De nombreux hommes d’affaires ont été lourdement condamnés dans le cadre de la vaste opération anti-corruption qui a été lancée par le pouvoir après la chute du président Abdelaziz Bouteflika sous la pression du Hirak et de l’armée en avril 2019.
Des chefs d’entreprises connus ou considérés pour être proches du cercle présidentiel durant le règne de Bouteflika ont été arrêtés, jugés et condamnés à de lourdes peines.
La plupart des patrons condamnés ont introduit des recours au niveau de la Cour suprême. D’autres sont toujours en détention provisoire et attendent d’être jugés. Dès son élection en décembre 2019, le président Abdelmadjid Tebboune s’est engagé de récupérer les fonds que ces hommes d’affaires auraient détournés et placés à l’étranger.
Début avril, le chef de l’Etat a indiqué que la récupération de ces fonds détournés était tributaire par le prononcé de jugements définitifs dans les affaires intentées à l’encontre des auteurs. “Vous n’êtes pas sans savoir que pour ce qui s’est passé, des sociétés européennes sont impliquées et les fonds qui ont été détournés ont été investis en Europe et non en Algérie”, a-t-il dit.
« On a pardonné à des gens qui ont tué et égorgé »
Mais depuis quelques jours, une voix prône une autre approche pour récupérer les fonds détournés vers l’étranger. Candidat malheureux à la présidentielle de décembre 2019, le président du Front Al Mostakbal Abdelaziz Belaïd a réitéré dans un entretien à la Télévision publique algérienne, son appel à une « réconciliation avec les patrons incarcérés », à condition de restituer à l’Algérie les fonds détournés. « C’est une réconciliation qui est dans l’intérêt de l’Algérie et de son économie », a-t-il soutenu.
« Demander des comptes aux hommes d’affaires et aux cadres impliqués dans des affaires de corruption prendra beaucoup de temps et les procès vont durer, et cela ne sert personne », a-t-il dit.
Pour convaincre, Abdelaziz Belaid n’hésite pas à rappeler que l’Algérie a déjà pardonné à des terroristes, qui ont « tué et égorgé des gens », dans le cadre de la réconciliation nationale.
« C’est une réconciliation qui est dans l’intérêt de l’Algérie et de l’économie nationale. Elle va permettre la création d’emplois pour les jeunes chômeurs », a-t-il soutenu. « Il faut une réconciliation nationale, tourner la page et aller de l’avant. Nos enfants sont tous des chômeurs, ils sont dans le besoin », a-t-il ajouté.
Abdelaziz Belaid propose d’« adapter les lois et de mettre en place de nouveaux mécanismes » permettant de « négocier avec les hommes d’affaires incarcérés pour récupérer les fonds détournés, en échange par exemple de réductions de peines ». « Cette pratique existe dans plusieurs pays », rappelle-t-il. « Notre problème est comment récupérer ces fonds, comment relancer l’économie », a-t-il estimé.