Que retenir de l’année qui s’achève ? Très peu de belles choses et énormément de tristes nouvelles. 2020 a pourtant commencé pour les Algériens par un immense espoir conforté par une annonce réjouissante le matin du 2 janvier, premier jour ouvrable de l’année.
Une dizaine de jours à peine après la prestation de serment du nouveau président de la République, Abdelmadjid Tebboune, près de 80 détenus politiques et d’opinion sont remis en liberté, parmi lesquels le moudjahid Lakhdar Bouregaâ.
Bouregaâ, Idir, Benani, Lamine Khène tirent leur révérence
Mais la suite sera moins heureuse, puisque les arrestations et condamnations des activistes du Hirak se poursuivront pendant toute l’année, même si, épisodiquement, des gestes d’apaisement sont consentis avec la remise en liberté de figures connues, comme Karim Tabbou et Fodil Boumala.
Fin mars, le journaliste Khaled Drareni sera incarcéré après avoir été arrêté au cours d’une marche à Alger au début du mois. Condamné à 3 ans de prison ferme en première instance puis à deux ans en appel, il est toujours détenu à la prison de Koléa.
D’autres détenus arrêtés en 2019 auront passé toute l’année 2020 derrière les barreaux, pour certains sans jugement, comme c’est le cas de Rachid Nekkaz et Ali Ghediri.
Les marches du hirak ont cessé dès avril pour cause de Covid, mais la situation des droits de l’Homme vaudra au pays une mise au pilori sur la scène internationale avec la résolution du Parlement européen du 28 novembre.
Lakhdar Bouregâa a retrouvé la liberté au début de l’année, mais ne verra pas l’année 2021. Le vieux maquisard est mort le 4 novembre à 87 ans, emporté par le Covid-19. De nombreuses personnalités d’horizons divers, dont les chanteurs Idir et Hamdi Bennani, et le moudjahid Lamine Khène ne verront pas l’année 2021.
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Une crise sanitaire qui a tout chamboulé
Incontestablement, on se rappellera de l’année 2020, en Algérie et dans le reste du monde, comme celle de la méchante pandémie. Le premier cas positif est détecté fin février en Algérie.
Très vite, le virus se propage et atteint tout le pays. Le premier décès est déploré jeudi 12 mars à Blida. Après un pic en juillet (675 cas quotidiens) suivi d’une décrue, une deuxième vague s’est avérée plus virulente pendant l’automne, atteignant son paroxysme le 24 novembre avec 1133 nouvelles contaminations en 24 heures.
Depuis, c’est de nouveau la décrue et l’Algérie clôture l’année sous la barre des 300 cas quotidiens (299 le 31 décembre). Même si l’Algérie n’a pas connu les scénarios catastrophe que subissent de nombreux pays du monde, le bilan aura été tout de même lourd.
Au 31 décembre, le pays a frôlé la barre des 100 000 contaminations (99 610) et déploré 2 756 décès depuis le début de l’épidémie. Même ceux qui n’ont pas contracté le virus ont subi les conséquences de la crise sanitaire dans leur quotidien.
Des mesures drastiques ont été prises depuis la mi-mars, incluant la fermeture des frontières et la suspension des liaisons aériennes, la fermeture des écoles, des universités, des mosquées, des lieux de loisirs et de nombreux types de commerces, l’interdiction des rassemblements et des fêtes familiales, la suspension des transports et des manifestations sportives, le confinement partiel à domicile et le port de masque.
Ce qu’ont vécu les Algériens pendant cette année était impensable : des fêtes de l’Aïd sans visites familiales, un ramadan sans sorties nocturnes, le pèlerinage annulé, les cours suspendus, le bac et le BEM en septembre, un championnat de foot attribué sur tapis vert…
Neuf mois après, des Algériens sont toujours bloqués à l’étranger, les multiples opérations de rapatriement organisées n’ayant pas pu ramener tout le monde.
Mais ce sont les répercussions économiques de la crise sanitaire qui ont fait le plus mal. Des centaines de milliers d’emplois permanents et saisonniers seraient perdus. Comme pour ne rien arranger, le pétrole, principale source en devises du pays, a vu ses prix chuter jusqu’à atteindre des valeurs négatives en avril.
Le référendum sans Tebboune
La crise sanitaire a aussi mis en veilleuse les réformes économiques promises, mais pas le projet politique phare du pouvoir, soit la révision constitutionnelle.
En dépit du confinement, les consultations se sont poursuivies et même la campagne s’est tenue avec des salles parfois archicombles, des meetings désignés par des spécialistes comme le Pr Kamel Bouzid comme l’une des causes de la deuxième vague de la pandémie.
Le référendum s’est tenu le 1er novembre, mais en l’absence du président de la République qui, trois jours plus tôt, avait aussi raté l’inauguration d’une partie de la Grande mosquée d’Alger.
Atteint de Covid-19, Abdelmadjid Tebboune a été transféré en Allemagne le 28 octobre. Sa longue absence a fait craindre aux Algériens la réédition du scénario des dernières années de la présidence Bouteflika.
Mais le président Tebboune est réapparu le 13 décembre dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux. Le 29 décembre, il rentre au pays et, le 31, il signe la loi de finances 2021. La veille, il a promulgué la nouvelle constitution.
L’année 2020 a été également celle de la poursuite des grands procès anti-corruption visant les symboles du régime Bouteflika. Condamné fin 2019, l’ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia a été vu, menotté, à l’enterrement de son frère et avocat, Laïfa, en juin.
Retour de Nezzar
Les images ont fait le tour des médias et des réseaux sociaux. L’année s’achève avec l’annonce, jamais démentie, du retour en Algérie du général Khaled Nezzar, le placement du général Toufik dans une structure sanitaire. Les deux anciens hauts responsables ont été condamnés à de lourdes peines par le tribunal militaire de Blida. Nezzar était en fuite à l’étranger, il a été condamné par contumace.
Sur le plan régional, l’Algérie a vu la situation se compliquer à ses frontières ouest avec de nouvelles tensions entre le Front Polisario et le Maroc et un gros développement le 11 décembre, lorsque le président américain Donald Trump a annoncé sa reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le territoire occupé et la normalisation des relations entre la monarchie et Israël. « Il y a une volonté de ramener l’entité sioniste à nos frontières », a réagi le Premier ministre Abdelaziz Djerad.
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