Les dossiers chauds s’accumulent pour la diplomatie algérienne, du voisinage immédiat, au Maghreb et au Sahel, à Gaza et la Palestine en passant par les rapports avec les grandes puissances.
Au Maghreb, l’heure est à la relance de la concertation, à l’initiative de l’Algérie, justement. Lundi 22 avril, le président algérien et son homologue tunisien ainsi que le président du Conseil présidentiel libyen se sont rencontrés à Tunis pour une première rencontre de concertation dans le cadre de la « nouvelle formule » proposée par Abdelmadjid Tebboune.
Ahmed Attaf, le ministre algérien des Affaires étrangères, pourtant diplomate au long parcours, assure ce jeudi lors d’une rencontre avec des médias algériens, dont TSA, n’avoir jamais vu ça. Des discussions à bâtons rompus, voire familiales entre les deux chefs d’État, algérien et tunisien, ainsi que le président du conseil présidentiel libyen, avec des résultats qui s’apparentent à un « but en or » marqué par le nouveau mécanisme pour sa première rencontre, et à la clé, de nombreuses questions politiques traitées ainsi que plusieurs dossiers socio-économiques concrets.
Si le succès du sommet de Tunis ne fait pas débat, plusieurs questions liées à la nature de l’initiative, aux présents et aux absents, se posent encore.
Lors de sa rencontre avec des journalistes algériens ce jeudi 25 avril, Ahmed Attaf a dû s’adonner à un autre exercice d’explication, réitérant ce qu’il a déjà dit sur le sujet et apportant de nouveaux éléments.
De ses propos, il en ressort encore une fois que l’initiative algérienne n’est destinée « contre aucun pays » et la porte « reste ouverte à tous », pour peu qu’il y ait une volonté politique.
Surtout, le mécanisme n’a pas vocation à remplacer l’UMA, qui demeure « un projet » et un « objectif historiques », mais qui se retrouve bloqué à cause des tensions entre l’Algérie et le Maroc sur fond du conflit au Sahara occidental.
Le chef de la diplomatie algérienne n’a répété que les propos tenus lors de sa conférence de presse du 26 mars. Il a aussi apporté de nouveaux éclairages.
Les éclairages d’Ahmed Attaf sur la Palestine, le Maghreb, le Sahel, le Maroc…
L’initiative algérienne n’est certes pas conjoncturelle, mais elle est temporaire et se limite aux pays du Maghreb sans perspective de l’étendre à d’autres zones géographiques. Aussi, on a appris de la discussion qu’un deuxième sommet entre les trois pays se tiendra dans trois mois à Tripoli, en Libye.
Le Maghreb “compte des dossiers qui font l’actualité internationale, comme le dossier libyen et celui de la région sahélo-saharienne”, a expliqué Ahmed Attaf qui a déploré que “tous les pays s’immiscent dans ces dossiers, sauf ceux de la région, qui sont pourtant les premiers concernés”.
Si l’absence du Maroc, à la rencontre de Tunis, était attendue du fait de l’état des relations avec l’Algérie, celle de la Mauritanie l’était moins. Elle est même la surprise de l’événement. Et ce n’est pas faute d’avoir été invitée. Nouakchott a eu sa part d’explications de la nouvelle formule et les dirigeants mauritaniens ont fait leur évaluation et pris leur décision en toute souveraineté.
L’autre sujet phare de l’heure pour la diplomatie algérienne, c’est évidemment la Palestine. Bien que l’armée israélienne poursuit ses bombardements meurtriers sur Gaza, l’Algérie marque des points successifs pour cette autre cause juste qu’elle défend.
Après la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU du 25 mars appelant à un cessez-le-feu, l’Algérie a manqué d’un cheveu de faire passer une autre résolution encore plus retentissante, celle de l’admission de la Palestine à l’ONU comme membre de plein droit.
Le 18 avril, les États-Unis ont mis leur véto. Pour Ahmed Attaf, ce n’est pas un échec, bien au contraire.
Le chef de la diplomatie algérienne préfère positiver et regarder le chemin parcouru depuis la dernière tentative, en 2011. Il y a quinze ans, les estimations faites donnaient un maximum de 7 voix à la résolution.
Aujourd’hui, elle a recueilli pratiquement 14 votes favorables des 15 membres du Conseil de sécurité. La cause de la reconnaissance de la Palestine avance bien et le plus important est de créer un « climat adéquat » pour son acceptation et c’est ce qui est en train de se faire, souligne Ahmed Attaf.
À la « petitesse » du Maroc, l’Algérie préfère « les grandes causes »
Le ministre algérien reste en tout cas convaincu que chaque jour, chaque semaine et chaque mois qui passent nous rapprochent de l’adhésion de l’État de Palestine à l’ONU.
La cause palestinienne ne fait pas oublier à l’Algérie la situation bouillonnante à ses frontières. Au Sahel, la situation est très mauvaise politiquement et économiquement. La diplomatie algérienne ne perd pas de vue son objectif de ramener tout le monde sur « les bons rails de la solution politique », assure son premier responsable.
L’Algérie, fait savoir son chef de diplomatie, discute avec la Russie et aussi avec l’autre grande puissance, les États-Unis. Avec ce dernier pays, il y a certes de profondes divergences sur plusieurs dossiers, comme évidemment celui de la Palestine, mais le cadre général est positif et va en s’améliorant.
Ahmed Attaf ne pouvait pas clore la discussion sans quelques mots sur la question du Sahara occidental et les relations avec le Maroc. Le royaume a recours à des formules « sans queue ni tête », alors que son plan d’autonomie proposé en 2007 n’a jamais été pris par les Nations-Unies comme base de discussion. Et aux « petitesses » du Maroc autour du zellige ou encore de la carte sur un maillot d’une équipe de football, l’Algérie préfère « les grandes causes ».
Sur les relations entre l’Algérie et la France, Ahmed Attaf a assuré « qu’il n’y a aucun problème ». Il a rappelé « qu’une rencontre est prévue bientôt avec son homologue français en prévision des prochaines échéances bilatérales ». Une visite d’État du président Abdelmadjid Tebboune est prévue en France en automne prochain, après la présidentielle du 7 septembre.