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Algérie – Maroc : un ex-chef du gouvernement marocain attise les braises

Algérie – Maroc : un ex-chef du gouvernement marocain attise les braises

Algérie - Maroc Par Leo Altman
Algérie - France

C’est une conjoncture extrêmement sensible que l’ancien chef du gouvernement marocain, Abdelilah Benkirane, a choisi pour réitérer les velléités expansionnistes de son pays.

Alors que l’écrivain Boualem Sansal est poursuivi et incarcéré en Algérie depuis près de deux mois pour avoir soutenu qu’une partie du territoire de l’Algérie appartenait au Maroc, Benkirane a abondé dans le même sens, assurant que Tindouf est une terre marocaine.

Le chef du parti islamiste PJD (Parti de la justice et du développement) a déterré le discours développé par le chef du parti Istisklal dans les années 1950.

Allal El Fassi avant lancé l’idée du « grand Maroc » englobant, outre le territoire actuel du royaume, le Sahara occidental et une partie des terres de l’Algérie, de la Mauritanie, jusqu’au Mali, et même plus loin, jusqu’à Saint-Louis, au Sénégal.

C’est conformément à ce concept expansionniste que le Maroc occupe illégalement le Sahara occidental depuis 50 ans. Le royaume a attendu 9 ans, jusqu’en 1969, pour reconnaître l’indépendance de la Mauritanie survenue en 1960.

À l’indépendance de l’Algérie, le Maroc a tenté de prendre de force une partie du territoire algérien, mais il a dû reculer face à la résistance de l’armée algérienne. Cet épisode, qui a eu lieu en 1963, est connu sous le nom de « la guerre des sables ».

En 1972, le roi Hassan II a définitivement reconnu les frontières algériennes dans le cadre d’un accord frontalier signé entre les deux pays.

Mais l’idée est déterrée depuis quelque temps au Maroc et soutenue par une partie de la classe politique marocaine.

En mars 2023, le journal Maroc Hebdo avait publié une carte du Maroc englobant une grande partie du sud-ouest algérien. La « revendication » avait été aussi exprimée par la directrice de la documentation royale Bahija Simou et le prédicateur marocain Ahmed Raissouni.

Algérie – Maroc : Abdelilah Benkirane revendique des territoires algériens

Elle est désormais reprise par Abdelilah Benkirane, qui a occupé la plus haute fonction du gouvernement marocain (2011-2017). Lors d’une rencontre du parti à Casablanca, samedi 11 janvier, l’ancien Premier ministre a repris les informations mensongères qui circulent au Maroc à propos de l’histoire de la revendication marocaine.

Les Marocains racontent en effet que la France coloniale aurait proposé au Maroc de lui « restituer » ses prétendus territoires, mais le roi Mohamed V avait refusé, préférant attendre l’indépendance de l’Algérie pour les « récupérer ».

Tout cela est évidemment complètement faux et n’est étayé par aucun document ou témoignage crédible.

« Touat, Tindouf et Bechar sont des territoires marocains. Leurs habitants sont des Marocains. Avant l’indépendance de l’Algérie, la population du Sahara oriental demandait des passeports marocains auprès de l’ambassade du Maroc à Paris », a soutenu Benkirane, le « Sahara oriental » étant le vocable utilisé par la propagande du Maroc pour soutenir ces visées expansionnistes.

Benkirane ne semble pas reconnaître l’accord de 1972, pourtant signé par le roi Hassan II.

Le PJD tente de faire de la diversion après s’être retrouvé dans une posture très inconfortable par rapport à ce qui se passe en Palestine. C’est un Premier ministre issu de ses rangs, Saad-eddine El Othmani, qui a signé de sa main les accords de normalisation avec Israël en décembre 2020.

Bengrina répond à Benkirane et accuse le Makhzen

Curieusement, ni ce parti ni aucune autre formation politique marocaine ne réclame la restitution de territoires réellement marocains du point de vue historique, et qui se trouvent sous souveraineté étrangère. On pense notamment aux enclaves de Melilla et Ceuta que possède l’Espagne sur la côte méditerranéenne du Maroc.

Les propos d’Abdelilah Benkirane sont tout sauf innocents. Ils surviennent alors que la crise entre la France et l’Algérie est aggravée par l’arrestation de l’écrivain Boualem Sansal qui a tenu des propos similaires.

Dans une interview à un média français d’extrême-droite en octobre dernier, Sansal avait soutenu qu’une partie de l’ouest algérien appartenait au Maroc. Rentré en Algérie à la mi-novembre, il a été interpellé à l’aéroport d’Alger. Il est depuis mis en détention provisoire et poursuivi pour « atteinte à l’intégrité du territoire national ».

En réaction aux déclarations de Benkirane, le parti algérien El Bina a fait remarquer que, jusque-là, le Makhzen marocain n’a jamais osé assumer publiquement de tels propos, laissant le soin à ses relais non officiels de le faire.

« Le Makhzen marocain est atteint du complexe de l’occupation expansionniste coloniale, qui n’a d’égal que ce que fait dans notre région arabe l’occupant sioniste qui ne respecte aucune frontières ni aucun pacte », a écrit le parti d’Abdelkader Bengrina dans un communiqué diffusé ce lundi 13 janvier.

El Bina s’interroge aussi pourquoi à chaque fois les déclarations des responsables du PJD marocains concordent toujours avec les attaques contre l’Algérie « des faucons de l’entité sioniste et l’extrême-droite française ».

Selon Dahou Ould Kablia, ancien ministre de l’Intérieur et président de l’Association des anciens du MALG (ministère de l’armement et des liaisons générales), le service de renseignement algérien durant la guerre de libération nationale, les problèmes entre l’Algérie et son voisin de l’ouest ont commencé en 1957, avec les « ambitions territoriales » du Maroc.

Lire aussi : Algérie – Maroc : « Les problèmes ont commencé en 1957 »

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