Le Maroc s’est empêtré dans une série de scandales qui lui ont valu des mises au pilori sur la scène internationale, et une perte d’influence en France.
Pour la première fois, il a fait l’objet le 19 janvier dernier d’une condamnation ferme du Parlement européen, au moment où ses relations avec la France ne sont plus ce qu’elles étaient.
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Le Maroc a pourtant été pendant longtemps « l’enfant gâté de l’Europe », particulièrement de la France.
Dans un long dossier paru dans son édition de ce mercredi 15 février, le magazine français Marianne explique pourquoi ce pays d’Afrique du Nord a bénéficié d’un traitement de faveur pendant de longues années jusqu’à se permettre de graves dérapages, comme l’espionnage du téléphone personnel du président français Emmanuel Macron.
Comment le Maroc “tient” la France
Le dossier décortique comment « le Maroc tient » la France et pourquoi ce pays du Maghreb est « intouchable », « malgré les coups bas que le royaume inflige régulièrement à la République » française.
Les raisons égrenées par le journal fondé par Jean-François Kahn se résument ainsi : espionnage, lobbying, infiltration, people, immigration et cannabis. Ce sont les six “piliers” de l’influence marocaine en France.
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Le dossier revient sur les péripéties de ces derniers mois, comme le scandale Pegasus qui a révélé les pratiques des services marocains, la bombe migratoire lâchée en 2021 sur l’Espagne, l’infiltration des instances de représentation de l’Islam de France notamment le CFCM (Conseil français du culte musulman), pour arriver à la corruption de députés européens.
Il rappelle aussi la place qu’ont toujours occupée les palaces de Marrakech et de tout le Maroc pour la jet-set française ainsi que l’importance de l’immigration marocaine en France.
Dans le même temps, Marianne revient sur la perte par le Maroc de sa position privilégiée.
France – Maroc : les raisons de la crise
Les scandales et les mauvaises pratiques ont contribué à changer le statut du Maroc et à Rabat, on en veut particulièrement au président Emmanuel Macron.
Lors du vote de la résolution du Parlement européen, des politiques et des médias Marocains se sont attaqués à l’Algérie et au président français Emmanuel Macron.
La France est même soupçonnée d’avoir refilé à la justice belge le « tuyau » qui a permis de débusquer le réseau de corruption de députés du Parlement européen par les services marocains.
La crise en cours entre Rabat et Paris s’est confirmée avec le report de la visite du président français au Maroc, alors qu’il s’est rendu en Algérie en août dernier et le président Abdelmadjid Tebboune devrait effectuer un déplacement en France en mai prochain.
Le rapprochement entre Alger et Paris n’est pas fait pour plaire à Rabat pour qui la volonté de Macron de sceller « une réconciliation historique » avec l’Algérie « n’augure rien de bon ».
Néanmoins, comme le soutiennent les observateurs depuis plusieurs mois, le Maroc doit sa disgrâce d’abord à ses propres agissements.
Marianne raconte dans le détail les bouderies réciproques entre Mohamed VI et Emmanuel Macron depuis l’été 2021 et la découverte de l’espionnage par les services du premier du téléphone personnel du second.
L’insistance de Rabat de forcer la main à la France dans le dossier du Sahara occidental a aussi fini par agacer Paris.
Les Marocains, qui « bombent le torse » depuis les accords de normalisation avec Israël signés sous l’égide des États-Unis en décembre 2020, n’ont pas réussi avec les Français ce qu’ils ont fait avec l’Espagne.
Après plusieurs mois de chantage, le gouvernement socialiste espagnol a cédé en décidant d’appuyer le plan d’autonomie marocain, ce qui a provoqué une grave crise diplomatique et commerciale entre l’Espagne et l’Algérie.
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L’autre facteur déterminant que relève le magazine français, c’est l’étiolement du lobbying marocain en France. Autrefois très efficaces, les réseaux mis en place par Hassan II ne fonctionnent plus sous Emmanuel Macron.
Les hommes du Maroc en France, comme le peintre Mehdi Qotbi, ne trouvent plus d’oreille attentive à Paris. Au point où le Maroc est contraint de se rabattre sur des personnages qui ont leur carrière derrière eux, comme Nicolas Sarkozy, Dominique De Villepin ou Jean-Louis Borloo.
« Faute de grives macronistes », les Marocains doivent se contenter de « merles d’avant », écrit Marianne. Cela, tout en comptant ce qui reste du mandat d’Emmanuel Macron.