérêt porté par l’Algérie indépendante à la consolidation de la souveraineté nationale et au développement social et humain.
L’Algérie a arraché sa liberté au prix de grands sacrifices de ses enfants, avec des moyens dérisoires. Aujourd’hui, elle dispose d’une armée puissante, professionnelle et bien équipée, figurant en bonne place dans les classements des organismes mondiaux spécialisés.
L’ANP est la première garante de la souveraineté et de l’indépendance nationales et pour arriver à l’élever au niveau qui est le sien aujourd’hui, un effort considérable a été consenti.
Il en est de même pour le développement humain et social. En matière de santé, de logement, d’éducation et d’accès aux services publics d’eau, d’énergie ou de téléphonie, l’Algérie présente des chiffres à mille lieues des privations et du sous-développement de la période coloniale et des premières années de l’indépendance. En matière de sécurité alimentaire, elle se classe première en Afrique, suivant le Programme alimentaire mondial (PAM).
Économie et libertés : beaucoup reste à faire
L’Algérie présente ce qui se fait de mieux dans le tiers-monde et, dans certains aspects, comme le taux de scolarisation ou celui de raccordement à l’électricité, elle n’est pas loin des standards des pays les plus développés.
Tout cela, le pays l’a réalisé grâce à une politique volontariste rendue possible par les recettes des hydrocarbures. Ce qui nous amène à l’autre partie du bilan, celle moins glorieuse des opportunités ratées et de tout ce que l’Algérie aurait pu et dû faire, et qu’elle n’a pas fait.
En nationalisant ses hydrocarbures en 1971, l’Algérie s’est crue dispensée du devoir de développer les autres segments de son économie.
Soixante ans après l’indépendance, le pays dépend toujours, presque exclusivement, de ses ventes de pétrole et de gaz. C’est l’un des plus gros échecs de l’Algérie indépendante.
La promesse de diversifier l’économie et d’engager les réformes nécessaires pour cela n’a jamais été tenue, y compris pendant les deux dernières décennies marquées par une opulence financière sans précédent, qui pouvait permettre une transition douce vers une nouvelle économie et d’autres ressources, comme l’ont fait certains pays du Golfe.
Au contraire, cette période a été marquée par la prolifération de la corruption devenue endémique, de la dilapidation de l’argent public et des injustices sociales, comme en témoignent les nombreux procès anti-corruption qui se tiennent depuis 3 ans.
L’Algérie dépend toujours des étrangers pour les céréales, la construction des grands ouvrages et des autoroutes, les matières premières pour le fonctionnement de ses entreprises, les pièces de rechange…
L’Algérie peine à garder ses ingénieurs, ses médecins et autres compétences qui partent massivement à l’étranger à la recherche d’un meilleur cadre de vie.
Au plan politique, le Hirak du 22 février 2019, qui a mis fin au règne chaotique du président Abdelaziz Bouteflika, est venu rappeler l’autre très gros ratage de l’Algérie indépendante, celui de la démocratisation du pays et du respect des droits et des libertés.
Soixante ans après l’indépendance, synonyme de liberté pour tous, des Algériens sont encore détenus pour avoir exprimé des opinions. Selon Amnesty International, ils seraient au nombre de 266, au moment où le pays célèbre la liberté retrouvée.