La crise entre l’Algérie et l’Espagne perdure et les élections générales espagnoles du dimanche 23 juillet n’ont pas permis d’espérer un retour rapide à la normale.
Djamel Eddine Bou Abdallah est président du Cercle de commerce et d’industrie algéro-espagnol (CCIAE).
Dans cet entretien accordé à TSA ce lundi 24 juillet, il revient sur les relations algéro-espagnoles et les possibilités d’un retour à la normale après plus d’une année de crise causée par le revirement du gouvernement espagnol sur la question du Sahara occidental.
Plus d’une année depuis l’éclatement de la crise entre l’Algérie et l’Espagne en mars 2022, pouvez-vous nous faire un état des lieux sur les relations économiques entre les deux pays ?
L’Algérie exporte toujours du gaz vers l’Espagne. L’Algérie est toujours parmi les premiers fournisseurs de l’Espagne en énergie. Mis à part ça, tout est gelé.
Certaines entreprises passent par d’autres pays notamment par la France et le Portugal pour travailler avec l’Algérie. En termes d’échanges, on est proche du zéro. C’est une situation exceptionnelle qui dure depuis plus d’une année maintenant.
Quel est l’impact de la crise entre l’Algérie et l’Espagne sur les entreprises algériennes et espagnoles ?
Les entreprises des deux pays sont impactées. Environ 3 milliards de dollars d’échanges import-export entre l’Algérie et l’Espagne sont suspendus.
Il y a des entreprises espagnoles qui souffrent car l’Algérie est leur plus grand marché. Même les entreprises algériennes sont négativement impactées notamment celles qui peinent à remplacer leurs fournisseurs en matière première dans la céramique par exemple.
Ces entreprises ne trouvent pas de matières premières aux prix qu’elles étaient habituées à avoir chez les fournisseurs espagnols. Une entreprise espagnole dans la filière du poulet couvrait 60 % du marché du poussin en Algérie. La Région de Castellon est la plus impactée en Espagne tandis qu’en Algérie c’est la ville d’Oran où il y a une concentration d’importateurs dans la céramique.
Des élections générales en Espagne se sont déroulées dimanche 23 juillet. Elles n’ont pas débouché sur une majorité claire, quel impact peut avoir l’issue du scrutin sur les relations algéro-espagnoles ?
Au regard des sorties et des déclarations des responsables de la droite, ils veulent reprendre les relations avec l’Algérie et ne sont pas d’accord avec la position officielle sur le Sahara occidental.
Alberto Nuñez Feijóo, le leader du Parti populaire a clairement déclaré qu’il n’était pas au courant du pacte conclu entre le chef du gouvernement Pedro Sanchez et le Maroc.
On s’attendait à un raz de marée de la droite mais il n’a pas eu lieu. Le Parti populaire doit convaincre Vox (extrême droite) et pactiser avec Unión pueblo navarro qui est un parti basque.
Tout dépend des pactes. Il y a même une probabilité qu’un vote soit organisé à nouveau pour départager les deux camps.
L’arrivée du Parti populaire au pouvoir pourrait-elle selon vous faire revenir la relation à son état d’avant le revirement de Pedro Sanchez en mars 2020 ?
Quand le leader du Parti populaire a été interrogé à ce sujet, il a montré une disposition à redistribuer les cartes. S’il arrive à former un gouvernement, il aura les cartes en main pour revenir à une relation équilibrée avec l’Algérie et le Maroc et en finir avec cette crise.
En tant que Cercle de Commerce et d’Industrie Algéro-Espagnol qu’attendez-vous du prochain gouvernement espagnol ?
Qu’il revienne à la position classique de l’Espagne. On est dans l’inactivité. Nous voulons que les échanges commerciaux reprennent. Ce qui nous importe le plus c’est que les choses se débloquent.
Il y a beaucoup de retard à rattraper. La situation géopolitique a beaucoup évolué. L’Algérie pourrait être une solution pour les entreprises espagnoles qui pourraient délocaliser leur production dans notre pays.
Êtes-vous optimistes quant à un retour à la normale des relations algéro-espagnoles ?
Je crois qu’ils ont commencé à ouvrir les lignes aériennes. Les liaisons entre Alicante, Alger et Oran ont été relancées. Selon mes informations, ça annonce d’autres ouvertures.
Même le gouvernement espagnol n’est pas satisfait des résultats de son rapprochement avec le Maroc. Quel que soit celui qui formera le gouvernement, il a les possibilités de revenir à une position équilibrée et de reprendre des relations normales avec l’Algérie.
Il y a de quoi être optimiste quant à un retour des relations entre l’Algérie et l’Espagne. L’Espagne est toujours notre client. L’Europe est demandeur d’énergie. L’Algérie est toute proche et il y a un gazoduc qui la relie à l’Espagne. Tous ces éléments entrent en jeu pour que la situation se débloque.
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