La disparition du journaliste Jamal Khashoggi rappelle des affaires similaires de Saoudiens exilés qui ont été ramenés de force dans le royaume wahhabite, puis n’ont jamais redonné signe de vie, comme ce fut le cas pour Turki Bin Bandar, ancien chef de la sécurité des Al-Saoud, arrêté au Maroc en 2015, puis transféré vers l’Arabie saoudite. Rabat a livré des explications sur cette affaire qui a refait surface…
Le Maroc a confirmé vendredi qu’il avait arrêté en 2015 un responsable saoudien recherché par Interpol et l’avait extradé vers Riyad en niant qu’il s’agissait d’une « disparition ».
Les commentaires sont venus alors que les retombées diplomatiques se poursuivaient après la disparition du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, qui n’a pas été vu depuis son entrée au consulat saoudien à Istanbul le 2 octobre.
Le prince Turki bin Bandar bin Abderrahmane al Saoud a été arrêté à l’aéroport de Casablanca le 11 novembre 2015 alors qu’il se rendait à Paris sous le coup d’un « mandat international délivré le même jour par Riyad pour atteinte à l’ordre public via Internet et à des crimes financiers », une source diplomatique marocaine a déclaré à l’ AFP.
AUJJAR SE JUSTIFIE SUR L’EXTRADITION DU PRINCE TURKI BIN BANDAR
Bin Bandar, un ancien haut responsable de la police saoudienne et chef de la sécurité de la famille royale saoudienne, a été extradé vers l’Arabie saoudite le lendemain, « en conformité avec les dispositions légales », a déclaré la même source diplomatique marocaine demandant l’anonymat.
« Ce n’est pas une disparition, comme l’ont décrit certains médias, mais une procédure normale », a déclaré le ministre marocain de la Justice, Mohamed Aujjar, à l’AFP.
« Les deux phases, administrative et judiciaire, ont été respectées après l’arrestation de celui-ci sur la base d’un mandat d’arrêt international », a-t-il ajouté, affirmant par ailleurs à l’agence AP que la « Cour suprême du Royaume avait ordonné l’extradition de Turki Ben Bandar et que son arrestation a été menée conformément à des procédures judiciaires strictes ». Des propos répétés en substance dans un communiqué diffusé par le ministère de la justice qui soulignent que « le Maroc tient à rappeler que tous les actes d’extradition se fondent toujours sur une décision de justice, conformément aux procédures internationales et dans le respect total de la législation nationale garantissant les droits et libertés fondamentales à tous les justiciables ».
UNE EXTRADITION DE COMPLAISANCE, SELON LE MONDE
Ces décalarations officielles de Rabat ont été publiées après que Le Monde avait publié jeudi un article intitulé « Avant Khashoggi, d’autres dissidents saoudiens ont disparu mystérieusement » dans lequel il décrivait l’expulsion de Turki Bin Bandar, il y a trois ans, comme « une extradition de complaisance ».
L’article indiquait que bin Bandar était entré en dissidence avec la famille royale saoudienne à la suite d’un conflit foncier et qu’il avait « posté des vidéos sur YouTube appelant à des réformes ».
L’ancien officier de police a été « discrètement arrêté au Maroc par les autorités locales, puis transféré en Arabie Saoudite », a précisé le journal. Le journal britannique The Guardian a rapporté que bin Bandar avait demandé l’asile en France. Selon des amis, il aurait été porté disparu en 2015.
Le président français Emmanuel Macron a déclaré vendredi que la disparition du journaliste Khashoggi était « très grave » et a appelé à une enquête pour établir une « clarté complète » sur ce qui lui est arrivé, tandis que Donald Trump a promis de punir l’Arabie saoudite si son assassinat commandité serait avéré.
Riyad a fait peu de commentaires depuis que Khashoggi a disparu le 2 octobre après être entré au consulat d’Arabie Saoudite à Istanbul, déclenchant des allégations non confirmées selon lesquelles il aurait été tué.