La police a failli dans la gestion des manifestations pacifiques. Pire : elle a volontairement cherché à provoquer des affrontements avec les manifestants. C’est le principal enseignement des propos tenus par le général Ahmed Gaid Salah dans son discours prononcé ce mardi 16 avril en 4e région militaire.
Le désaveu est tel que l’armée promet désormais de protéger les manifestants. « Nous avons donné des instructions claires et sans équivoque pour la protection des citoyens, notamment lors des marches », a révélé le général Ahmed Gaid Salah.
« La décision de protéger le peuple, avec ses différentes composantes, est une décision irréversible et dont nous ne dévierons point », a-t-il ajouté dans des propos qui sonnent comme un avertissement aux policiers qui seraient tentés de jouer une nouvelle fois avec le feu.
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La semaine dernière, la police a eu un comportement dangereux, selon plusieurs témoignages. Elle a réprimé toutes les manifestations à Alger, utilisé une arme jugée mortelle (le canon à son), procédé à des arrestations musclées de militants…
Vendredi, les policiers ont failli provoquer un drame à Alger-centre, en tirant des gaz lacrymogènes sur une foule compacte qui manifestait pacifiquement Place Audin.
Le même jour, alors que des centaines de milliers de personnes manifestaient à Alger, la DGSN publiait un communiqué dans lequel elle affirmait avoir arrêté des terroristes qui préparaient des attaques contre les manifestants. Elle a également affirmé avoir arrêté des étrangers qui cherchaient à radicaliser le mouvement citoyen.
Depuis, aucune preuve n’a été apportée ni par la DGSN ni par la justice. Ce mardi, Gaid Salah n’a pas fait état d’arrestations de terroristes – un domaine de compétence de l’armée – ni de tentatives d’infiltrer le mouvement populaire par des étrangers. Bien au contraire, il a souligné le caractère pacifique des manifestations.
Toujours vendredi, la police a déployé de manière spectaculaire les éléments d’élite du GOSP à Alger-centre alors qu’aucune menace particulière ne justifiait une telle initiative. Sur les réseaux sociaux, les images de policiers cagoulés et armés patrouillant au milieu de manifestants pacifiques portant des drapeaux ont choqué.
La police s’est livrée à ce qui ressemble à une ultime provocation samedi en interpellant de jeunes militantes avant de les déshabiller dans un commissariat de Baraki puis les relâcher à une heure du matin. Face au tollé soulevé par ce traitement réservé à de jeunes femmes, la police a apporté un démenti qui n’a convaincu personne. A commencer par les victimes qui ont annoncé leur décision de porter plainte contre la police.
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En une semaine, celui qui a donné l’ordre de réprimer les manifestations pacifiques a cassé l’image d’un corps de sécurité qui était en phase avec le peuple. Ces actions ne semblent pas être l’œuvre de policiers hors de contrôle. Elles ont l’air d’avoir été décidées dans la haute hiérarchie de la police. Après les accusations et les mises en garde de Gaid Salah, le DGSN Abdelkader Kara Bouhadba et le ministre de l’Intérieur Salah Eddine Dahmoune doivent apporter des explications à l’opinion publique.