Amnesty International a exhorté mardi les autorités marocaines à procéder à la libération immédiate de dizaines de militants ayant pris part au mouvement de contestation dans le Rif (nord), dont son leader Nasser Zefzafi, les qualifiant de “prisonniers de conscience”.
Cet appel, publié dans un communiqué, intervient le jour de la tenue d’une nouvelle audience, devant la cour d’appel de Casablanca, du procès de plus d’une cinquantaine de personnes impliquées dans le “Hirak”.
“Les autorités doivent relâcher Nasser Zefzafi et les autres, détenus pour avoir manifesté de manière pacifique ou avoir couvert les manifestations sur internet. Ce sont des prisonniers de conscience”, a déclaré Heba Morayef, responsable d’Amnesty pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient.
Depuis mai, les forces de sécurité ont arrêté “des centaines de manifestants”, dont des mineurs, ainsi que des journalistes lors de manifestations largement pacifiques, écrit l’ONG basée à Londres.
“Au moins 410 sont actuellement détenus”, et nombre d’entre eux ont déjà été condamnés, certains à des peines allant jusqu’à 20 ans de prison, poursuit la même source.
Les accusés sont poursuivis pour différents motifs comme “participation” ou “complicité” dans des violences sans que l’accusation ne fournissent de preuves, selon Amnesty.
Certaines accusations sont très graves –comme celle “d’atteinte à la sécurité de l’Etat” visant les meneurs–, et les accusés encourent jusqu’à la prison à vie.
Selon Amnesty, M. Zefzafi est détenu depuis “176 jours à l’isolement” dans la prison de Ain Sebaa, près de Casablanca. C’est là qu’est également emprisonné le journaliste Hamid El Mahdaoui, aussi à l’isolement.
Nasser Zefzafi, devenu célèbre pour ses discours enflammés contre le pouvoir, a été arrêté fin mai.
Hamid El Mahdaoui est poursuivi pour “manquements à son obligation de porter à la connaissance des autorités une tentative de nuire à la sécurité intérieure de l’Etat”.
Ce journaliste engagé a déjà été condamné à un an de prison pour avoir “appelé à prendre part à une manifestation interdite” le 20 juillet à Al-Hoceïma, épicentre du mouvement.
Des manifestants ont dénoncé des actes de torture et autres mauvais traitements au moment des arrestations ou en détention, parfois dans le but d’obtenir des aveux, relève encore Amnesty.
En juillet, le ministère de la Justice avait fait état de l’ouverture d’enquêtes sur 66 cas présumés dans lesquels seraient impliqués des policiers, d’après l’ONG.
Le “Hirak”, dont les revendications sont essentiellement sociales, a agité le Rif durant des mois après la mort effroyable d’un vendeur de poisson à Al-Hoceïma.
Le 28 octobre 2016, Mouhcine Fikri, 31 ans, était mort broyé dans une benne à ordures en tentant de s’opposer à la saisie de sa marchandise.