Le ministre des Finances a tenu, ce mercredi 29 avril, des propos qui tranchent avec ce qu’on a entendu jusque-là comme discours rassurant concernant la situation économique et financière du pays et ses perspectives.
Abderrahmane Raouya, qui était en tournée à travers des antennes des services fiscaux dans la capitale, a reconnu que « la situation n’est pas confortable ». « Il ne faut pas se mentir », a-t-il dit au cours d’un point de presse improvisé.
« Nous gérons la situation de façon précise notamment à travers la rationalisation des dépenses, qui se poursuit », a affirmé le ministre, notant qu’un travail « au jour le jour » est en cours pour gérer la réduction des recettes de l’État.
Raouya a fait savoir que la gestion de la baisse des recettes, notamment celles liées aux hydrocarbures, induit une poursuite des efforts de rationalisation des dépenses tout en travaillant à hisser le taux de recouvrement fiscal grâce aux facilitations mises en œuvre par l’État ainsi que la numérisation. « C’est une situation à laquelle aucun pays dans le monde ne s’attendait, mais nous avons les moyens d’y faire face », a-t-il assuré.
Le ministre a appelé le personnel de l’administration fiscale à poursuivre son travail de contrôle fiscal tout en assurant l’ensemble dispositions de facilitation prévues par la loi et par les décisions du gouvernement.
Interrogé quant à la capacité de l’État à soutenir les familles nécessiteuses, notamment dans le contexte actuel, Raouya a assuré que « la santé du citoyen et des familles nécessiteuses est l’une des priorités du gouvernement ».
« Il faut qu’on apporte tout ce qui en notre possible au niveau financier pour soutenir ces familles. Si nous devons laisser de côté des projets nous le feront mais nous ne laisserons pas le citoyen algérien », a-t-il affirmé, selon des propos rapportés par l’agence officielle.
L’Algérie, qui tire 97% de ses recettes en devises des exportations des hydrocarbures, subit de plein fouet la baisse des prix de pétrole sur les marchés mondiaux. Le 20 avril, le prix du pétrole américain a atteint une valeur négative (-37 dollars le baril), du jamais vu dans l’histoire.
Le Brent, pétrole de référence européen, se maintient difficilement au-dessus de 20 dollars. La Loi de finances en vigueur a été élaborée sur la base d’un baril à 50 dollars. Même avec un tel prix, le texte prévoit un déficit budgétaire de 1533 milliards de dinars (7.2% du PIB) et un déficit du Trésor de 2435 milliards de dinars.
L’élaboration d’une loi de finances complémentaire pour adapter les recettes et les dépenses à la nouvelle situation avait été suspendue dans un premier temps à cause de la crise sanitaire, mais le dossier vient d’être discuté en conseil du gouvernement.
Le 22 mars, une série de mesures à même de permettre de faire face à la crise avaient été adoptées en Conseil des ministres. Elles prévoient notamment une coupe de 30% dans le budget de fonctionnement de l’État (hors salaires) et la baisse de la facture des importations de 41 à 31 milliards de dollars.
Néanmoins, les responsables qui se sont exprimés sur la question ont continué à être rassurants. C’est le cas de Mohand Oussaïd Belaid, porte-parole officiel de la présidence qui, en conférence de presse mardi 21 avril, avait déclaré que la situation économique était « sous contrôle », excluant aussi le recours à l’endettement extérieur.
Le ministre de l’Énergie, Mohamed Arkab, a lui aussi multiplié les sorties pour afficher son optimisme quant à une remontée rapide des cours de pétrole. Lors de son passage à la radio il y a deux jours, il a prévu un baril à 40 dollars pour le second semestre de l’année en cours, voire même un prix qui se situera à 50-60 dollars.