L’Algérie et la Tunisie ont procédé vendredi 15 juillet à la réouverture de leur frontière terrestre. Cette dernière est restée fermée pendant les deux dernières années pour cause de crise sanitaire liée au Covid-19.
L’événement s’est déroulé en grande pompe bien qu’il ne s’agisse que d’un retour à la normale, à l’ordre des choses. La première conséquence attendue de cette réouverture est le retour des flux de vacanciers algériens en Tunisie.
Pour l’industrie touristique tunisienne, l’apport des citoyens du pays voisin est vital, et pas seulement dans cette conjoncture particulière.
Avant la pandémie, 2 à 3 millions d’Algériens se rendaient chaque année en Tunisie, qui accueillait un total de près de 10 millions de touristes.
Cette année, et bien que la saison estivale soit largement entamée, un million d’Algériens sont attendus dans le pays voisin. En 2015, lorsqu’un attentat perpétré à la station balnéaire de Sousse avait fait fuir les Européens, la filière a été sauvée par l’afflux les Algériens qui ont continué à s’y rendre, dont certains par solidarité.
Les chiffres des échanges touristiques entre l’Algérie et la Tunisie démontrent que l’intégration économique entre les deux pays est à portée de main. L’unique brèche que constitue la frontière ouverte et l’absence de restrictions sur la mobilité, est mise à profit par une filière entière pour donner lieu à un énorme flux.
Dans un seul sens certes, mais il n’y a pas de doute que les Tunisiens prendraient eux aussi d’assaut les stations touristiques algériennes si celles-ci proposaient une offre de même qualité que celle de leur pays.
Pour le moment, la Tunisie dispose d’une industrie touristique performante et les Algériens, qui ont un niveau de vie qui leur permet de s’offrir des vacances, ne vont pas chercher plus loin. C’est un exemple d’intégration économique, appelé à se reproduire dans tous les secteurs d’activité.
Le passage du gazoduc Transmed par la Tunisie permet à ce pays de bénéficier chaque année de 3,8 milliards de mètres cubes de gaz en sus de 173 millions de dollars de droits de passage. C’est un autre exemple d’intégration réussie, même si elle est due principalement à la proximité géographique.
Le patronat tunisien veut plus d’ouverture
Les industries respectives ne sont pas suffisamment développées pour satisfaire la demande des deux pays, qui ont recours quasiment aux mêmes fournisseurs européens et asiatiques, mais les échanges actuels ne sont pas au niveau du potentiel de l’Algérie et de la Tunisie, de leur proximité et de leurs liens historiques, sociologues et politiques.
En 2020, les échanges commerciaux entre les deux pays de sont situés à 1,25 milliards de dollars. Les exportations algériennes sont constituées essentiellement d’hydrocarbures et celles de la Tunisie sont plus variées (matériaux de construction, produits miniers produits chimiques, électronique, moteurs, agroalimentaire).
Les deux pays sont liés par l’Accord commercial préférentiel (ACP) algéro-tunisien, signé en 2008. Ils font partie en outre de la Grande zone arabe de libre-échange.
Mais seulement 15,66 millions de dollars de marchandises ont été importées par l’Algérie en 2020 dans le cadre de l’ACP, selon les chiffres des douanes algériennes.
La réouverture des frontières a été saluée par la communauté des affaires des deux pays qui attend beaucoup de la conjoncture actuelle marquée par une excellente entente politique entre les présidents Abdelmadjid Tebboune et Kais Saied.
L’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), principale organisation patronale tunisienne, a saisi l’occasion pour appeler à un accord de libre-échange global entre les deux pays, exhortant les gouvernements tunisien et algérien à « autoriser la libre circulation des personnes entre les deux pays », et à « accorder aux ressortissants tunisiens et algériens le droit de propriété, de résidence et de travail et en Tunisie et en Algérie », selon des comptes-rendus de la presse tunisienne.
L’Utica a aussi plaidé, dans un communiqué rendu public samedi 16 juillet, pour plus de facilités aux investisseurs des deux pays tout en leur permettant l’accès aux financements.
La centrale patronale tunisienne a aussi appelé à faire plus en matière de suppression des barrières frontalières et douanières et à améliorer l’accord de libre-échange existant en l’exemptant de toutes les taxes.
Mieux, l’Utica veut « une libéralisation complète des monnaies des deux pays pour les transactions économiques », en sus d’autres propositions, comme le développement de zones frontalières de libre-échange de zones industrielles communes intelligentes.