Portrait. La nouvelle figure de proue de la droite nationaliste en Allemagne a réussi l’exploit de faire entrer le parti d’extrême droite AFD au parlement allemand. Cette ancienne banquière de Goldman Sachs aux allures discrètes étonne par son parcours à la fois brillant et rempli de contradictions.
C’est une percée historique. Arrivée troisième des élections législatives de dimanche en Allemagne, la formation d’extrême droite Alternative für Deutschland (AFD) a adressé un message en forme d’avertissement à la chancelière Angela Merkel. « Nous allons la talonner. Nous allons reprendre notre pays et notre peuple », a affirmé Alexander Gauland, 76 ans, l’un des principaux candidats du parti, s’adressant à ses partisans dans une boîte de nuit de Berlin. A ses côtés, l’autre figure de proue du parti Alice Weidel, qui a fortement contribué à la montée de l’extrême droite au Bundestag, a promis qu’elle travaillerait de manière « constructive » dans l’opposition. Retour sur le parcours atypique de cette femme née en 1979.
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Un parcours atypique
La trajectoire d’Alice Weidel peut paraître en totale contradiction avec les valeurs véhiculées par l’AFD. Titulaire d’un doctorat en économie à l’université de Bayreuth, elle a obtenu son premier poste après ses études chez Goldman Sachs et a également travaillé chez Allianz Investors. Considérée comme une spécialiste de l’Asie, cette polyglotte a perfectionné son mandarin lors de six années passées en Chine. Selon l’édition en ligne du Spiegel, elle possède également une résidence secondaire en Suisse dans la ville de Biel où elle est inscrite en tant que résidente depuis 2014. Après avoir quitté le monde de la banque et de la finance, elle a entamé une carrière de consultante indépendante pour des startups.
Une ascension politique fulgurante
Encore inconnue du grand public il y a quelques mois, Alice Weidel a gravi les échelons de l’AFD en très peu de temps en opérant un virage radical. Celle qui a rejoint le parti au moment de sa fondation en 2013 voulait avant tout se concentrer sur les questions économiques et sociales. Puis elle a rapidement intégré le bureau fédéral de l’AFD. Cette instance valide le programme électoral de la formation politique qui défend des positions nationalistes et souverainistes sur les sujets politiques et économiques notamment.
En avril dernier, le parti populiste a élu lors d’un congrès Alexander Garland, issu de la droite dure, et Alice Weidel à la direction après le renoncement de Frauke Petry un temps pressentie pour mener les élections fédérales. Au moment de cette élection, la presse allemande s’est particulièrement intéressée à son homosexualité. Elle en avait profité pour affirmer que son parti défendait des valeurs d’ouverture. « Mon élection montre à quel point mon parti est tolérant », avait-elle ainsi déclaré en mai dernier. Ce qui avait provoqué la colère des associations en faveur des homosexuels. Pourtant, Weidel n’a jamais rejeté l’homophobie clairement affichée de son parti. Elle a en revanche exprimé son opposition au mariage homosexuel à plusieurs reprises, notamment au moment de son adoption par les députés allemands en juin dernier.
Une hostilité affichée de l’immigration
Sur le thème de l’immigration, Alice Weidel rejoint les positions de son parti. Sur sa page Facebook, la nouvelle femme forte de l’extrême droite publie régulièrement des posts hostiles à l’immigration turque présente en Allemagne. Elle veut également protéger à tout prix l’identité allemande qui serait menacée par la politique migratoire d’Angela Merkel en faveur des réfugiés. Pour tenter de ne pas perdre de voix sur ce terrain, Merkel a revu ses positions nettement moins favorables à l’accueil des demandeurs d’asile et prône désormais un plan Marshall pour financer le développement des pays en difficulté.
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Des ambitions pour 2021
A la suite des résultats de dimanche, la tête de liste du parti a affiché ses objectifs pour la prochaine mandature : « Etre en mesure de gouverner en 2021. » Mais avant de partir à la conquête du pouvoir exécutif, les observateurs vont être particulièrement vigilants sur le comportement des élus de l’AFD au Bundestag. Favorable à une sortie de l’Allemagne de la zone euro, l’instance politique affiche des positions en partie souverainistes. Elle refuse tout transfert de souveraineté dans les traités internationaux de libre-échange comme le CETA mais elle ne veut pas de sortie de l’Union européenne. A l’heure où les partis populistes gagnent des bulletins de vote en Europe, la montée de l’AFD dans l’opinion publique allemande pourrait signer en partie l’échec de la politique emmenée par Angela Merkel depuis 2005.
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Un graphique de notre partenaire Statista.
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