« C’est un constat que nous faisons pour les quinze dernières années. Il y a une véritable pollution dans le secteur du cinéma et de l’audiovisuel en Algérie ». Le réalisateur Belkacem Hadjadj ne cache pas sa colère. « Des gens arrivent dans ces deux secteurs par accident. Il n’y a pas de rigueur. Certains sont attirés par l’argent alors qu’ils n’ont rien à y voir. Ils ne s’intéressent pas du tout au secteur et ne veulent pas que les choses se rationalisent. Si des mécanismes professionnels étaient introduits, ils seraient éjectés. Le plus grave est que ces gens-là sont devenus dominants dans le secteur au point que les vrais professionnels rasent les murs », a-t-il regretté lors d’une conférence à l’occasion des 3es Journées cinématographiques de Saida.
Le cinéaste a appelé à assainir le secteur du cinéma, à ouvrir une discussion avec les professionnels « sur l’avenir du métier », à établir des cartes professionnelles, à créer des syndicats et à prendre des mesures pour relancer la production de films. En ce sens, il a estimé qu’il est nécessaire de revoir le système de financement du cinéma en Algérie, évoquant le FDATIC (Fonds d’aide du ministère de la Culture).
« Pour plus de rigueur, il est important de mettre en place une dynamique de réécriture des scénarios soumis à la commission de lecture (présidée actuellement par Ahmed Bedjaoui, ndlr). Écrire un scénario est un métier. Un écrivain n’est pas automatiquement un scénariste. Aussi, faut-il mettre en place un pool de scénaristes professionnels aux côtés de la commission de lecture du FDATIC. Il faut donner une aide à la réécriture pour les réalisateurs et pour les producteurs », a-t-il proposé.
Blacklister les mauvais producteurs
Pour Belkacem Hadjadj, les films, qui reçoivent des aides de l’État, doivent être visionnés avant d’être présentés au public. « Des films qui doivent répondre à des critères d’exigences. Il faut donc installer une commission de visionnage. Un producteur qui ramène un film mal fait doit être blacklisté, ne doit plus recevoir de l’argent du fonds d’aide de l’État », a soutenu le réalisateur de « Lalla Fatma N’Soumer ».
Il a proposé d’inscrire dans le cahier des charges des chaînes de télévision l’obligation de participer à la production cinématographique nationale. « Mais, il faut que les professionnels se rassemblent pour imposer cette obligation. Un travail doit être mené pour convaincre les pouvoirs publics aussi », a-t-il dit.
Le cinéaste a plaidé également pour la création de fonds régionaux pour le cinéma. « Lorsqu’un réalisateur filme dans une région, il contribue à sa mise en valeur et à sa découverte. Les wilayas peuvent se rassembler par régions (est, ouest, sud et centre) et créer des fonds régionaux permanents et régulièrement alimentés pour soutenir les producteurs et les réalisateurs après décision d’une commission», a-t-il souligné.