Le Conseil militaire de transition au Soudan et l’opposition civile soudanaise sont parvenues, samedi 3 août, à un accord total visant le partage du pouvoir entre armée et civils, mettant enfin le pays sur la voie d’un futur transfert du pouvoir aux civils après plusieurs mois d’une crise politique majeure.
Les deux parties sont parvenues à un accord total après deux longues journées d’intenses négociations, venant ainsi finaliser l’accord initial trouvé par l’armée et l’opposition civile durant le mois de juillet.
« Les deux délégations sont tombées pleinement d’accord sur la déclaration constitutionnelle », a indiqué samedi matin Mohamed El Hacen Lebatt, médiateur de l’Union africaine. L’accord devrait être officiellement signé prochainement lors d’une cérémonie.
Le Conseil militaire de transition et les meneurs du mouvement de contestation avaient signé le 17 juillet dernier une « déclaration politique » entérinant le partage du pouvoir pendant la période transition supposée durer 3 ans et trois mois.
Le pays sera dirigé durant cette transition de 39 mois par un « Conseil souverain » composé de cinq militaires et six civils, dont cinq issus de l’Alliance pour la liberté et le changement (ALC), fer de lance de la contestation. La présidence du Conseil de souveraineté sera pour sa part entre les mains des généraux pour les 21 prochains mois, avant que l’opposition civile ne l’occupe pendant les 18 mois suivants.
Les points encore en suspens portaient sur les pouvoirs de ce Conseil souverain, sur le déploiement des forces de sécurité et sur l’immunité de généraux impliqués dans la répression de la contestation, explique le journal français Le Monde.
« C’est une avancée de plus après la signature de l’accord politique cadre de la période de transition », a estimé Rachid Saïd Yacoub, porte-parole de l’Association des professionnels du soudan (APS) ayant contribué au mouvement de contestation populaire, cité par la radio française RFI.
« Les principaux points dans cette déclaration constitutionnelle, c’est la création des trois autorités de transition. Il y aura le Conseil de souveraineté partagé entre les militaires et les civils – 6 civils et 5 militaires – avec une présidence, pour les militaires, pendant les 21 premiers mois. Durant le reste de la période de transition de trois ans, la présidence sera pour les civils, avec des pouvoirs limités sauf pour l’armée et les services de sécurité », a indiqué le porte-parole.
« Il y aura aussi un Conseil de ministres avec plein de pouvoirs exécutifs, qui sera dirigé par un Premier ministre et 18 ministres nommés par les Forces de changement et de liberté, ainsi que le ministre de la Défense et le ministre l’Intérieur qui seront nommés par le Conseil militaire de transition », a annoncé M. Yakoub, précisant qu’une troisième institution sera mise en place, à savoir « le Parlement transitoire ou le Conseil législatif qui sera constitué de 300 membres. Les deux tiers seront désignés par les Forces de changement et de liberté et un tiers sera désigné par le Conseil militaire et les forces de liberté et de changement, en consultation entre les deux », a-t-il indiqué.
L’accord total parvenu entre militaires et opposition civile intervient après plusieurs mois de tensions ayant suivi la destitution par l’armée du président Omar El-Béchir en avril. Les tensions avaient atteint leur paroxysme début juin lorsque les militaires soudanais ont réprimé dans le sang un sit-in des manifestants devant le QG de l’armée, faisant plus de 130 morts et entraînant la condamnation de la communauté internationale. Pas plus tard que ce jeudi 1er août, quatre manifestants ont été tués et de nombreux autres blessés dans une fusillade qui s’est produite lors d’un rassemblement à Omdurman, ville située sur la rive opposée de Khartoum, la capitale.
La crise au Soudan avait débuté en décembre dernier après que le gouvernement du désormais ex-président El Béchir ait décidé de tripler le prix du pain. Le nombre de victimes civiles des répressions se compte par centaines depuis le début de la crise.