L’accélération des événements en Algérie inquiète l’Europe. En France, principal partenaire de l’Algérie, les médias se montrent particulièrement sévères à l’égard du président Bouteflika, qui a décidé de briguer un nouveau mandat surréaliste, malgré son état de santé. Les langues commencent à se délier. Des responsables politiques montent au créneau pour critiquer le pouvoir algérien.
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L’Europe semble découvrir une situation nouvelle en Algérie, celle d’un régime autoritaire qui est prêt à tout pour se maintenir au pouvoir. Pourtant, la situation n’est pas nouvelle. Cela fait de nombreuses années que les Algériens dénoncent les dérives autoritaires du régime. Des dérives qui se sont accélérées ces dernières années, avec des atteintes répétées aux droits de l’Homme et aux libertés.
« Quand on est sur place, en Algérie, on ressent énormément le poids de la dictature. On ne peut rien faire, tout est alambiqué, tout est corrompu, rien n’est officiel. C’est un fonctionnement que je n’ai jamais vu ailleurs », résumait ce lundi matin sur Europe1 l’actrice et réalisatrice franco-algérienne Maïwenn.
Dans les faits, cette réalité était connue des pays européens, partenaires de l’Algérie. Mais pour préserver ses intérêts, l’Europe s’est abritée derrière une position bien commode : une stabilité avec un régime autoritaire c’est toujours mieux qu’une démocratie chaotique, comme si les Algériens n’étaient pas capables de proposer une autre alternative.
Le régime algérien l’a bien compris et il a longtemps joué sur cette fausse crainte du chaos. Alger s’est rapidement positionné comme un partenaire incontournable dans la lutte contre le terrorisme. Le pouvoir se présente aussi comme un garant de la stabilité, avec à chaque fois le même message martelé auprès de ses partenaires étrangers : l’Algérie reste une proie facile pour les islamistes. Sur le plan économique, le pouvoir de Bouteflika a mis en place des lois qui entravent l’investissement et favorisent l’importation. L’objectif est double : enrichir la clientèle du régime et permettre aux pays européens d’exporter.
L’année dernière, l’Union européenne s’est comportée de manière scandaleuse quand le gouvernement, par crainte de voir les réserves de change s’épuiser rapidement, a décidé de réduire certaines importations. L’UE est montée au créneau, menaçant Alger de représailles. Finalement, le gouvernement a fini par céder. Dans ce dossier, l’Europe ne s’est pas souciée des conséquences d’un épuisement des réserves de change sur la stabilité de l’Algérie. Elle a juste regardé ses propres intérêts matériels.
Aujourd’hui, les Européens font mine de découvrir qu’ils ont soutenu pendant des années l’un des régimes les plus autoritaires de la planète. Ils ont sans doute compris que sa fin approche avec la révolte des Algériens. Mais ils feraient mieux de se tenir à l’écart et éviter de faire des déclarations qui pourraient au final servir les intérêts du pouvoir. Ce dernier n’attend qu’une seule chose : pouvoir affirmer que la révolte est téléguidée depuis l’étranger. L’Europe doit s’abstenir de la lui donner.