La langue française recule en Algérie, au Maghreb et dans toute l’Afrique, au profit de l’anglais. Alors que l’Algérie a introduit cette année l’anglais dans le cycle primaire, le Maroc s’apprête à généraliser l’enseignement de la langue de Shakespeare dans les collèges du royaume dès la rentrée scolaire à venir.

L’avancée de l’anglais au détriment du français ne semble pas être un phénomène conjoncturel lié à l’état des relations de chaque pays avec la France.

Il s’agit d’une tendance qui monte dans l’Afrique francophone et qu’il est loisible de constater à travers les déclarations et décisions officielles ainsi que la pratique dans ou en dehors des établissements scolaires et universitaires, dans les médias ou l’administration.

Le président français lui-même ne nie pas ce recul du français. « La francophonie s’affaiblit depuis une quinzaine d’années. On le sait tous, et on le sait bien », constatait en janvier dernier Emmanuel Macron dans une interview accordée au magazine le Point, exclusivement dédiée aux relations franco-algériennes.

En Algérie, l’introduction de l’anglais dans toutes les sphères de la vie nationale se fait progressivement depuis 2019. En septembre dernier, la langue anglaise a été introduite pour la première fois dans le cycle primaire, quelques mois seulement après une annonce dans ce sens faite par le président de la République Abdelmadjid Tebboune.

Le ministère de l’Education a pu relever le défi bien que l’entreprise paraissait difficile à cause du manque d’enseignants maitrisant cette langue. L’université s’est aussi mise progressivement à l’anglais.

En attendant la généralisation de l’enseignement et de la recherche en anglais, les établissements se débrouillent comme ils peuvent. Il y a quelques jours, l’université de Boumerdès a lancé un appel aux scientifiques et universitaires algériens présents à l’étranger, pour venir donner des cours intensifs d’anglais au cas où ils se trouveraient au pays pendant la prochaine saison estivale.

L’anglais gagne du terrain au Maghreb au détriment du français

Même les pays anglophones semblent avoir été sollicités, comme le démontre cet article du Colorado College, aux Etats-Unis, qui annonce qu’un de ses anciens élèves a obtenu une bourse dans le cadre du programme Fulbright et a été affecté comme professeur assistant d’anglais dans une université algérienne.

Le programme Fulbright est un système de sélection très rigoureux d’étudiants, financé par le gouvernement américain et de nombreux pays. « Travailler dans une université en Algérie sera un grand pas vers mes ambitions professionnelles », déclare Samson Heyer, 21 ans.

Le Maroc, qui a opté en 2019 pour l’enseignement des filières scientifiques et techniques en Français, semble lui aussi se tourner vers l’anglais.

Selon l’AFP, le ministère de l’Education marocain a décidé de généraliser progressivement l’enseignement de la langue anglaise à partir de la première année de l’enseignement moyen (collège) et ce, dès la prochaine rentrée scolaire.

La décision vise à « « favoriser la diversité linguistique » et instaurer une certaine « égalité des chances » entre tous les élèves puisque la langue anglaise est largement enseignée dans les établissements privés,  selon les explications du ministère. 

Au Maroc, le français est enseigné comme première langue étrangère dès le primaire, et à partir de la troisième année de collège. Le nouveau programme du ministère de l’éducation prévoit d’enseigner  la langue de Shakespeare pour 10% des élèves  la première année moyenne dès la prochaine rentrée, puis pour 50% avant d’arriver à la généralisation de la décision à la rentrée 2025-2026. 

Dans son interview au Point, Emmanuel Macron avait évoqué un « effet de mode » dans les pays francophones d’Afrique, « un retour du refoulé de la mémoire sur la colonisation » et « des stratégies néo-impérialistes utilisant ouvertement l’anticolonialisme ». « Je pense qu’à la fin on arrivera à faire évoluer la relation, profondément. On arrivera à réconcilier », a-t-il promis.