Après plusieurs semaines de polémique, le gouvernement français a tranché concernant le port de l’abaya à l’école.
Le 27 août, le ministre de l’Éducation Gabriel Attal a annoncé sans surprise l’interdiction de cette longue robe dans les établissements scolaires.
Faute de mettre fin au débat, la décision a attisé la polémique et les déchirements y compris au sein de la classe politique. La décision sera à l’épreuve du terrain dès ce lundi 4 septembre, à l’occasion de la rentrée des classes.
Des interrogations sont soulevées quant à la manière d’appliquer la directive. Si le foulard islamique, interdit à l’école depuis 2004, est facilement identifiable, ce n’est pas le cas de l’abaya. Toute robe longue peut être confondue avec l’habit interdit, de surcroît si elle est portée par une fille au teint mat ou au prénom à connotation musulmane.
Les fonctionnaires de l’éducation seront amenés à faire la « police du vêtement » avec un risque élevé de dérapages, de contrôle au faciès, donc de résistances et d’incidents.
Le ministère de l’Éducation a envoyé une note aux responsables des établissements scolaires spécifiant la procédure d’application de la décision.
Deux tenues en fait sont prohibées : l’abaya pour les filles et le qamis pour les garçons. Si un élève se présente au portail vêtu de l’une de ces deux tenues, il ne pourra pas entrer en classe, mais il ne sera pas renvoyé non plus.
Il sera invité pour une discussion dans un bureau de l’établissement. La procédure disciplinaire à son encontre ne sera engagée que s’il persiste dans son refus de renoncer à la tenue interdite.
« Nous veillerons à ce qu’elle (la loi) soit bien appliquée », a simplement répondu à une question de RTL la Première ministre Elisabeth Borne, rappelant la loi de 2004 qui interdit dans les écoles les signes ostentatoires d’appartenance religieuse.
Abaya à l’école : la classe politique française se déchire
La responsable de l’Exécutif a préféré axer sur les critiques émanant d’une partie de la classe politique. Elle a dénoncé « la manipulation et des tentatives de provocation de la part de certains », citant nommément La France insoumise. Le parti de Jean-Luc Mélenchon est vent debout contre la décision du ministre de l’éducation d’interdire l’abaya à l’école dès la rentrée scolaire 2023-2024.
Mélenchon a déploré « une nouvelle absurde guerre de religion entièrement artificielle à propos d’un habit féminin ».
Le parti de gauche avait envisagé de saisir le conseil d’État. Une association musulmane, Action droits des musulmans, est vite passée à l’acte en saisissant cette juridiction administrative suprême afin d’obtenir l’annulation de l’interdiction.
À droite, au contraire, on jubile. Fait rare sous Emmanuel Macron, l’extrême-droite et la droite traditionnelle approuvent totalement la décision gouvernementale.
Eric Ciotti, président des Républicains, a salué l’interdiction, estimant qu’on était dans « une dérive insupportable ». Sans surprise, Eric Zemmour y voit « un premier bon pas ».
Comme sa première ministre, le président Macron a promis de la fermeté dans l’application de la loi. « Au-delà des mots, nous passerons aux actions », a dit le chef de l’État lors d’une visite vendredi dans un lycée de la région du Vaucluse.
Mais Emmanuel Macron anticipe déjà la difficulté de mettre en œuvre la décision, conscient que beaucoup tenteront de « défier le système républicain ». L’interdiction de l’abaya est-elle une décision maladroite qui générera des incidents et l’explosion des cas d' »atteinte à la laïcité » ? La France aura un début de réponse à partir de ce lundi 4 septembre.