L’examen du Brevet d’enseignement moyen (BEM), session 2021, se déroulera sur trois jours à partir du 15 juin alors que celui du Baccalauréat commence le 20 juin en Algérie.
À l’approche de ces deux examens cruciaux, la cadence des cours de soutien s’accélère et avec elle les excès avec des tarifs qui vont du simple au double.
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Les parents dont les enfants passent ces deux épreuves n’ont qu’un seul souci : mettre toutes les chances du côté de leurs enfants pour qu’ils obtiennent de bonnes moyennes à ces examens, surtout le BAC qui ouvre les portes des universités et des grandes écoles.
Et pour cela, pour beaucoup de parents le prix à payer importe peu. Une aubaine pour certains enseignants peu scrupuleux qui en profitent pour se remplir les poches, parfois même au détriment des élèves.
Sur le terrain, on constate que certains enseignants se soucient très peu du confort nécessaire à la bonne assimilation des cours dispensés. Ainsi, il n’est pas étonnant de voir pulluler des garages où s’entassent des dizaines d’élèves dans des conditions aléatoires.
« Dans une école à Alger, on se retrouve à 50 par classe pour 5.000 dinars par mois pour chaque élève. Il n’y a aucun respect des mesures sanitaires. À l’intérieur, impossible de se concentrer », raconte une élève qui prépare son BAC.
Dans d’autres écoles informels, c’est-à-dire sans autorisation d’exercer, les classes sont moins surchargées, mais les tarifs sont exorbitants : 2500 à 3000 la séance de deux heures pour chaque apprenti dans des classes d’une trentaine d’élèves.
Des séances à 2.500 dinars l’heure
Un fait que confirme Boualem Amoura du syndicat Satef qui met en cause la cupidité de certains enseignants appâtés par le gain.
« Un élève de plus, ce sont 2.500 DA de plus dans sa poche », dit-il très remonté. Notre interlocuteur raconte qu’un enseignant dans une wilaya du centre a loué une salle pouvant contenir jusqu’à 80 élèves. À raison de 2500 par élève et par séance, les gains sont énormes.
« Ces cours sont rémunérateurs pour les enseignants qui les pratiquent. À l’approche des examens officiels, les prix doublent jusqu’à 2.500 DA l’heure », révèle M. Amoura qui n’y va pas de main morte : « Disons-le franco : ces cours de soutien ne donnent aucune plus-value pour les élèves. Je n’incrimine pas les parents qui ont le souci de garantir le succès à leur progéniture quel qu’en soit le prix ».
« Mais où est le rôle de l’État dans ce qui se passe ? Où sont les services de l’État ? Je parle des services de sécurité, mais également des services des impôts dès lors que ces enseignants ne paient aucun impôt sur les revenus ainsi perçus », se demande le SG du Satef.
Pour autant, les parents ont également une part de responsabilité dans le développement du business des cours de soutien, loin de tout contrôle.
Il suffit souvent qu’un parent constate que son voisin a envoyé son enfant chez l’instituteur du coin pour parfaire ses connaissances pour que lui aussi y dépêche le sien.
« C’est devenu un phénomène social », relève le Coordinateur du Cnapest, Messaoud Boudiba qui pointe ouvertement la responsabilité des parents. « Ce phénomène, ce sont les parents d’élèves qui l’ont imposé », critique-t-il, tout en prenant pour exemple le cas de parents qui envoient leurs enfants des classes primaires faire des cours de soutien.
Ces parents sont aussi victimes d’un système d’enseignement que les élèves autant que les enseignants dénoncent. « Ces parents ont senti, comme nous tous, que nos enfants vivent sous la pression de la charge du programme et du volume horaire », explique Boudiba. Le recours aux cours de soutien découle donc du souci des parents de consolider davantage les connaissances de leurs enfants. Histoire de mettre toutes les chances de réussite de leur côté.
Le coordinateur du Cnapest situe l’avènement de ce « phénomène social » que sont les cours de soutien à la période 2002-2003 date à laquelle la « nouvelle » réforme de l’enseignement a débuté.
« Avant, le phénomène était marginal et n’avait pas l’ampleur qu’il a aujourd’hui », relève Boudiba. Selon lui, la nouvelle méthode d’enseignement amorcée depuis lors a bouleversé toutes les normes et a provoqué une telle pression sur les élèves, tant en matière d’approche que du point de vue du programme en lui-même.
« Une pression qui s’est répercutée à la fois sur l’élève et l’enseignant », accuse Messaoud Boudiba. D’après lui, si on peut admettre qu’un candidat au BAC ou à l’examen du BEM puisse recourir à des cours de soutien, il est difficile de concevoir l’idée que des parents puissent y envoyer leurs enfants du primaire.
Le SG du Satef met en cause l’école publique qui « ne joue pas son rôle. Le niveau de l’enseignement a baissé. Et pourtant, ce sont les mêmes enseignants du secteur public qui pratiquent ces cours de soutien mais ils ne se donnent pas à fond ».