Un des thèmes récurrents entendus durant les récentes manifestations populaires a été l’appel lancé par les manifestants à poursuivre en justice l’ex-président Abdelaziz Bouteflika, alors que deux de ses ex-Premiers ministres Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal se trouvent aujourd’hui en détention provisoire à la prison d’El Harrach.
Lundi à Tindouf, le général Ahmed Gaid Salah assuré que l’armée va accompagner la justice pour juger tous les corrompus « quels que soient leur rang ou leur fonction ».
« (…) Il y a lieu d’affirmer encore une fois la détermination de l’institution militaire à accompagner la justice, avec une ferme conviction et un sens élevé du devoir, ainsi que de la protéger de façon à lui permettre d’exécuter convenablement ses missions et s’acquitter judicieusement de son rôle de moralisateur, en déterrant tous les dossiers et en les traitant en toute équité quelles que soient les circonstances, de façon à faire comparaitre devant la justice tous les corrompus quels que soient leur fonction ou leur rang social », a affirmé à Tindouf, Gaid Salah dans son discours devant les cadres de l’armée.
En apportant la précision « quels que soient leur rang ou leur fonction », Ahmed Gaid Salah fait-il allusion au président déchu, Abdelaziz Bouteflika ?
La question mérite donc d’être posée : la loi autorise-t-elle la justice de poursuivre un président de la République ?
Pour répondre à cette question, il faut se référer à l’article 177 de la Constitution. Cet article dispose qu’une « Haute Cour de l’État » doit être instituée pour « connaître des actes pouvant être qualifiés de haute trahison » du président de la République. « La composition, l’organisation et le fonctionnement de la Haute Cour de l’État, ainsi que les procédures applicables, sont fixés par une loi organique », précise l’article.
Le président de la République ne peut donc être poursuivi que pour des actes pouvant être qualifiés de « haute trahison », une notion floue et mal définie permettant de faire adapter son interprétation aux grès des contextes.
Il existe cependant un problème quant à la faisabilité d’une telle poursuite. La Haute Cour de l’État n’a jamais vu le jour, faute d’une loi organique fixant sa composition, son organisation et son fonctionnement comme le prévoit la Constitution, explique un juriste, ajoutant que la Haute Cour doit être instituée pour poursuivre un président de la République.