Le fait est tellement rare, que le silence médiatique du vice-ministre de la Défense nationale, le général de corps d’armée, Ahmed Gaïd Salah, ne passe pas inaperçu.
Et pour cause : le chef d’État-major de l’ANP nous a habitués à de fréquentes sorties sur le terrain, pour superviser des exercices militaires, baptiser des casernes, inaugurer un complexe industriel, ou encore s’enquérir du moral des troupes déployées aux frontières, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, l’immigration clandestine et la contrebande.
Et ses visites sont régulièrement couvertes par les médias publics lourds, qui diffusent de larges extraits de ses discours, prononcés devant des salles remplies par des militaires, des gendarmes et des policiers en tenues.
Mais depuis début décembre, cette débauche d’énergie du chef d’État-major de l’ANP a subitement pris fin. Pour un homme aussi important de par son poste et que les Algériens ont pris l’habitude de voir pratiquement chaque soir au JT de 20H00 de l’ENTV, deux semaines d’absence, c’est beaucoup. Du coup, des interrogations commencent à poindre sur cette « longue » et inhabituelle éclipse de l’homme fort du pouvoir.
Les dernières apparitions publiques du vice-ministre de la défense et chef d’État-major, remontent en fait à deux déplacements à l’étranger, aux Émirats arabes Unis et au Qatar, du 2 au 6 décembre.
En Algérie, les dernières images de Gaid Salah sur le terrain datent du 22 novembre. Ce jour-là, il avait inauguré, au siège du ministère de la Défense nationale aux Tagarins à Alger, “un complexe infrastructurel”, comprenant notamment un bloc administratif et un parking automobile pour le personnel du MDN. Un édifice qui n’a rien de comparable avec ce que le patron de l’armée a l’habitude d’inaugurer, puisqu’un mois plutôt, il avait lancé un complexe de production d’explosifs, construit en partenariat avec le géant chinois de l’armement Norinco, à M’sila.
Mais la sortie du 24 novembre intervenait après des rumeurs persistantes sur son limogeage de la tête de l’ANP. Depuis, le puissant patron de l’armée n’a effectué aucune sortie sur le terrain. Par exemple, il était absent le 9 décembre à l’Amirauté d’Alger, lors de l’inspection de la corvette lance-missiles « Raïs Hassan Barbiar », après sa participation du 3 au 9 décembre au niveau de la base navale principale de Bizerte en Tunisie à l’exécution de la 5e édition de l’exercice « Morjane 2018 », conjointement avec l’Armée de mer tunisienne. Cette tâche a été confiée au général-major Haouli Mohamed Larbi, commandant des Forces navales, selon le MDN.
Gaid Salah a même “interrompu”, ce qui sans doute, il affectionne le plus : la supervision des exercices militaires dans les régions. La dernière en date qui a été effectuée en sa présence remonte au 30 octobre dernier à la base aérienne de Ain Oussera, dans la wilaya de Djelfa, où il avait a dirigé un exercice tactique démonstratif avec munitions réelles, exécuté par des hélicoptères de combat, suivi d’un héliportage, en employant un drone de reconnaissance.
Comment expliquer cette éclipse de Gaid Salah ? Est-ce que c’est dû aux rumeurs qui ont circulé sur son départ ? Est-ce que son programme ne prévoyait de sorties sur le terrain durant cette période ? Ou est-ce que cette absence est liée au contexte politique marqué par l’incertitude qui pèse sur le 5e mandat et les initiatives lancées par des partis politiques proches du pouvoir pour le report des présidentielles ? Mystère.
Selon nos sources, Gaid Salah devrait reprendre ses visites sur le terrain dès la semaine prochaine. Le discours qu’il prononcera sera scruté par la classe politique et les observateurs, en manque de visibilité, à quatre mois de la présidentielle d’avril prochain. Pour les rumeurs sur son départ, le patron de l’armée ne semble pas leur prêter de l’importance. “Il est serein et il ricane sur toutes ces rumeurs”, résume une source sûre.