Société

Accueil des Algériens de l’étranger : un député critique un « effet d’annonce »

Même au sein de la flotte vieillissante d’Algérie Ferries, le MobyDada, affrété par la compagnie en début d’année, s’est distingué comme étant le maillon faible. Une entrave qui s’ajoute à plusieurs problèmes dont souffrent les Algériens de l’étranger notamment de France où réside la plus importante communauté d’expatriés nationaux pour venir dans leur pays d’origine.

Le Moby Dada, censé assurer principalement les traversées Alicante-Alger et Alicante-Oran, « cause toutefois beaucoup de soucis pour les membres de la diaspora algérienne qui attend avec impatience de passer des vacances avec la famille en Algérie », déplore le député des Algériens de France, Abdelouahab Yagoubi.

Moby Dada : « Deux gros problème en une semaine »

Dans un entretien accordé à TSA,  le parlementaire n’hésite pas à qualifier le Moby Dada « d’épave », expliquant que le navire « présente des dysfonctionnements multiples » et rappelant « qu’il a déjà été mis à l’arrêt au mois d’avril pour des problèmes techniques ».

Une fois remis en service, le Moby Dada devait accomplir la tâche pour laquelle il a été principalement affrété, en l’occurrence faire face à la demande des Algériens de l’étranger pendant la saison estivale, hélas, il va finir par pénaliser plusieurs voyageurs et compromettre la saison estivale d’Algérie Ferries.

« Il a eu deux gros problèmes en une seule semaine, lors de deux traversées consécutives, d’abord, le système de climatisation s’est arrêté pendant une traversée, et après, il y a eu une avarie électrique généralisée, et les passagers se sont retrouvés dans un blackout total », rappelle le parlementaire.

Port d’Alicante : 1.500 passagers au départ de l’Algérie bloqués à cause du Moby Dada

Suite à cette panne, survenue en pleine mer mercredi 17 juillet dernier, le Moby Dada a rebroussé au port d’Alicante où il s’est retrouvé « sous mesures conservatoires de la société italienne de classification des risques RINA  qui a ordonné que le navire ne bouge pas du port espagnol car il présentait des dysfonctionnements graves », raconte M. Yagoubi.

Le député a toutefois souligné que le nouveau PDG d’Algérie Ferries « a fait un travail extraordinaire mais avec les moyens de bord car il a pris le train en marche ».

Suite à la panne du Moby Dada, le patron d’Algérie Ferries a demandé à ce que le Badji Mokhtar embarque ses passagers de Marseille et mette le cap vers Alicante afin de transporter les voyageurs de la traversée avortée.

Ceci dit, Algérie Ferries s’est retrouvé avec « 1.500 passagers, dont la plupart sont des familles coincés au port d’Alicante », explique le député qui souligne « qu’Algérie Ferries a fait le nécessaire, notamment en accordant une somme de 40 € par passager et par nuitée et la distribution de repas » pendant le Moby Dada était immobilisé à Alicante. Une course contre la montre a été ensuite engagée pour le libérer.

Moby Dada : un navire sans climatisation ?

Avec un de ses navires immobilisé, Algérie Ferries s’est retrouvé avec « un planning très serré et aucune marge de manœuvre », indique le député qui a rendu visite au PDG de la compagnie maritime algérienne, accompagné de son collègue Brahim Dekhinat, afin de trouver une solution au “casse-tête” du Moby Dada.

« Lors des discussions, j’ai proposé de faire intervenir le Parlement de la Méditerranée. Parce que la société classification est une société italienne et j’ai des collègues députés qui travaillent avec le ministre des Transports et des infrastructures italien M. Matteo Salvini », confie Abdelouahab Yagoubi.

« Je les ai donc contacté et j’ai pris attache avec le secrétaire général de l’assemblée parlementaire de la Méditerranée qui a appuyé favorablement ma demande », indique le parlementaire qui explique que le but de cette manœuvre était de débloquer le Moby Dada pour « transporter les passagers malgré les conditions difficiles de la traversée (sans climatisation) »

Ces efforts fournis par le député, jumelés à ceux « de l’EMNTV, des ministères des Transports et des affaires étrangères, de l’ambassade d’Algérie à Rome, etc », ont finalement permis, dimanche 21 juillet, de « maîtriser la situation » et de « laisser partir le Moby Dada malgré les réserves secondaires ».

Moby Dada : à qui la faute ?

Pour M. Yagoubi, « Algérie Ferries se trouve à la merci des caprices du Moby Dada ». Le député dévoile que le navire, qui a été libéré du port d’Alicante dimanche 21 juillet, est tombé à nouveau en panne mercredi 24 juillet.

