Le prince héritier de l’Arabie saoudite, Mohamed Ben Salmane (MBS), a plaidé pour la modération dans l’application de la charia dans le système de gouvernance de son pays, prenant ses distances avec l’idéologie développée par le prédicateur saoudien du XVIIIe siècle, Mohammed ben Abdelwahhab.
« Tous les juristes et universitaires musulmans parlent du concept de modération depuis plus de mille ans. Donc, je ne pense pas être en mesure de clarifier ce concept, autant que je peux … respecter la constitution saoudienne, qui est le Coran, la Sunna, et notre système de gouvernance de base et de le mettre pleinement en œuvre dans un sens large qui inclut tout le monde », affirme Mohamed Ben Salmane lors d’un entretien accordé à la chaîne de télévision saoudienne Al Arabiya, cité par Arab News.
« Notre constitution est le Coran. Ça l’a été, ça l’est toujours et ça continuera de l’être pour toujours. Et notre système de gouvernance de base le stipule très clairement. Nous, en tant que gouvernement, ou le Conseil de la Choura en tant que législateur, ou le Roi en tant que référence pour les trois autorités, nous sommes tenus de mettre en œuvre le Coran sous une forme ou une autre », explique le prince héritier saoudien.
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Application modérée de la charia
MBS a ensuite dit plaider pour l’application de ce qui est « clairement » énoncé dans le Coran. « Dans les affaires sociales et personnelles, nous ne sommes obligés de mettre en œuvre que des stipulations clairement énoncées dans le Coran. Ainsi, je ne peux pas appliquer une punition de la charia sans une stipulation coranique claire ou une stipulation explicite de la Sunna », souligne-t-il.
« Par conséquent, le gouvernement, en ce qui concerne la charia, doit mettre en œuvre les règlements et les enseignements du Coran dans les hadiths mutawatir, et se pencher sur la véracité et la fiabilité des hadiths ahad, et ignorer entièrement les hadiths « khabar », sauf si un avantage clair y est dérivé pour l’humanité. Ainsi, il ne devrait y avoir aucune punition liée à une question religieuse, sauf lorsqu’il y a une stipulation coranique claire, et cette sanction sera appliquée en fonction de la manière dont le Prophète l’a appliquée », dit MBS.
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MBS prend ses distances avec le Wahhabisme
Le prince héritier considère que « mettre en œuvre une sanction sous prétexte qu’il s’agit d’une sanction de la charia alors qu’il n’y a pas de stipulation pour une telle sanction dans le Coran ou dans le hadith mutawatir, est aussi une falsification de la charia ».
Le prince héritier de l’Arabie saoudite a également pris ses distances avec l’idéologie de Mohammed ben Abdelwahhab, fondateur du Wahabisme.
« Lorsque nous nous engageons à suivre une certaine école ou un certain savant, cela signifie que nous divinisons les êtres humains. Dieu Tout-Puissant n’a pas mis de barrière entre lui et les gens. Il a révélé le Coran et le Prophète l’a mis en œuvre », soutient Mohamed Ben Salmane, qui estime que « si Cheikh Mohammed ben Abdelwahhab était avec nous aujourd’hui et qu’il nous trouvait engagés aveuglément à ses textes et fermant nos esprits à l’interprétation et à la jurisprudence tout en le déifiant et en le sanctifiant, il serait le premier à s’opposer à cela ».
« Il n’y a pas d’écoles de pensée fixes et il n’y a pas de personne infaillible. Nous devrions nous engager dans une interprétation continue des textes coraniques et il en va de même pour la Sunna du Prophète, et toutes les fatwas devraient être basées sur l’heure, le lieu et l’état d’esprit dans lesquelles elles sont émises », affirme MBS.
« Par exemple, il y a 100 ans, lorsqu’un érudit émettait une certaine fatwa ne sachant pas que la Terre était ronde et ne connaissant pas les continents ou la technologie, etc., cette fatwa aurait été basée sur les informations alors disponibles et leur compréhension du Coran et de la Sunna, mais ces choses changent avec le temps et sont différentes en ce moment », souligne le prince héritier.
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Relations avec l’Iran
Le prince héritier Mohamed Ben Salmane est par ailleurs revenu sur les relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran, ouvrant la porte à un apaisement des tensions entre les deux pays.
« En fin de compte, l’Iran est un pays voisin. Tout ce que nous demandons, c’est d’avoir une relation bonne et distinguée avec l’Iran », affirme MBS lors de l’entretien à Al Arabiya.
« Nous ne voulons pas que la situation avec l’Iran soit difficile. Au contraire, nous voulons qu’elle prospère et se développe, car nous avons des intérêts saoudiens en Iran, et ils ont des intérêts iraniens en Arabie saoudite, ce qui est de stimuler la prospérité et la croissance dans la région et dans le monde entier », explique-t-il en outre.
« Le problème que nous avons réside dans certains comportements négatifs qu’ils ont, que ce soit en ce qui concerne leur programme nucléaire, leur soutien aux milices illégales dans certains pays de la région ou leur programme de missiles balistiques. Nous travaillons actuellement avec nos partenaires de la région et du monde pour trouver des solutions à ces problèmes », fait savoir le prince héritier.