La géopolitique régionale est en train d’être profondément chamboulée au Moyen-Orient. Après s’être réconciliée avec l’Iran, l’Arabie saoudite est en passe de retrouver des relations normales avec la Syrie, après plus de dix ans de rupture des relations diplomatiques entre les deux pays.
Vendredi 10 mars, Ryad et Téhéran ont annoncé, à la surprise générale, la conclusion d’un accord pour le rétablissement de leurs relations rompues depuis 2016. L’accord a été négocié dans la discrétion totale à Pékin, sous l’égide de la Chine, qui a marqué ainsi un retentissant succès diplomatique dans la région.
Moins de deux semaines après cet accord avec l’Iran, un autre est annoncé avec la Syrie. Des sources proches du dossier ont indiqué à l’agence Reuters que les deux pays sont en train de préparer la réouverture de leurs ambassades respectives à Ryad et Damas après l’Aid El-Fitr, c’est-à-dire dans un mois.
Les deux pays sont parvenus à une telle décision après de longues discussions qui ont eu lieu en Arabie saoudite entre des responsables de ce pays et de hauts responsables du renseignement syrien, ont ajouté les mêmes sources.
Les négociations ont donc eu lieu directement, sans rôle facilitateur d’un pays tiers. Aucun élément ne laisse penser pour le moment qu’il y a eu un intermédiaire.
L’Arabie saoudite et de nombreux États arabes ont rompu leurs relations avec la Syrie dès le début de la contestation contre le régime de Bachar Al-Assad en 2011. Depuis, le pays est exclu de la Ligue arabe.
Si le rapprochement avec l’Iran était complètement inattendu, celui avec la Syrie était dans l’air depuis quelques semaines.
Arabie saoudite – Syrie : rapprochement après 10 ans de rupture
Suite au séisme dévastateur qui a frappé en février la Turquie et la Syrie, l’Arabie saoudite a acheminé des aides humanitaires en Syrie dans des zones contrôlées par le régime de Bachar Al-Assad. Pour de nombreux observateurs, c’était le prélude à la reprise des relations entre les deux pays.
Les Émirats arabes unis ont procédé des 2018 à la réouverture de leur ambassade à Damas. Cette semaine, le président Syrien Bachar Al-Assad et sa femme ont été reçus à Abou Dhabi par le président émirati Mohamed Benzayd. C’est l’un des rares voyages à l’étranger du président Assad depuis le début de la guerre civile dans ce pays.
Le rapprochement de l’Arabie saoudite avec la Syrie devrait ouvrir à cette dernière la porte du retour au sein de la Ligue arabe après plus de dix ans de mise au ban.
La Syrie devait reprendre son siège au sein de la Ligue arabe à l’occasion de la tenue du sommet arabe d’Alger en novembre dernier. Mais quelques semaines avant le sommet, elle y a renoncé de son propre gré, afin de ne pas « aggraver » les fractures au sein de l’organisation panarabe, selon Damas. Les divisions étaient encore profondes entre les pays arabes concernant l’attitude à adopter vis-à-vis du régime syrien.
L’Algérie est l’un des pays arabes qui ont maintenu leurs relations avec Damas depuis le début de la guerre civile syrienne. Elle a aussi gardé de bons rapports avec l’Iran, boycotté pendant de longues années par une partie de la communauté internationale. Ces changements d’attitude auxquels on assiste démontrent la justesse des positions algériennes.
Le retour à la normale des relations entre l’Iran et l’Arabie saoudite et le rapprochement de ce pays avec la Syrie éloignent l’éventualité de la normalisation des relations entre le royaume sunnite et Israël, donnée comme probable depuis quelques mois.
En novembre dernier, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, qui venait de faire son retour au pouvoir, avait déclaré que l’objectif de son gouvernement et de parvenir à un accord de normalisation avec l’Arabie saoudite, ce qui permettrait selon lui le règlement de la question palestinienne.