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Attaques contre les pharmacies : « Nous réclamons des mesures spéciales »

Attaques contre les pharmacies : « Nous réclamons des mesures spéciales »

Dans cet entretien, le président du syndicat des pharmaciens d’officine (Snapo), Messaoud Belambri, revient sur le climat d’insécurité qui règne sur les pharmaciens privés qui exercent sous les risques d’agressions, notamment de la part de délinquants à la recherche de psychotropes.

Une attaque a été perpétrée récemment contre une pharmacie à Tébessa ? Que s’est-il passé exactement ?

C’est un délinquant qui voulait des psychotropes. La pharmacienne a refusé de lui donner puisqu’il est connu pour être un délinquant revendeur.

Elle n’a pas voulu lui donner. Le délinquant est allé chercher un bidon d’essence. Il a aspergé la devanture et le comptoir de la pharmacie. Ensuite, il a allumé le feu. Après ça, la pharmacienne a eu les jambes brûlées et il n’a pas encore été appréhendé. Il est toujours recherché.

Ces genres d’incidents sont très fréquents en Algérie, et il n’y a toujours pas de solutions….

Malheureusement, on vous dit qu’on ne peut pas placer un policier devant chaque pharmacie. C’est notre quotidien.

Que proposez-vous, M. Belambri, pour lutter contre ce phénomène qui a pris de l’ampleur en Algérie ? Quelle est l’urgence aujourd’hui ?

On a demandé au moins une protection contre ce genre d’attaques. La loi sur l’usage illicite de psychotropes est en cours de révision. Il y a un article qui prévoit de protéger spécialement les pharmaciens contre les menaces et agressions, mais c’est un projet qui n’a pas encore été adopté par le gouvernement. Donc on attend.

Malheureusement, c’est notre quotidien. C’est un risque que nous encourons chaque jour. Ces agressions sont pratiquement devenues monnaie courante. Je rappelle qu’il y a eu des assassinats. On a réagi par une grève nationale, des grèves locales, par des sit-in…

Qu’est-ce que vous allez faire maintenant ?

On va encore saisir les autorités. On va encore les interpeler de manière forte pour qu’il y ait des mesures spéciales.

Il y a des mesures spéciales prises pour protéger le corps médical du secteur public. Malheureusement, le corps médical du secteur privé reste exposé. Il n’est pas protégé.

Les officines pharmaceutiques sont particulièrement ciblées à cause de la spécificité de ces médicaments (psychotropes) qui sont détournés de leur usage. C’est devenu des produits qui ne sont pas recherchés pour leurs qualités curatives mais plutôt pour leurs effets hallucinogènes.

C’est devenu des produits qui sont utilisés de manière détournée par des délinquants et cela nécessite un traitement particulier. Nous avons demandé à ce que les lois soient révisées, au moins que le ministère de la Santé publie la liste des psychotropes.

On ne comprend toujours pas pourquoi le ministère ne publie pas ces produits listés comme psychotropes pour qu’ils puissent bénéficier de mesures spécifiques en matière de prescription, délivrance et stockage. Ca ne peut pas continuer comme ça.

Ce sont des produits qui sont devenus hautement dangereux pour nous, d’ailleurs beaucoup de pharmaciens ont abandonné la commercialisation de ces produits.

Ils vous disent préférer ne pas être la cible de la délinquance et l’objet de violences. Ils préfèrent préserver leurs vies et celles de leurs employés. Parfois les employés sont même menacés dans leurs familles.

Les employés ont peur par moment quand ils viennent travailler, surtout quand il s’agit du personnel féminin. Ces menaces ont un impact très négatif, traumatisant sur le plan moral et psychique. On ne peut plus exercer de manière sereine. Nous nous sentons menacés au quotidien.

Vous tirez la sonnette d’alarme ?

Bien sûr on la tire. On n’arrête pas de la tirer au quotidien. Malheureusement, quand des évènements pareils se présentent, l’inquiétude et la peur deviennent plus fortes.

Nous sommes vraiment inquiets par rapport à ces agressions, à ces menaces quotidiennes, à ce sentiment d’insécurité. Nous sommes avant tout des professionnels de santé. Nous sommes au service de nos concitoyens et du système de santé de notre pays que nous souhaitons développer.

Ces médicaments sont destinés pour soigner, pour la santé mentale. Là, ça devient un outil dangereux.  Ça devient un objet à haut risque. Ça devient une menace quotidienne.

Une simple agression verbale peut être très traumatisante, alors quand il s’agit d’agressions physiques comme à Tébessa, ce sont des tentatives d’assassinat pour nous. Les agressions à l’arme blanche, il y a beaucoup de pharmaciens qui ont été blessés, qui ont eu leurs vitrines et leurs devantures saccagées, brisées, cassées.

Même quand les pharmacies sont fermées, elles font l’objet de vols, d’effractions, de casses. Quand vous trouvez vos biens qui sont saccagés, qui ont fait l’objet de vols, c’est aussi très traumatisant. Donc vous avez peur, vous devenez terrorisés et vous vous sentez évoluer et exercer dans un cadre d’insécurité totale.

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