C’est une première dans les annales de l’histoire de l’arbitrage algérien. L’arbitre Mehdi Abid Charef a été suspendu pour une affaire de “corruption” par la CAF.
Une décision prise suite à son arbitrage « scandaleux » en finale (aller) de la Ligue des champions d’Afrique disputée vendredi 2 novembre entre Al-Ahly du Caire et l’ES Tunis (3-1).
Suspendu par l’instance continentale jusqu’à son audition, Mehdi Abid Charef (37 ans) a confirmé tout le malaise que vit le corps arbitral en Algérie depuis déjà plusieurs années. Le fait est assez grave d’autant qu’il s’agissait d’une finale de la prestigieuse compétition de la CAF.
L’enfant de Constantine avait accordé deux penaltys aux Égyptiens, jugés « imaginaires » par l’EST, tout en recourant à chaque fois à la VAR (assistance vidéo à l’arbitrage), pour sa première utilisation dans une épreuve interclubs au niveau africain.
L’EST du milieu international algérien Youcef Belaïli a réussi à renverser la vapeur une semaine plus tard pour l’emporter nettement (3-0) au stade Radés et décrocher le trophée.
Le Comité disciplinaire de la CAF a prononcé sa décision de suspendre le referee algérien sur la base de preuves reçues à propos de son implication dans une affaire de corruption. L’annonce a eu l’effet d’une bombe mardi en Algérie, se propageant telle une traînée de poudre, confirmant les rumeurs de sa suspension ayant circulé au lendemain du fameux match d’Alexandrie.
Interrogé par nos soins, le président de la commission fédérale d’arbitrage (CFA) Mohamed Ghouti a estimé qu’Abid Charef « est exempt de tout reproche » : « Je peux être d’accord sur le fait qu’Abid Charef est exposé à commettre des erreurs au cours d’un match, mais de là qu’il soit accusé de corruption, je ne crois pas. Connaissant la personne, Abid Charef a toujours fait preuve d’honnêteté. Il est prêt à aller jusqu’au bout pour prouver son innocence ».
Zetchi désavoué, la BBC et France Football confortés dans leurs thèses
Le premier responsable de la fédération algérienne de football (FAF) Kheireddine Zetchi a certainement reçu un véritable coup de massue sur la tête avec cette affaire de suspension d’Abid Charef, qui est survenue quelques semaines après les révélations de deux grands médias, la BBC et France Football, sur l’ampleur de la corruption dans le football algérien.
Le président de la FAF avait minimisé l’ampleur des deux enquêtes qui ont été révélées notamment le barème de la vente des matchs dans les deux paliers professionnels.
« Les organes de presse et les médias sont tout à fait libres de s’exprimer. En ce qui concerne ce petit article (de France Football, NDLR), il n’est jamais beau de voir l’image du pays touchée ne ce serait-ce qu’à un petit degré. En lisant l’article, nous avons constaté qu’il était vide et dépourvu de toutes preuves. Le jour où nous aurons des éléments palpables par rapport à cette corruption, nous nous promettons que nous serons engagés à combattre ce fléau à travers notre commission de l’éthique. La meilleure manière c’est de laisser faire », affirmait Zetchi lors d’un point de presse organisé à Sidi Moussa, peu après les travaux de l’assemblée générale extraordinaire (AGEX) de la FAF tenue le 27 octobre.
Le langage du président de la FAF va certainement changer avec cette décision du Comité disciplinaire de la CAF, et doit le pousser plus que jamais à apporter des réformes concrètes et radicales à l’arbitrage.
Même si Abid Charef n’a pas encore été reconnu coupable, il n’en demeure pas moins que la CAF ne va pas s’aventurer à suspendre l’arbitre algérien tout en étant pas sûr d’avoir en sa possession les éléments suffisants pour l’incriminer. L’instance africaine a tout simplement levé le voile sur une pratique devenue légion chez nous, mais dont les preuves n’ont jamais été dévoilées au grand jour.
Un avenir incertain
Très contesté depuis plusieurs saisons, l’arbitrage algérien se trouve désormais au fond du gouffre, alors qu’il avait été considéré jadis comme l’un des plus réputés du continent avec l’ancienne génération menée par les Medjiba, Hansal, et autres Lacarne. C’est l’image de l’arbitrage qui prend un coup dur sur le plan international, où il sera difficile de le réhabiliter.
Première conséquence: trois jours après la finale « controversée » d’Abid Charef, la CAF s’était empressée à retirer le derby nord-africain Égypte – Tunisie (3-2) comptant pour les qualifications de la CAN-2019 à l’arbitre international algérien Mustapha Ghorbal pour le confier au Sud-Africain Victor Gomez. Objectif : éviter toute nouvelle tension entre l’Égypte et la Tunisie.
Abid Charef qui était considéré comme la locomotive de l’arbitrage algérien, est dans le box des accusés pour “corruption” alors qu’il sommet de sa carrière, lui qui faisait partie des arbitres retenus pour la dernière Coupe du monde 2018 en Russie, et s’apprêtait à officier au prochain mondial des clubs 2018 aux Émirats arabes unis (12 – 22 décembre).
Les responsables du football algérien devront vite se remettre en question et trouver des solutions rapides au problème de l’arbitrage, dont la mauvaise réputation est passée désormais au-delà de nos frontières pour ternir l’image du pays.
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