La campagne de boycott contre la “cherté de la vie” qui agite le Maroc souligne la “gravité de la situation du pays”, a souligné jeudi un collectif de 70 de personnalités marocaines, appelant à “tirer les leçons du passé”.
Ce boycott “représente un mouvement de protestation de masse sans précédent (…) parce qu’il exprime d’une manière collective les souffrances de larges pans de la société”, estiment les 70 universitaires et acteurs associatifs dans un communiqué commun.
Forme de protestation inédite au Maroc, un mouvement de boycott lancé anonymement sur les réseaux sociaux le 20 avril affecte les ventes des stations-service Afriquia, de l’eau minérale Sidi Ali et du lait Danone.
Les boycotteurs veulent aussi viser une autre marque de lait (Jaouda) ainsi que le grand festival musical annuel Mawazine, qui débute le 22 juin à Rabat.
“Ces huit semaines de boycott méritent d’être un aiguillon pour reconsidérer les réalités et les perspectives du pays”, estime le collectif.
“Après l’élan d’espoir de 2011”, dans le contexte du Printemps arabe marqué au Maroc par une réforme constitutionnelle, “le capital de confiance s’est graduellement érodé”, poursuit le texte.
Le collectif évoque “les déceptions successives, dues en particulier à l’abandon des promesses de lutte contre la corruption et contre le système de rentes, à la dégradation des secteurs sociaux et au maintien en veilleuse des institutions de gouvernance”.
Cette situation a “conduit à des mouvements sociaux dans plusieurs régions du pays”, poursuit-il.
Le royaume a été depuis fin 2016 le théâtre de différents mouvements de protestation dans des zones économiquement déshéritées, avec des manifestations contre la “marginalisation” dans une partie du Rif (nord), des “manifestations de la soif” à Zagora (sud) et des rassemblements pour l’emploi dans l’ex-cité minière de Jerada (nord-est).
“L’Etat y a répondu à chaque fois de la même manière: il commence par faire la sourde oreille, puis il passe à l’intimidation et aux accusations de trahison, puis revient aux tentatives de dialogue, avant de recourir aux menaces qui finissent en répression souvent disproportionnée”, accuse le collectif.
“L’affaiblissement programmé de toutes les institutions de médiation et l’érosion du capital de confiance ont fait le lit de la contestation généralisée”, selon le communiqué.