Les ménages algériens consacrent une grande partie de leur budget à l’alimentation. Un professeur en agronomie livre quelques chiffres précis liés à la part des produits alimentaires dans les dépenses des ménages.
Malgré une nette diminution ces dernières années, la proportion de l’alimentation dans le budget des familles algériennes demeure très élevée par rapport à la moyenne dans les pays développés, constate le professeur Ali Daoudi, enseignant-chercheur à l’École supérieure d’agronomie d’Alger.
Mercredi, sur la chaîne 3 de la radio algérienne, le professeur a fait savoir que les ménages algériens consacrent en moyenne 34 % de leur budget à l’alimentation, reprenant ainsi les chiffres de l’Office national des statistiques (ONS) pour l’année 2022, publiés fin octobre dernier. Les Algériens ont dépensé en moyenne 2.753,1 milliards de dinars pour l’alimentation, selon cette enquête de l’ONS.
Soit beaucoup moins qu’en 2011 où la proportion était de 41 %, a-t-il précisé. Néanmoins, 34,3 % reste un taux moyen très élevé si l’on compare avec ce qui se fait dans les pays développés où, selon lui, seuls 7 à 8 % du budget des ménages est consacré aux dépenses alimentaires.
En 2023, les ménages français ont consacré 15,3 % de leur budget à l’alimentation, aux boissons et au tabac, selon les chiffres de l’Institut national des statistiques et des études économiques (Insee). Cette part était de 30 % en 1960.
« Nous sommes un pays où une bonne partie des revenus est consacrée à l’alimentation », pointe Ali Daoudi, ce qui expose fortement les ménagers algériens aux variations des prix agricoles.
Malgré donc l’amélioration constatée ces 13 dernières années, les Algériens continuent à dépenser un tiers de leur budget dans l’alimentation, voire plus.
Les dépenses alimentaires accaparent jusqu’à 40 % du budget des ménages les plus démunis, a fait savoir Ali Daoudi.
Ce qui les rend très vulnérables aux fluctuations des prix et à l’inflation. Dans les pays développés, « la sensibilité aux variations de prix est très faible, tandis qu’en Algérie, elle est très marquée », a-t-il noté.
« Lorsqu’un ménage consacre une part importante de son budget à la consommation, une variation de 3 à 5 % des prix des produits alimentaires entraîne une réduction significative du pouvoir d’achat », a expliqué le professeur.
La part importante de l’alimentation dans le budget des ménages algériens
La moyenne aurait pu être encore plus significative sans la politique des subventions publiques généralisées qui touchent plusieurs produits de base.
Les prix du pain, du lait, des farine et semoule, des sucres et huiles sont restés stables grâce à leur fixation ou leur plafonnement par les pouvoirs publics moyennant des subventions ou des compensations aux producteurs. Depuis quelques semaines, le café a rejoint la liste des produits subventionnés par l’État.
Les prix des produits agricoles frais et viandes sont en revanche libres et ce sont eux qui tirent vers le haut l’inflation et, partant, la part des dépenses alimentaires dans le budget des ménages.
Citant les chiffres de l’Office national des statistiques (ONS), Daoudi fait état d’une évolution significative des prix des produits agricoles sur une année, augmentant de 4,3 % entre septembre 2023 et septembre 2024.
Il s’agit, selon lui, de la conséquence des « choix d’orientation des agriculteurs, qui privilégient certaines cultures en fonction de leurs prévisions basées sur les anticipations des prix de vente et des coûts de production ».
Le spécialiste en agronomie pointe aussi du doigt la baisse « préoccupante » des surfaces consacrées à l’agriculture maraîchère, donc à la production de produits agricoles frais, selon les données du ministère de l’Agriculture.
Les surfaces irriguées et cultivées sont passées de 120 m² par citoyen en 2012 à 90 m² aujourd’hui, a-t-il regretté.
Pour remédier à la situation actuelle, Ali Daoudi estime qu’il faut d’abord « une grande enquête » qui aidera à comprendre le modèle de consommation des Algériens et leurs besoins en matière d’alimentation. Cela permettra de mieux orienter la production agricole, indique-t-il.
Le professeur préconise, en outre, l’extension des surfaces cultivées et une transformation structurelle et technologique de l’agriculture algérienne pour une meilleure productivité qui viendra compenser la baisse des superficies.
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