La responsabilité, « dont personne ne parle », incombe surtout, toujours selon le député, à « l’administration centrale au niveau du ministère des Transports et plus particulièrement la direction générale de la marine marchande et des ports ».

Le député déplore « qu’avec des changements tous les six mois des PDG d’Algérie Ferries, on a perdu la continuité du service public, le sérieux, ainsi que la vision et la stratégie, ce qui fait qu’on joue avec le planning des gens et qu’on ne respecte pas les droits des passagers ».

Le député parle d’une « dégradation totale et complète du service public en matière de transport maritime » qui nécessite « une commission d’enquête parlementaire ».

Il souligne toutefois « qu’on est en vacances du Parlement » et qu’il espère que la commission aura lieu à la rentrée parlementaire et qu’elle ne sera pas bloquée par la majorité comme « les dernières commissions d’enquête qu’on a initiées ».

« C’est dans l’intérêt des citoyens algériens et de l’image du pays qui est ternie à l’étranger ! J’espère que cette commission d’enquête verra le jour pour que la responsabilité soit fixée, les dysfonctionnements identifiés, les risques évalués afin de ne pas tomber dans la même situation à chaque saison estivale », soutient le député.

Air Algérie : une saison estivale « relativement réussie »

Contrairement à Algérie Ferries qui peine à se maintenir la tête hors de l’eau, Air Algérie est en nette amélioration, soutient le député. « Il y a une amélioration notable au niveau du respect des horaires par Air Algérie qui est appuyée par des statistiques fiables qui permettent de faire des comparaisons avec l’année dernière ».

Le parlementaire ajoute que la bonne réputation dont jouit Air Algérie est aussi véhiculée par ses offres et promotions qui permettent aux Algériens de l’étranger de rentrer au pays à moindre frais. « Je pense que la formule Osrati d’Air Algérie a participé substantiellement à améliorer son image de marque », a-t-il noté.

Ceci dit, le parlementaire assure « qu’il ne faut jamais tomber  dans l’autosatisfaction » et « qu’il y a encore beaucoup de choses à améliorer ». Il donne comme exemple les prix des billets, notamment ceux entre la France et l’Algérie, qui restent selon lui « très chers par rapport à la durée du vol », hormis les billets de l’offre Osrati dédiés uniquement aux familles.

Pour M. Yagoubi, « il faut revoir la grille tarifaire après une analyse claire et approfondie », chose sur laquelle « travaille » la direction générale d’Air Algérie. « J’espère que la compagnie dévoilera très rapidement une amélioration et un réajustement de ses tarifs afin qu’elle soit concurrentielle s’il y a une ouverture réelle du marché ».

Le député rappelle d’ailleurs qu’une annonce a été faite en 2022 à propos de l’ouverture du marché algérien de l’aérien au privé. « Jusqu’à maintenant, on n’a rien vu ! », déplore le député qui dénonce une « publicité mensongère ».

Ou sont les passeports promis aux clandestins algériens à l’étranger ? 

Par ailleurs, les Algériens de l’étranger, et malgré des annonces de facilitation de démarches administratives, sont confrontés sur le terrain à plusieurs difficultés. « C’est souvent juste un effet d’annonce. Sur le terrain, les choses ne sont pas aussi simples qu’on le croit », explique-t-il.

Le député prend l’exemple de l’instruction portant sur l’attribution des passeports aux ressortissants algériens en situation irrégulière à l’étranger. « Le président de la république a annoncé qu’on entendra plus parler de ce problème.  Malheureusement, les consuls et l’administration des Algériens à l’étranger tardent à aménager les textes ce qui bloquent la mise en application de cette décision ».

« Ce n’est pas acceptable qu’on reste dans l’attentisme et l’immobilisme quand une décision des hautes autorités de l’État est communiquée publiquement », déplore le parlementaire qui trouve que ce « retard dans l’application de cette décision joue contre la crédibilité de l’État et de ses institutions ».

Accès des Algériens de l’étranger au programme de logement location-vente : « Ils ne peuvent même pas accéder au site de l’AADL ! »

M. Yagoubi évoque également le droit au logement des Algériens de l’étranger, notamment au programme AADL dont les inscriptions ont été lancées vendredi 5 juillet. Alors qu’officiellement les Algériens de l’étranger devaient avoir accès à ce programme, le député dénonce encore « un effet d’annonce ».

« Ils ne peuvent même pas accéder au site internet de l’AADL. Ce dernier est interdit aux adresses IP venant de l’étranger d’un côté, et de l’autre côté, on met des champs obligatoires pour le numéro de la CNAS, alors que les Algériens de l’étranger n’ont pas ce numéro ». 

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