Karim Tabbou sera libre dans deux semaines. Condamné ce mercredi 11 mars par le tribunal de Sidi M’hamed à une année de prison dont six mois ferme et 50 000 dinars d’amende, le militant politique aura purgé sa peine le 25 de ce mois.
Le dossier de Karim Tabbou a connu bien des péripéties depuis sa première arrestation, le 11 septembre. Il avait été interpellé à son domicile, à Douéra, par des agents en civil et présenté devant le tribunal qui l’a inculpé pour atteinte à l’intégrité du territoire national incitation à des actes de violence de nature à porter atteinte à l’unité nationale. Il lui est reproché des propos qu’il a tenus au tout début du hirak à Kherrata.
L’arrestation de Karim Tabbou avait créé une onde de choc dans le pays, s’agissant de la première fois depuis le début du mouvement populaire et même depuis plusieurs années qu’un homme politique est mis en prison. Premier secrétaire du FFS entre 2006 et 2011, Tabbou a fondé l’Union démocratique et sociale (UDS- non agréé) en 2012. Lorsque, dans les premières semaines du hirak, le ministère de l’Intérieur avait annoncé son intention d’agréer toutes les formations politiques, il avait refusé de déposer le dossier de son parti.
Ce jeune politicien (46 ans) est considéré comme une figure de l’opposition au système en place. Son engagement plein et sans concessions au sein du mouvement populaire va lui valoir de passer par la case prison. Après deux semaines sous les verrous au pénitencier de Koléa, un juge d’instruction décide de le remettre en liberté provisoire, le 25 septembre. Mais coup de théâtre, il sera de nouveau arrêté le lendemain dans les mêmes circonstances, à son domicile et par des agents en civil, et pour les mêmes motifs, puis incarcéré.
Quelques semaines plus tard, il sera rejoint par d’autres figures du hirak, dont Fodil Boumala et Samir Benlarbi. Ces deux derniers ont été relaxés à l’issue de leurs procès il y a quelques semaines, mais Benlarbi a été de nouveau arrêté samedi dernier lors d’une marche à Alger.
Pendant près de six mois, le hirak a exprimé une solidarité sans faille avec le coordinateur de l’UDS et tous les détenus d’opinion.
Le procès de Tabbou s’est tenu le 4 mars devant le tribunal de Sidi M’hamed. Un procès qu’il a transformé en tribune contre le système. Il avait notamment dénoncé les mauvais traitements qu’il a subis lors de sa garde à vue. Le procès de Tabbou a eu une importante résonance médiatique. Plus d’une centaine d’avocats s’étaient constitués pour le défendre. Dans les alentours du tribunal, des centaines de citoyens se sont rassemblés pour lui témoigner leur soutien, malgré la répression et l’arrestation de plusieurs d’entre eux. Le procureur avait requis une lourde peine, 4 ans de prison.
Ce mercredi 11 mars, date prévue pour l’annonce du verdict, des dizaines de citoyens se sont de nouveau déplacés au tribunal de Sidi M’hamed. Les présents étaient très inquiets en voyant Tabbou arriver avec un pansement au nez et marchant difficilement. Mais selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD), le collectif qui milite en faveur des détenus d’opinion depuis le début du hirak, le fourgon qui a transporté le militant de la prison de Koléa a subi un accident de la route. Le verdict est tombé peu avant midi : une année de prison dont six mois ferme pour atteinte à l’intégrité du territoire national.
Il a été par contre relaxé pour le deuxième chef d’inculpation qui est l’incitation à des actes de violence de nature à porter atteinte à l’unité nationale. « Il sera soumis à une période probatoire de 5 ans pendant laquelle s’il est poursuivi pour le même chef d’inculpation, la peine de 6 mois avec sursis sera transformée en peine ferme », explique Me Noureddine Benissad, membre du collectif de défense et président de la LADDH.
La défense envisage de faire appel de ce jugement après concertation avec le concerné, selon Me Benissad.