Dans un contexte de tensions avec l’Algérie et d’impasse dans le dossier du Sahara occidental, le discours du roi du Maroc à l’occasion de l’anniversaire de ce qui est appelé « la Marche verte » était forcément très attendu.
Mais samedi soir, Mohamed VI n’a rien dit qui puisse faire avancer les choses. Sur le Sahara occidental, il a fermé la porte à toute possibilité de règlement du conflit par la voie référendaire alors que le nouvel envoyé spécial du SG de l’ONU Staffan De Mistura vient d’entamer sa mission.
Concernant l’Algérie, il a complètement ignoré ses accusations portées trois jours plus tôt contre l’armée marocaine d’avoir assassiné trois de ses ressortissants aux frontières entre le Sahara occidental et la Mauritanie.
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Le Maroc n’acceptera donc de solution pour le conflit sahraoui que dans le cadre de son plan d’autonomie. Le roi l’a réitéré sans ambages : « (…) le processus politique en marche (…) est voué à mettre en place une solution définitive fondée sur l’Initiative d’autonomie, sous souveraineté marocaine. » Quant à « la Marocanité du Sahara », elle « ne sera jamais à l’ordre du jour d’une quelconque tractation. »
De nombreux analystes ont mis l’audace affichée par le Maroc depuis une année sur le compte de l’accord triangulaire signé avec Israël et les Etats-Unis. Mohamed VI ne le cache désormais plus. Il puise son intransigeance du soutien de certaines grandes puissances, particulièrement des Etats-Unis qui ont reconnu sous Donald Trump la marocanité des territoires sahraouis.
« La décision souveraine des Etats-Unis d’Amérique de reconnaître la souveraineté pleine et entière du Maroc sur son Sahara constitue un sujet de fierté pour nous », dit-il, tout en allant jusqu’à menacer l’Union européenne (UE).
Un air de déjà-vu
« A ceux qui affichent des positions floues ou ambivalentes, nous déclarons que le Maroc n’engagera avec eux aucune démarche d’ordre économique ou commercial qui exclurait le Sahara marocain », a dit le roi en direction de l’Union européenne, dont la Cour de justice a annulé fin septembre dernier deux accords entre les deux parties.
Pour l’Algérie, Mohamed VI a répondu sur un seul point, celui de son appel au retrait des forces marocaines de la zone tampon de Guerguerat qu’elles ont occupé en novembre 2020, ce qui a amené le Front Polisario à se retirer du cessez-le-feu en vigueur depuis 30 ans.
Pour lui, ses forces armées marocaines n’ont fait que restaurer « la libre circulation des personnes et des marchandises » dans cette zone. L’Algérie exige le retrait des forces marocaines de Guerguerat pour un retour au cessez-le-feu au Sahara occidental.
En revanche, le roi a ignoré l’affaire des trois Algériens tués à la frontière entre le Sahara et la Mauritanie. Mercredi 3 novembre, la présidence algérienne a accusé l’armée marocaine d’avoir « lâchement assassiné » trois chauffeurs de camion algériens en usant d’un « armement sophistiqué » et promis que cet acte « ne restera pas impuni ».
Le roi n’en dira pas un mot. Pas même des condoléances aux familles des victimes. Les accusations sont pourtant venues de la plus haute institution en Algérie et de la manière la plus formelle qui soit. De plus, l’Algérie a saisi toutes les institutions internationales.
Une attitude qui est loin de constituer une nouveauté. Elle s’inscrit dans la continuité de la stratégie mise en branle par le Maroc vis-à-vis de l’Algérie depuis l’été dernier : multiplier les provocations sur le terrain, ignorer les protestations et laisser le soin au roi de tendre la main. Le discours royal de ce 6 novembre ne sort pas de ce schéma puisqu’il ne manque pas d’exprimer « aux cinq peuples du Maghreb », les « vœux les plus sincères d’unité et de stabilité ».