Suite et pas fin du feuilleton des déclarations de Bernard Bajolet sur l’Algérie. Sur France Inter, qui le présente comme un « ambassadeur peu diplomate », M. Bajolet s’est expliqué mardi soir sur les récents propos qu’il a tenus sur l’état de santé du président Bouteflika, indiquant que « c’est une question politique qui dépasse les relations humaines ».
L’ancien ambassadeur de France en Algérie avait notamment déclaré que M. Bouteflika était « maintenu en vie artificiellement », avant de parler quelques jours plus tard de momification du pouvoir en Algérie.
« Je dis ça sans aucune animosité. Je le dis dans mon livre (Le soleil ne se lève plus à l’Est, ndlr), j’ai entretenu une relation chaleureuse avec le président Bouteflika, j’éprouve pour lui du respect et même de l’affection. C’est une question qui dépasse les relations humaines, c’est une question politique. Bien sûr, la France est extrêmement attachée à la stabilité et à la prospérité de l’Algérie, c’est pour nous un objectif important, et pas seulement pour la France d’ailleurs, c’est important pour l’ensemble des riverains de la Méditerranée. Mais la stabilité ne signifie pas l’immobilisme, voilà ce que j’ai voulu dire », explique l’ancien patron du contre-espionnage français.
Interrogé si le président Bouteflika est « toujours en vie », M. Bajolet s’est contenté d’une réponse laconique : « Je crois pouvoir répondre par l’affirmative. »
À propos de la question mémorielle, l’ancien diplomate a réitéré que « la nomenclature actuellement au pouvoir en Algérie a besoin de continuer à se légitimer en s’appuyant sur la critique de la colonisation ». Mais, ajoute-t-il « bien au-delà de ça, je crois que la reconnaissance par Emmanuel Macron de la responsabilité de l’État dans l’assassinat de Maurice Audin, et d’autre part les harkis, ce sont plus, en tout cas dans l’esprit des Algériens, des questions franco-françaises. C’est vrai qu’on a abandonné les harkis en 1962 dans des conditions honteuses alors que c’est sur eux que la France s’était appuyée, donc c’est vrai c’est un problème franco-français », dit-il pour expliquer le peu de réactions du côté des autorités algériennes aux derniers « gestes » du président français.
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Néanmoins, M. Bajolet reconnaît que le dossier de la mémoire « pèse encore lourd » dans les relations algéro-françaises : « Ça pèse encore lourd et c’est une chose que Nicolas Sarkozy au départ n’avait pas comprise, mais il a vite compris lors de sa visite d’État en décembre 2007 à Alger, où Bouteflika lui a infligé en ma présence une véritable scène, il a fait comprendre à Sarkozy que les questions mémorielles restaient extrêmement importantes. »
« Je pense que, sans être obnubilé par ça, il faut continuer à avancer dans ce domaine pour retirer cette épine du pied ou ce prétexte de ceux qui, des deux côtés de la Méditerranée, s’appuient sur le passé qu’ils instrumentalisent à des fins politiques », suggère-t-il.
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