Les partis traditionnellement proches du pouvoir ont remporté les élections législatives du 12 juin, marquées par un taux d’abstention record (23,03 % de participation).
Le FLN est arrivé en tête, suivi des indépendants, du MSP, du RND, du Front El Moustakbal et du mouvement El Bina.
En attendant la proclamation des résultats définitifs par le Conseil constitutionnel, on réfléchit sans doute déjà en haut lieu à la constitution du gouvernement.
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Lors du léger remaniement de février dernier, le président Abdelmadjid Tebboune avait expliqué qu’il n’avait pas souhaité chambouler profondément l’Exécutif à quelques mois des législatives, desquelles, avait-il indiqué, sera issu un nouveau gouvernement.
Le chef de l’État n’a pas traîné après son élection concernant la question du gouvernement. Il a nommé un intérimaire, Sabri Boukadoum, le jour même de sa prestation de serment, le 19 décembre 2019.
Neuf jours plus tard, le 28 décembre, il a nommé un « titulaire » en la personne de Abdelaziz Djerad, un technocrate comme la quasi-totalité de ses ministres nommés le 4 janvier.
M. Tebboune n’avait pas d’autre choix que d’opter pour un gouvernement apolitique. Dans une conjoncture de changement, il était inconcevable de mettre en place un Exécutif issu des forces politiques qui dominaient une assemblée élue dans des conditions contestables en 2017.
Les mêmes forces étaient du reste fortement contestées par le Hirak populaire pour leur implication dans la gestion des affaires du pays sous Bouteflika et le soutien inconditionnel qu’elles avaient apporté à ce dernier, y compris dans son projet insensé de cinquième mandat.
Tebboune a donc opté pour des universitaires et des jeunes, mais globalement, l’équipe a déçu et le président a dû procéder plusieurs fois à des limogeages pour mauvaise gestion ou même manquements à « la morale ».
Les problèmes qui se sont accumulés ces six derniers mois, avec notamment une nette dégradation de certains services publics, ne plaident pas du reste en faveur du gouvernement actuel.
Le chef de l’État lui-même avait laissé entendre qu’il n’était pas totalement satisfait de l’action de l’Exécutif. C’était juste avant son deuxième départ pour des soins en Allemagne en janvier dernier.
Maintenant que le scrutin législatif a eu lieu et les résultats connus, pour quelle équipe optera-t-il ? Va-t-on vers un gouvernement « politique » constitué par un ou plusieurs des partis vainqueurs ou une équipe de technocrates et d’administratifs ? La seule certitude à ce stade c’est que le gouvernement actuel va partir, comme l’avait laissé entendre le chef de l’État en février dernier.
L’option d’un Premier ministre est plus plausible
La Constitution amendée en novembre prévoit deux cas de figure pour la constitution du gouvernement au lendemain d’élections législatives. « Le Gouvernement est dirigé par un Premier ministre lorsqu’il résulte des élections législatives une majorité présidentielle. Le Gouvernement est dirigé par un Chef du Gouvernement lorsqu’il résulte des élections législatives une majorité parlementaire », stipule la loi fondamentale dans son article 103.
L’article 91 précise que dans les deux cas, c’est le président de la République qui nomme le Premier ministre ou le Chef du Gouvernement et met fin à leurs fonctions.
Doit-on sérieusement envisager l’éventualité de voir le vainqueur de l’élection, le FLN, ou même une coalition des autres partis arrivés dans le peloton de tête, revendiquer la constitution du gouvernement ?
Sans doute pas. En tous cas beaucoup d’observateurs ne croient pas un tel scénario possible. On est sans doute dans le premier cas de figure prévu par l’article 103 de la Constitution, c’est-à-dire une « majorité présidentielle ». Comme Tebboune n’a pas de parti politique, des Indépendants, le FLN, le RND, El Moustakbel ou encore le MSP, vont certainement déclarer leur soutien au programme présidentiel et constituer ainsi une majorité présidentielle.
En attendant que les partis s’expriment officiellement, Abdelmadjid Tebboune et son programme ont déjà le soutien assuré d’au moins quatre formations, le FLN, le RND, le Front El Moustakbal et le mouvement El Bina. Toutes les éventualités demeurent en outre possibles concernant la position que prendra le MSP.
Reste à savoir si le Premier ministre sera issu ou pas de l’un des partis de la majorité et la même question vaut pour les futurs membres du gouvernement. L’expérience du gouvernement de technocrates a montré ses limites pendant les 18 derniers mois mais cela ne signifie nullement que l’option est exclue.
Beaucoup ne manquent pas de souligner en effet qu’il est très inopportun sur le plan de l’image de nommer une équipe issue de partis qui ne sont pas moins responsables que Bouteflika dans ce qui est advenu du pays ces vingt dernières années.