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Bouteflika n’est plus président, Bensalah a pris le pouvoir : et maintenant ?

Bouteflika n’est plus président, Bensalah a pris le pouvoir : et maintenant ?

Le dernier acte du départ d’Abdelaziz Bouteflika du pouvoir a eu lieu ce mardi 9 avril. Le Parlement réuni en congrès a pris acte de la vacance de la présidence la République et actionné la mise en application de l’article 102 de la Constitution en vertu duquel Abdelkader Bensalah, président du Conseil de la nation, assumera les fonctions de chef de l’État par intérim pendant 90 jours.

Le président Bouteflika a annoncé sa démission le 2 avril au soir, sur la pression du peuple et de l’armée qui avait insisté sur une solution qui ne déborde pas le cadre constitutionnel. Jusque-là, les dispositions de la loi fondamentale ont été scrupuleusement suivies en dépit des objections des manifestants qui redoutent qu’une telle option n’aboutisse à une régénérescence du système à la faveur d’une transition gérée par ses institutions et ses hommes.

Le désormais chef de l’État, Abdelkader Bensalah, le premier ministre Noureddine Bedoui qui ne pourra être changé avant l’élection d’un nouveau président de la République ainsi que le président du Conseil constitutionnel hérité de Bouteflika, auront à jouer un rôle clé dans les trois mois à venir, en gérant les affaires courantes et surtout le processus électoral qui devra doter le pays d’un nouveau timonier.

Lors de la marche de vendredi 5 avril, la première sans Bouteflika, le peuple avait clairement signifié son rejet des trois « B », appelant plutôt à la mise en place d’une instance présidentielle collégiale et un gouvernement de consensus, une solution proposée aussi par de nombreuses personnalités de l’opposition.

La remise des clés de la transition à Abdelkader Bensalah ce mardi matin constitue-t-elle un fait accompli ? Plus clairement, est-il trop tard pour l’adoption d’une option qui prenne en charge le souci du peuple de sauver la transition et plus globalement de sa révolution ?

À première vue, il s’agit d’un pied-de-nez à ceux qui manifestent par millions, sous prétexte du respect de la Constitution. Cette même Constitution violée et triturée au gré des humeurs, avec la complicité de ces mêmes parlementaires qui, jusqu’au bout, auront tout applaudi, et le silence de l’armée qui la met aujourd’hui en avant comme un texte sacré.

L’homme qui a joué un rôle clé dans le départ de Bouteflika, le chef d’état-major de l’ANP, Ahmed Gaïd-Salah, a fait preuve jusque-là d’une constance dans son discours en insistant sur le respect de la voie constitutionnelle et la satisfaction des revendications du peuple, sans toutefois expliquer comment il compte concilier ces deux aspects à l’apparence antinomique au vu de la réalité du terrain.

Certains constitutionnalistes avaient vu à travers son appel à l’application, concomitamment avec l’article 102, des articles 7 et 8 de la Constitution, la possibilité de faire table rase des institutions héritées de l’ancien régime et d’aller dès maintenant vers les solutions préconisées et réclamées par la rue, à commencer par la remise du pouvoir à une instance collégiale et consensuelle issue du peuple.

Une telle option est-elle encore possible maintenant que Bensalah est officiellement chef de l’État par intérim ? Au moment où le Parlement actait la mise en branle de l’article 102, Ahmed Gaïd-Salah se trouve en visite à l’Ouest du Pays. Dans l’après-midi, il devrait prononcer dans lequel il est attendu qu’il s’exprime sur l’évolution de la situation.

Jusque-là, il s’est dit aux côtés du peuple et à l’écoute de ses revendications. C’est ce qu’il devrait réitérer, en plus sans doute de garanties pour que le processus de transition débouche sur un changement véritable et non sur un rafistolage du système décrié. Mais sans doute qu’il lui faudra des arguments solides pour convaincre, car le rejet des figures du système, particulièrement les trois « B », est catégorique.

Les trois hommes ont constitué le thème central des grandes marches de vendredi dernier. Les portraits étaient barrés sur toutes les pancartes et leur départ immédiat était présenté comme une exigence unanime et non négociable.

La confirmation de Bensalah comme chef de l’État par intérim induit nécessairement le maintien des deux autres personnages rejetés, si l’on s’en tient au fameux cadre constitutionnel. Elle annonce aussi inéluctablement une autre grande journée de mobilisation pour ce vendredi 12 avril. La balle est plus que jamais dans le camp de l’armée…

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