L’Algérie a décidé d’exploiter le gisement de fer de Gara Djebilet qui est situé à Tindouf, aux frontières avec le Maroc. Après plusieurs annonces infructueuses de lancer ce projet, le gouvernement a fini par passer à l’acte.
Le 30 juillet, le ministre de l’Energie et des mines Mohamed Arkab a lancé officiellement les travaux d’exploitation de cette mine de fer.
Sur place, M. Arkab a affiché les ambitions de l’Algérie d’y extraire d’importantes quantités de minerai de fer : deux à trois millions durant la période 2022-2025, puis entre 40 à 50 millions de tonnes/an à partir de 2026.
Après des décennies d’attente, le projet d’exploitation de Gara Djebilet prend enfin forme, ce qui a réveillé de vieux souvenirs chez le voisin marocain. Les souvenirs d’une intégration économique ratée entre deux voisins qui auraient pu constituer un ensemble régional de poids.
Au Maroc, et comme c’est souvent le cas, ces dernières années, dans un contexte de fortes tensions entre les deux pays, le coup d’envoi de l’exploitation du gisement géant de Gara Djebilet a été l’occasion pour tenter de revendiquer une partie du projet.
Le lancement du projet a été suivi d’une campagne marocaine qui tente de chahuter sur ce projet en exhibant la convention de coopération signée en 1973 entre l’Algérie et le Maroc pour la mise en valeur de la mine de Gara-Djebilet.
Dans cette convention que nous avons consultée, il est écrit noir sur blanc que l’Algérie est « propriétaire du gisement minier de fer de Gara-Djebilet, situé sur son territoire et relevant de sa pleine souveraineté ».
Il est précisé aussi que le Maroc « dispose, par son territoire, notamment de possibilités d’évacuation et d’embarquement du minerai par un port marocain qui sera situé sur l’Atlantique ».
L’Algérie et le Maroc avaient convenu, dans le cadre de l’exploitation de Gara Djebilet, de « conjuguer leurs efforts, de coopérer dans les meilleures conditions économiques ». Il avait été convenu aussi de créer « dans les meilleurs délais » une société algéro-marocaine pour la mise en valeur de Gara-Djebilet.
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La convention algéro-marocaine de coopération tombée en caducité
Il va sans dire que cette société n’a jamais vu le jour. Et la convention de coopération entre l’Algérie et le Maroc pour la mise en valeur de la mine de Gara-Djebilet est devenue caduque pour des raisons juridiques et politiques.
Signée le 15 juin 1972 à Rabat, cette convention qui est annexée à l’accord relatif au tracé de la frontière entre l’Algérie et le Maroc, a été ratifiée le 17 mai 1973 par l’Algérie. En revanche, le royaume ne s’est pas précipité pour la ratifier. Il a pris tout son temps.
Le Maroc a attendu 20 ans pour apposer sa signature sur le document. C’était le 22 juin 1992. Plus grave, et contrairement à l’Algérie, le Maroc n’a toujours pas déposé les instruments de ratification de l’accord sur la délimitation de la frontière terrestre auprès du secrétariat général des Nations Unies.
« Une attitude qui interroge sur la sincérité et la crédibilité des engagements souscrits par le royaume », remarque un ancien haut responsable algérien. Bien avant la ratification de la convention par le Maroc, le projet qui devait être le premier pilier de l’intégration économique maghrébine, n’a pas fait long feu.
« Le projet d’exploiter en commun la mine de Gara Djebilet est mort en 1975, après l’invasion du Sahara occidental par le Maroc », remarque le même ancien haut responsable.
Cet acte colonial a plongé les relations algéro-marocaines dans une crise sans fin. La déclaration politique algéro-marocaine signée le 15 juin 1972, visait essentiellement, au même titre que l’accord sur les frontières, à établir la base d’une « paix permanente et d’une ère de concorde » entre les deux pays, rappelle encore notre interlocuteur.
Puis, le royaume a donné le coup de grâce au projet de Gara Djebilet, en décidant de rompre ses relations avec l’Algérie en 1976. « Or en 1976, le Maroc avait décidé unilatéralement de rompre ses relations diplomatiques avec l’Algérie. La suite est un long parcours fait de reniements, de provocations et d’actions hostiles à l’égard de notre pays », ajoute-t-il.
Agitation incompréhensible
Enfin, il n’est pas inutile de souligner que l’alinéa 4 du préambule de la convention de coopération pour la mise en œuvre de la mine de Gara-Djebilet énonce clairement que l’Algérie est « propriétaire de ce gisement minier, situé sur son territoire et relevant de sa pleine et entière souveraineté. »
Au lendemain du lancement des travaux d’exploitation de la gigantesque mine de Gara Djebilet, une agitation soudaine s’est emparée du Maroc, alors que le projet d’exploiter en commun ce gisement géant était déjà enterré depuis des années.
Cette agitation marocaine s’explique par les difficultés économiques et sociales du royaume, dont le roi est malade. Le régime marocain investit dans la stratégie de la tension permanente avec l’Algérie et le projet de Gara Djebilet est un prétexte pour tenter d’assombrir l’image de l’Algérie auprès de la population marocaine.
Au-delà de cette agitation sans intérêt, Gara Djebilet et plus tard le gazoduc GME symbolisent la volonté de l’Algérie de construire une relation économique et politique durable avec le Maroc, mais ces projets ont été anéantis par les agissements du royaume.