La mort de l’estivant d’Oued Souf, Aïssa Zoubir, après avoir été tabassé à Souk El Tenine par six « parkingueurs » de la région pour avoir refusé de payer 200 DA, a mis en émoi tout le pays, les habitants de Bejaia en premier chef. Et légitimement.
C’est tout de même ahurissant qu’on en arrive à une telle extrémité pour un refus de s’acquitter d’une aussi modique somme. Un geste qui, à n’en point douter, trahit une profonde crise morale dans laquelle s’est englué le pays ces dernières années. Un pays en perdition qui répudie une à une ses belles valeurs ancestrales lesquelles, sans aucune institution sécuritaire, ont, par le passé, merveilleusement réussi à réguler la vie sociale.
Ce drame aurait pu être inscrit dans la case faits divers, ce genre de dérapages survient en Algérie et à l’étranger, nombre de cas similaires ne se sont pas déjà produits çà et là à travers le pays. Et depuis longtemps.
À Alger comme dans de nombreuses villes, des jeunes, généralement des repris de justice et le plus souvent armés de gourdins ou de barres de fer, accaparent des bouts de trottoirs de leurs quartiers en les convertissant en airs de stationnement pour rançonner des automobilistes, au vu et au su de tout le monde. Et quand des récalcitrants rechignent à s’acquitter de ces injustes dimes, ils sont grondés, humiliés et parfois tabassés.
Des incidents de ce genre sont légions et des plaintes sont parfois déposées mais les petits caïds des quartiers continuent de mener leurs petits business. Les autorités n’arrivent toujours pas à trouver la parade et c’est le citoyen lambda qui paie souvent le prix. Comme ce jeune d’Oued Souf, victime de cette permissivité à l’égard d’un phénomène qui n’a que trop duré.
Mais ce phénomène de parkingueurs ne doit pas être l’arbre qui cache la jungle de la multitude de maux qui empoisonnent le quotidien des Bougiotes et de tous les visiteurs de la capitale des Hammadites.
À commencer par les fréquentes coupures des routes qui sont devenues presqu’une marque de fabrique de cette wilaya, causant ainsi d’insupportables désagréments aux citoyens de la région comme aux routiers sans parler des pertes économiques pour la wilaya.
Mais on continue toujours à recourir à cette méthode trop radicale pour le moindre petit problème (eau, logement, etc) sans que personne ne bouge le petit doigt.
Il y a aussi le problème des ordures ménagers qui défigurent horriblement l’une des plus belles régions du pays. On se rappelle du P/APC de la commune de Bejaia qui pour en finir avec un vrai problème, celui des ordures ménagères, a tenté d’appliquer une fausse solution, à savoir le report du festival de la chanson amazighe.
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Le sable de la plage de Lota, entre Souk El Tenine et Aokas, là où a eu lieu le drame justement, est, juste à l’entame de la saison estivale, recouvert de toutes sortes de détritus sans que cela ne choque personne. La petite ville d’Aokas n’est pas logée à meilleure avec des plages sales et inaccueillantes quand elles ne sont pas transformées en décharges publiques au grand dam de ses habitants qui, excédés par de telles atteintes à leur environnement immédiat, ont eu à investir la rue pour exprimer leur colère.
L’on ne peut pas ne pas citer le problème de l’insécurité qui empoisonne la vie des citoyens d’une wilaya qui, durant la décennie rouge de triste mémoire, était considérée la petite Suisse où régnait paix et concorde au point de voir des citoyens de toutes les régions y venir passer quelques jours histoire d’échapper à leur effroyable quotidien.
Et la liste des problèmes qui rendent la vie impossible au citoyens de la région ne s’arrête malheureusement pas là : on peut citer : la prolifération des débits de boissons et autres lieux de débauches, clandestins le plus souvent, qui, au regard des problèmes qu’ils charrient, ont poussé les citoyens de certaines villes côtières, Tichy notamment, à mener plusieurs actions de protestation. En vain.
Certes, une wilaya « touristique » accueille diverses sortes de clients qui doivent y trouver des lieux de détente pour égayer un tant soit peu leur séjour. Mais toute activité commerciale doit être réglementée et soumise à un cahier des charges strict. Ce qui n’est pas toujours le cas malheureusement. Et alors qu’on a lâché la bride à toute sortes d’activités même les plus illégales, on n’hésite pas à mettre les bâtons dans les roues pour de vrais investisseurs, comme par exemple le patron de Cevital qui a vu son projet de complexe touristique, à une petite encablure de la ville de Béjaia, tout bonnement bloqué.
Un projet qui aurait pu créer une ribambelle d’emploi et surtout tiré vers le haut une activité touristique mal en point, avec une qualité de service qui laisse à désirer. À croire qu’il y a une volonté diffuse qui encourage le pourrissement à Bejaia et qui veut coûte que coûte souiller sa réputation bien consacrée de région accueillante, hospitalière et tolérante. À quelle fin ? Grand point d’interrogation !