Cette journaliste de 46 ans a décidé de se présenter aux prochaines élections présidentielles en Russie, qui débuteront le 18 mars prochain. Première femme musulmane à se lancer dans une telle initiative, elle n’est pourtant pas dupe sur ses chances de victoire. Mais son défi est autre.
Son voile autant que son statut de femme font d’elle un symbole. Originaire du Daghestan, république fédérée de Russie située aux confins de la Géorgie et de l’Azerbaïdjan, Aina Gamzatova est une jeune femme pétrie d’ambitions. À 46 ans, elle a décidé de se présenter aux prochaines élections présidentielles en Russie, dont le premier tour se tiendra le 18 mars.
L’enjeu est ailleurs
À vrai dire, l’épouse du leader religieux Akhmad Abdulaev est une femme d’influence. Vice-rectrice de l’académie de droit, conseillère de son mari et rédactrice en chef de Islam.ru, que le média Al Jazeera présente comme « la plus grande holding de médias musulmans de Russie », elle est entrée en lice, depuis le 30 décembre, dans la course à la présidentielle. Un projet bien ambitieux, pour ne pas dire utopique. « Elle ne va bien sûr pas devenir présidente, c’est stupide ne fut-ce que de l’évoquer », commente Zakir Magomedov, un blogueur populaire du Daghestan.
Aina Gamzatova a clairement conscience que la conquête du Kremlin est une bataille perdue d’avance. Vladimir Poutine, qui jouit de sondages très favorables, devrait décrocher son quatrième mandat. Sans compter que son principal opposant, Alexeï Navalny, a interdiction de se porter candidat.
Si la candidate n’a pas le siège suprême en tête, c’est qu’elle brigue autre chose. Elle espère avant tout que sa candidature puisse mettre en lumière la situation du Caucase, une région ruinée par un fort taux de chômage où « les autorités ont régulièrement recours au trucage des votes et à la coercition d’électeurs », souligne Al Jazeera. Elle assure que son cheval de bataille se fera au niveau fédéral, contre les groupes armés. Avec la candidature d’Aina Gamazatova, « Poutine n’aura pas ses traditionnels 146% dans cette république », ironise Magaomedov.
L’épreuve des 300.000 signatures
Si elle affirme que sa candidature « ne doit pas être vue d’un point de vue religieux, ni comme une tentative des musulmans d’opposer un candidat à Poutine », ce qu’elle véhicule fait d’elle une figure de proue médiatique : « Une musulmane voilée qui se présente à l’élection présidentielle est le symbole d’une émancipation personnelle réussie. Mais cela n’a aucun rapport avec la réalité de la situation des femmes en général dans la société russe », tempère Denis Sokolov, spécialiste du Caucase Nord.
La candidate indépendante devra néanmoins encore collecter 300.000 signatures pour que son inscription à ces élections soit définitivement bouclée. Le défi est de taille. Elle a pour cela jusqu’au 31 janvier.