Un remaniement ministériel a été opéré ce jeudi 16 mars en Algérie. Ramtane Lamamra et Kamel Rezig quittent leurs postes respectifs de ministres des Affaires étrangères et du Commerce à la faveur de ce remaniement opéré par le président Abdelmadjid Tebboune.
Ce sont les changements les plus notables apportés par le remaniement, sans constituer toutefois des surprises.
À noter aussi le remplacement des ministres des Transports Kamel Beldjoud et des Finances Djamel Kessali, ainsi que la promotion de Ali Aoun, qui aura désormais sous sa coupe le secteur de l’industrie, en plus de la production pharmaceutique qu’il gérait jusque-là.
Le départ de Kamel Rezig et de Ramtane Lamamra était dans l’air depuis plusieurs semaines. Néanmoins, si les raisons du remplacement du premier sont évidentes, celles ayant conduit au départ du second demeurent obscures.
Ramtane Lamamra a été nommé chef de la diplomatie algérienne en juillet 2021, en remplacement de Sabri Boukadoum. C’était son troisième passage au poste après deux nominations sous Abdelaziz Bouteflika (entre 2013 et 2017 puis entre mars et avril 2019). Lors de son deuxième passage, il était aussi vice-premier ministre du gouvernement présidé par Noureddine Bedoui.
Ces deux dernières années, Ramtane Lamamra a accompagné le redéploiement de la diplomatie algérienne sur la scène internationale et a eu notamment à gérer le dossier de la crise avec le Maroc. C’est lui qui a annoncé la rupture des relations diplomatiques entre l’Algérie et ce pays en août 2021, un mois après son retour aux affaires.
Depuis quelques semaines, il a énigmatiquement disparu de la scène, n’assistant pas aux visites de hauts responsables étrangers. C’était par exemple le cas cette semaine à l’occasion des visites du président de l’Ouganda et du haut représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères, Josep Borrell. Pour les observateurs, il était évident que le chef de la diplomatie algérienne ne survivrait pas au prochain remaniement.
« S’il faut regretter le départ de Ramtane Lamamra, il faut aussi se féliciter du choix porté sur Ahmed Attaf pour le remplacer », indique un observateur très au fait des arcanes de la diplomatie algérienne.
Ahmed Attaf, un homme au long parcours
Le nouveau ministre des Affaires étrangères de l’Algérie, c’est donc Ahmed Attaf, 69 ans, titulaire du poste sous le président Zeroual entre janvier 1996 et décembre 1999.
« C’est un homme au long parcours diplomatique. Il peut être opérationnel dès demain. Il a occupé cette fonction pendant les années de crise diplomatique et sécuritaire. Il était avec Ramtane Lamamra le plus proche collaborateur du Dr Ahmed Taleb Ibrahimi (ministre des Affaires étrangères dans les années 1980, ndlr) », rappelle le même observateur.
Une source diplomatique interrogée par TSA décrit Ahmed Attaf comme une « lumière » de part de sa « belle plume » et les fonctions qu’il a occupées.
Né en 1953 à Ain Defla, Attaf est diplômé de l’École nationale d’administration (ENA). Avant de devenir chef de la diplomatie algérienne en 1996, il avait occupé le poste de secrétaire d’État au ministère des Affaires étrangères, chargé des affaires africaines et maghrébines, après avoir été ambassadeur d’Algérie en Inde, en Yougoslavie et au Royaume-Uni. Il a donc un parcours aussi étoffé que celui de son prédécesseur.
« Il maîtrise trois langues. Finalement, il ne fait que retourner dans un poste de responsabilité qui ne lui est pas inconnu », ajoute la source diplomatique.
Kamel Rezig n’a pas le même vécu. Il a connu sa première expérience politique sous Abdelmadjid Tebboune, mais il est le doyen du gouvernement. Il a été nommé ministre du Commerce dans le premier gouvernement de Abdelmadjid Tebboune en janvier 2020 et est resté en poste jusqu’à ce jeudi 16 mars, bien qu’il ait été pendant toutes ces années le ministre le plus contesté du gouvernement.
À sa décharge, sa venue à la tête du secteur a coïncidé avec le début de la crise sanitaire de Covid-19, accompagnée d’une multitude de pénuries de produits de base et de hausses des prix. Si certains lui ont trouvé des circonstances atténuantes, d’autres ont pointé du doigt ses méthodes dans la gestion des importations.
Le président de la République n’a pas donné suite aux demandes de le remplacer, mais son départ est devenu inéluctable avec la persistance des pénuries et des hausses des prix. Le sort de Kamel Rezig était scellé lorsque le président Tebboune a critiqué sa gestion en plein conseil des ministres le 20 février dernier.
Le lendemain, l’agence officielle APS a cité parmi les raisons de la « colère » présidentielle, le blocage des importations alors que le président avait demandé de les rationaliser. Le reproche était destiné au ministre du Commerce.
Son remplacement à quelques jours d’un mois de ramadan qui risque d’éprouver davantage le pouvoir d’achat ne pouvait être mieux synchronisé. Le département est désormais confié au revenant au gouvernement, Tayeb Zitouni.