Des chiites marocains ont demandé à leur gouvernement de fournir des preuves du soutien fourni par l’Iran à travers le Hezbollah au Front Polisario. Cette accusation a été émise par le ministère marocain des Affaires étrangères qui s’en est servi comme prétexte pour couper ses relations diplomatiques avec la République islamique, le 1er mai.
L’information a été révélée, samedi 2 juin, par le média marocain Yabiladi qui s’appuie notamment sur les déclarations de Issam Hassani, porte-parole de « Ressalis progressistes », ONG chiite marocaine qui se présente comme un mouvement islamique de gauche.
« Il est du droit du peuple marocain de prendre connaissance de toutes les données concrètes matérielles ayant justifié cette décision politique », a déclaré à Yabiladi l’activiste chiite marocain pour qui les accusations du Makhzen envers l’Iran et le Hezebollah ne sont « que simples paroles dépourvues de toute preuve ».
Les Saoudiens pointés du doigt
« Une grande partie de ce qui a été dit émane d’un écrivain algérien installé en France, connu pour servir des agendas régionaux et ayant déjà joué un rôle suspect en Syrie pendant les missions d’inspection arabe », a déclaré le porte-parole de l’ONG chiite marocain. Pour ce dernier, « en l’absence de preuves matérielles sur ce scénario présumé et à la lumière des démentis officiels à l’autre partie (l’Iran et le Hezbollah, ndlr), je ne peux que supposer qu’un tiers est entré en jeu pour fourni au Maroc une version incorrecte afin de provoquer la rupture des liens entre les deux pays ».
La tierce partie accusée par Issam Hassani est les Saoudiens qui, selon lui, « soutiennent le scénario de mauvaise qualité évoquant l’éventualité d’un soutien de l’Iran au Polisario via le Hezbollah ».
L’accusation par Rabat d’Amir Al-Moussoui , l’attaché culturel à l’ambassade iranienne en Algérie, d’avoir eu « le rôle de médiateur entre le Hezbollah et le Front Polisario » est également réfutée par le militant chiite qui estime qu’Al-Moussoui est « un analyste politique occupant le poste de conseiller culturel et dont les activités et la communication avec les élites culturelles algériennes ont irrité les Saoudiens et les Wahhabites ». Ce qui est, pour Hassani, à l’origine des accusations dont il a fait l’objet.
Le Maroc n’a pas coupé ses relations diplomatiques avec l’Algérie malgré les accusations récurrentes dirigées contre celle-ci par Rabat et selon lesquelles Alger soutiendrait le Polisario et serait même partie prenante dans le conflit du Sahara occidental. Une anomalie soulignée par Issam Hassani pour qui « le Maroc qui maintient ses relations diplomatiques avec l’Algérie qui entretient le Polisario n’est pas le même qui se précipite pour rompre ses relations diplomatiques avec l’Iran ».
Les Chiites marocains dans le collimateur du Makhzen ?
La rupture des liens diplomatiques entre l’Iran et le Maroc aurait pu entraîner des exactions contre les chiites comme ce fut le cas après la rupture entre les deux États au printemps 2009, en pleine crise au Bahreïn.
Un scénario écarté par Hassani qui a déclaré : « Il n’y aura pas de répercussions négatives sur les chiites marocains ». Il rappelle la déclaration faite début mai par Nasser Bourita, ministre marocain des Affaires étrangères, où il a assuré que « la décision (de rupture des liens diplomatiques avec l’Iran) n’aurait pas de répercussions sur les personnes d’obédience chiite et qu’au fond, la décision est politique ».
« Tout le monde, en particulier l’Occident à travers les rapports sur les droits humains, a pris conscience du dossier chiite marocain et sait que les accusations d’être des agents de l’Iran ne dupent plus personne », a argué le militant chiite pour qui « on ne peut donc impliquer les chiites marocains dans un tel dossier, bien que certains relais wahhabites et journalistes corrompus continuent à sortir les mêmes vieux arguments ».