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Cannabis : le Maroc se met à l’exportation de son « or vert »

Le Maroc est le royaume du cannabis par excellence. Longtemps l’un des principaux fournisseurs du trafic mondial de cette substance stupéfiante, le Maroc se met à l’exportation légale. Il part à la conquête du marché européen.

Les choses se sont accélérées ces dernières années pour le cannabis marocain.

Le royaume a légalisé sa culture, sa transformation et sa commercialisation en 2021.

En Europe, de plus en plus de pays légalisent l’usage thérapeutique et même la consommation de cette plante longtemps prohibée. Ils sont déjà 21 des 27 États de l’Union européenne à l’avoir fait.

Une opportunité que le Maroc ne compte pas laisser passer. L’objectif déclaré du royaume est de se tailler une part du marché mondial, particulièrement européen.

Il vise des revenus entre 400 et 600 millions d’euros d’ici à 2028, selon les prévisions de la Fédération marocaine de l’industrie et de l’innovation pharmaceutiques (FMIIP), citées dans un article du journal français Le Monde publié le 9 juillet.

Maroc : du négoce illégal à l’exportation légale du cannabis

Une première cargaison symbolique, soit un quintal de résine de cannabis, vient d’être envoyée en Suisse. Et ce n’est qu’un début.

Selon les chiffres officiels, le cannabis fait vivre au Maroc au moins 400.000 personnes, notamment dans la région du Rif. Les surfaces consacrées à cette culture sont immenses, plus de 55.000 hectares. Les Nations-Unies estiment les quantités produites à travers le Maroc à 23 000 tonnes d’herbe et 800 tonnes de résine en 2021.

Des agriculteurs se mettent au circuit légal, mais la majeure partie de la production sort toujours des champs illicites, mais tolérés. Environ 3.300 agriculteurs, exploitant 3.000 hectares, ont été agréés, soit sept fois plus qu’il y a un an.

Maroc : ce que disent les chiffres sur la production et l’exportation de cannabis 

Le marché mondial du cannabis, estimé à 50 milliards de dollars par an, fait saliver aussi les industriels marocains, notamment dans le secteur pharmaceutique.

Près de 200 opérateurs se sont mis à la transformation et proposent divers produits traitant de nombreuses maladies. Des entreprises étrangères sont déjà arrivées, dont des sociétés françaises qui participent à des groupes d’intérêts dans le secteur.

Dans le viseur, le marché marocain évidemment, mais aussi l’Europe, dont l’Allemagne, la France, le Danemark, la Suisse, l’Italie, qui ont tous légalisé l’usage thérapeutique du cannabis.

Le Maroc veut faire de son cannabis un « or vert ». C’est d’ailleurs comme cela qu’on l’appelle déjà. Une agence d’État lui est dédiée, l’Agence nationale de réglementation des activités relatives au cannabis (ANRAC). Celle-ci est très optimiste.

Ses responsables ont déclaré au journal Le Monde que l’objectif est de faire avec le cannabis, “ce qui a été fait avec l’automobile”, le premier secteur exportateur du Maroc.

Selon cet organisme, le champ d’usage du cannabis est immense. Il s’étend à la médecine, l’aéronautique, l’agroalimentaire, le textile, l’hygiène, la construction, le papier, le plastique…

Les Marocains veulent au moins 10 à 15 % du marché européen dans les quatre ans à venir. Les revenus qui peuvent être générés font saliver.

Des chiffres qui font saliver

Le premier quintal expédié vers la Suisse a été facturé entre 1400 et 1800 euros le kilo, alors que la plante est payée aux agriculteurs “licites” à 7,5 euros le kilo et nettement moins pour les producteurs illégaux : entre 0,93 et 1,87 euros.

Mais il y a comme un retard au démarrage pour la filière “licite”. La sécheresse qui frappe le Maroc a fait que la première récolte de cannabis légal en 2023 s’est élevée à seulement 296 tonnes. Deux millions de graines ont été importées d’Europe et n’ont pas supporté les fortes chaleurs, ne donnant qu’une moyenne de 18 quintaux à l’hectare.

Pour y remédier, l’ANRAC a une solution : valoriser le « patrimoine national » qu’est la « beldiya », une variété locale moins consommatrice d’eau… Cette variété devrait être mise à la disposition des agriculteurs dès l’année prochaine.

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