Du nouveau en perspective dans le dossier de l’accord de 1968 qui régit l’immigration algérienne en France.
Dans le viseur d’une partie de la classe politique qui réclame sa suppression, le texte pourrait faire l’objet d’une révision, à travers l’ajout d’un autre avenant. Sous la pression de la droite et de l’extrême-droite, le gouvernement français aurait finalement accepté le principe d’une renégociation, mais sans plus.
La question a dû être abordée lors du déplacement surprise à Alger du ministre français de l’Intérieur, Gérald Darmanin, le 5 novembre.
Négocié en 1968 pour mettre fin à la libre circulation des personnes qui a été consacrée par les Accords d’Évian six ans plus tôt, le texte régit depuis la mobilité et le séjour des ressortissants algériens en France.
Plus de 50 ans après, et malgré trois avenants qui lui ont été apportés en 1985, 1994 et 2001, une partie de la classe politique française le considère comme dépassé et surtout avantageux pour les immigrés algériens par rapport aux ressortissants des autres pays, soumis au droit commun.
Depuis plusieurs mois, l’extrême-droite, les Républicains et des personnalités comme l’ancien Premier ministre Édouard Philippe et l’ancien ambassadeur de France à Alger, Xavier Driencourt, font le forcing pour la révocation pure et simple du texte, et ce, au risque de déclencher une rupture des relations avec l’Algérie.
Les deux gouvernements, eux, tiennent à cet accord, comme l’ont exprimé clairement à plusieurs reprises leurs représentants respectifs.
De part et d’autre, il est considéré comme très sensible pour la relation bilatérale. Néanmoins, après s’être montré très ferme dans son refus de toucher au texte, le gouvernement français serait prêt à faire une petite concession à la droite en envisageant une renégociation, à en croire le journal français Le Figaro.
Le groupe parlementaire des Républicains est passé à l’acte en déposant une proposition de résolution – non-contraignante – visant à dénoncer l’accord. Elle devrait être discutée en plénière par l’Assemblée nationale (chambre basse) le 7 décembre prochain.
Renégociation de l’accord de 1968 : le souci de ne pas froisser la relation franco-algérienne
En prévision du débat qui coïncidera sur la nouvelle loi sur l’immigration adoptée en première lecture le 14 novembre par le Sénat, les députés du groupe parlementaire du parti présidentiel Renaissance ont reçu une instruction claire quant à la ligne à défendre : pas de suppression du texte, juste la promesse d’étudier la possibilité de négocier un quatrième avenant.
Rien n’a cependant filtré sur les clauses qui seraient concernées par une éventuelle renégociation qui pourrait figurer parmi les points qui seront abordés lors de la prochaine visite d’État du président Abdelmadjid Tebboune en France. Prévue initialement en mai dernier, elle a été reportée à juin avant d’être renvoyée sine die, sans être annulée. Selon nos sources, ce déplacement pourrait intervenir début 2024. Des préparatifs sont en cours pour cette échéance, mais aucune n’est encore fixée.
Bien que soutenue par le Rassemblement national et Horizons, le parti d’Édouard Philippe la proposition des Républicains a peu de chances d’être adoptée, estiment les observateurs.
Néanmoins, le camp présidentiel accorde une certaine importance à la question qui, selon Le Figaro, a fait l’objet de longs débats entre le gouvernement et les députés du groupe Renaissance la semaine dernière. Ces derniers avaient besoin d’une clarification alors que certains d’entre eux étaient tentés de soutenir la proposition des Républicains.
C’est désormais chose faite et la vice-présidente du groupe, Marie Lebec, explique ce que sera sa position avec ses collègues : le texte a besoin d’être révisé, car il ne correspond plus à la situation actuelle, mais le supprimer ne changerait rien.
« Cela tendrait nos relations avec nos homologues algériens (et) mieux vaut œuvrer à améliorer nos discussions avec eux », dit-elle.
Le souci de ne pas mettre en péril les relations avec l’Algérie est partagé même par les Républicains. Le président de leur groupe parlementaire, Olivier Marleix a jugé la proposition « vitale » en termes de sécurité et d’immigration, tout en reconnaissant que la relation avec l’Algérie est un « enjeu géopolitique majeur pour la France ».
Le député Renaissance Sylvain Maillard avance une autre raison pour réviser le texte. Selon lui, la partie algérienne souhaite elle-même renégocier l’accord qui comporte aussi, quoi que l’on dise, des clauses désavantageuses pour l’immigration algérienne.
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