Société

Alger : le grand retour des embouteillages interminables

La trêve estivale est terminée. La rentrée sociale vient de sonner le retour des bouchons. L’enfer des embouteillages a repris de plus belle à Alger, avec le retour des étudiants.

Les automobilistes algériens se plaignent de passer entre deux à trois heure pour parcourir quelques kilomètres à peine.

Fini le temps où on parlait d’embouteillages subis uniquement pendant les heures de pointe. À présent, les bouchons bloquent les routes matin, midi et soir. Un véritable calvaire pour les automobilistes.

Pourtant, en 2016, un projet ambitieux avait été lancé par les pouvoirs publics. 200 carrefours devaient être équipés en feux tricolores afin de fluidifier la circulation dans la capitale et de la moderniser.

Cinq ans après, le projet est tombé à l’eau au grand dam de tous ceux qui se déplacent en voiture ou en bus et qui vivent un enfer indescriptible. La régulation du trafic automobile à Alger se fait toujours avec des policiers et souvent dans les carrefours et les ronds-points et autres intersections, la priorité est rarement respectée.

Ça bouchonne partout et à toute heure

Alger étouffe sous des kilomètres de bouchons. Aucun axe n’échappe à cet enfer. Qu’on se dirige vers le centre- ville ou vers la banlieue via l’autoroute, c’est le même topo.

Une situation aggravée par l’anarchie qui règne dans la régulation de la circulation, le stationnement, le manque de trottoirs pour les piétons qui sont souvent obligés à marcher sur la chaussée et gêner les voitures…

Un ruban de véhicules, avance cahin-caha, par-choc contre par-choc. Contrairement à toutes les grandes villes du monde, la capitale algérienne n’est pas dotée de feux tricolores hormis à certains rares emplacement comme le carrefour de Tafourah (Grande-Poste), ce qui rend le trafic inextricable.

« J’habite à Rouiba. Je dois sortir à 6 h 20 du matin pour espérer être à l’heure à mon bureau à Clairval.  Si je dépasse 6 h 40, ma matinée de travail est fichue », nous confie Abdou.

Nos cheveux blanchissent dans les embouteillages

Il suffit d’évoquer le sujet des embouteillages pour que les langues se délient. Un ras-le-bol est perceptible chez tous ceux qui doivent se déplacer sur les routes au quotidien. Pour aller au travail, à l’université ou dans une administration, il faut compter plusieurs heures dans le stress, les klaxons et  le tumulte de la ville.

« Avant  hier, j’ai mis une heure et demi, pour rallier Alger- centre à Ben Aknoun. J’ai senti mes cheveux blanchir, tellement l’attente m’a semblé longue et injuste, affirme un autre automobiliste. Faire Alger -Marseille, en avion aurait été plus rapide ! Pourquoi les pouvoirs publics n’installent-ils  pas des feux tricolores comme dans les autres pays ? Tous ces bouchons nuisent à notre santé et à notre économie. On est fatigués ».

Les autoroutes ne sont guère épargnées par ce phénomène d’étranglement permanent. Mieux vaut sortir d’Alger et rejoindre l’autoroute ouest (vers Zeralda)  avant 14 h 30. Au-delà, ça avance au rythme d’un escargot.

« J’emprunte ce tronçon chaque soir au retour du boulot vers 16 h 30 », témoigne Nabila. « Je reste bloquée plus d’une heure juste au niveau des Grands-Vents. Il m’arrive de mettre 2 heures pour arriver jusqu’ à Bousmail où je réside. Et le matin, rebelote. Je dois quitter la maison vers 6 h 30 sinon, c’est complétement bloqué. Conduire pour moi est devenu un calvaire. Malheureusement, il n’y a pas d’autres moyens pour se déplacer. Si le métro existait sur cet axe, la vie aurait été plus facile. J’attends impatiemment le week-end juste pour ne pas avoir à toucher le volant ».

Circulation noire

D’autres axes sont connus pour être des points noirs dans la capitale. Bouzareah, Cheraga, Birkhadem et El Biar sont impraticables pendant une bonne partie de la journée.

« Vous avez déjà essayé de traverser El Biar, par Boulevard Bougara puis par Ali Khodja en journée ? », nous lance  Mahrez. « Circulation ‘kahla’ (noire). Même chose du côté d’El Kods, à Cheraga, ou la côte de Birkhadem. Ma sœur habite Cheraga et je peux vous dire qu’elle souffre énormément et qu’elle cherche à déménager tellement elle n’en peut plus de ces bouchons. Son fils a eu un accident domestique dernièrement. Elle et son époux ont mis une heure pour parcourir un kilomètre. C’est invivable et même risqué en cas d’urgence ».

Avec la rentrée sociale, le retour au travail en présentiel pour de nombreux employés et surtout la reprise des étudiants des différentes universités implantées dans la capitale, Alger se retrouve complétement asphyxiée.

Pollution, stress, énervement, mal- être résultent de cette situation. « J’ai calculé que je perdais 165 heures de ma vie, par an, dans les embouteillages », s’irrite Assia. « La seule période où j’ai été épargnée par les embouteillages, c’était en 2020. À cause de la pandémie, j’étais en télétravail. Cela m’a permis de souffler un peu ».

Bye- bye les feux tricolores             

La situation ne cesse d’empirer d’année en année. Alger qui enregistre un trafic de plus en plus dense, avec le passage de plus de 1, 7 millions de véhicules par jour, se congestionne.

La ville ne répond pas aux exigences d’une capitale moderne. En 2016, un espoir a commencé à poindre avec le projet de l’installation des feux tricolores.

Réguler et contrôler la circulation avec un ce système automatique était très attendu par les automobilistes. Cette première étape prévoyait de doter 200 carrefours de feux tricolores.

À titre expérimental, 22 appareils de ce genre avaient été installés, sur une distance de 7 km, entre Belouizdad et Ruisseau.

Hélas, après plusieurs reports le projet est tombé à l’eau. Mobeal, le partenaire espagnol dans la société mixte algéro-espagnol a fini par jeter l’éponge, après la décision des autorités algériennes de renoncer à ce projet. Contacté, le ministère des Transports a refusé de répondre à nos questions sur les raisons de l’abandon du projet de doter la capitale d’un système moderne de régulation de la circulation.

La sonnette d’alarme est tirée. La question des embouteillages maintes fois posée sur la table des pouvoirs publics n’a pas trouvé encore d’épilogue. En attendant, se déplacer dans la capitale devient de plus en plus difficile. Alger souffre aussi de l’absence de moyens de transports de masse modernes.

Le métro d’Alger couvre une petite partie de la ville et la livraison de son extension sur 9 km, d’El Harrach à l’aéroport international, est renvoyé à 2026.

Dans plusieurs quartiers de la capitale, le bus et la voiture représentent les deux moyens de se déplacer, avec un avantage pour le véhicule particulier, en raison de l’état de délabrement du parc des autobus qui sont eux-mêmes prix dans la spirale infernale des embouteillages.

Les conducteurs n’en peuvent plus de vivre le calvaire au quotidien et espèrent une solution dans les plus brefs délais. Comme par exemple, décaler les horaires de bureau dans la Fonction publique, réserver des voies spéciales aux bus, créer de grands parkings souterrains pour offrir plus de places de stationnement…

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