Le référendum d’autodétermination qui s’est malgré tout déroulé le 1er octobre a ouvert une crise politique majeure entre les séparatistes au pouvoir en Catalogne et le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy. Une sortie pacifique du conflit entre les différentes forces politique antagonistes paraît difficilement envisageable.
Quelques jours après le référendum sur l’autodétermination, la situation politique et économique demeure très tendue en Catalogne. Les relations entre Madrid et Barcelone ne sont pas du tout au beau fixe. Et les choses ne devraient pas s’améliorer dans les jours à venir, la presse espagnole évoque régulièrement l’impasse de la situation. Quels sont les scénarios envisageables ?
1- Une proclamation de l’indépendance?
Le président catalan Carles Puigdemont, arrivé au pouvoir en janvier 2016 avec un programme promettant l’indépendance, a répété jusqu’à la veille du vote qu’il la proclamerait si le « oui » l’emportait au référendum. Le « oui » a recueilli 90% des suffrages et le taux de participation a atteint 42,3% malgré la fermeture de certains bureaux et la saisie d’urnes par la police nationale qui est intervenue brutalement. Carles Puigdemont a annoncé, dimanche soir qu’il transmettrait au parlement régional les résultats du vote « pour qu’il agisse selon ce que prévoit la loi du référendum », votée le 6 septembre. Cette loi prévoit que le parlement catalan proclame l’indépendance dans les deux jours suivant l’annonce officielle des résultats. Mais les mouvements de grève, l’instabilité politique en cours et les tensions entre Madrid et Barcelone ont reporté l’échéance.
Le Parlement régional de Catalogne avait prévu de se réunir lundi prochain à Barcelone pour examiner le résultat du référendum organisé dimanche dernier en dépit de son interdiction par la Cour constitutionnelle et lancer le processus menant à l’indépendance de la Catalogne. Mais la Cour constitutionnelle espagnole a suspendu jeudi 5 octobre la session de l’assemblée régionale de Catalogne prévue lundi prochain au cours de laquelle les dirigeants séparatistes devaient proclamer l’indépendance. Dans son arrêt, la cour précise que tout acte, toute résolution ou tout accord qui interviendrait malgré cette suspension sera considéré comme « nul et sans valeur ni effet ». Pour le pouvoir central, cette déclaration « unilatérale » n’a pas de base juridique. La loi mettant en place le référendum a été suspendue car elle remettait en cause l’article de 2 de la Constitution qui souligne « l’unité indissoluble de la nation espagnole ».
Ce vendredi, le président séparatiste catalan Puigdemont a repoussé à mardi son intervention devant le parlement régional, initialement prévue pour lundi et au cours de laquelle il devait s’exprimer sur les conséquences du référendum d’autodétermination, a annoncé vendredi le gouvernement régional.
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Par ailleurs, il faut rappeler que le programme séparatiste du président de la région, Carles Puigdemont est loin de faire l’unanimité au sein de l’opinion publique catalane. En effet, les 2,26 millions des votants au référendum dont 90% ont voté oui à l’indépendance (selon les chiffres de l’exécutif catalan) représentent à peine plus de 40% des quelque 5,34 millions du corps électoral. Ce qui rend encore plus difficile, le lancement du processus pour la proclamation de l’indépendance.
(Le président catalan Carles Puigdemont. Crédits : Reuters.)
2- Une application de l’article 155 ?
Une des options régulièrement évoquées par ceux qui s’opposaient à la tenue du référendum est le déclenchement de l’article 155 présent dans la Constitution. Jamais appliqué, cet article indique :
« - Si une communauté autonome (région) ne remplit pas les obligations que la Constitution lui imposent ou si elle agit de façon à porter gravement atteinte à l’intérêt général de l’Espagne, le gouvernement espagnol, après avoir préalablement mis en demeure le président de la Communauté autonome et si cette mise en demeure n’aboutit pas, pourra, avec l’approbation de la majorité absolue du Sénat, prendre les mesures nécessaires pour la contraindre à respecter ces obligations ou pour protéger l’intérêt général mentionné.
– Pour mener à bien les mesures prévues au paragraphe précédent, le Gouvernement pourra donner des instructions à toutes les autorités des Communautés autonomes. »
Cet article apparaît comme une menace pour les Catalans puisque le gouvernement de Mariano Rajoy pourrait prendre la direction de la Catalogne. Mais en réalité, il reste très flou et complexe à appliquer. La Constitution espagnole apporte peu de détails sur les moyens accordés au gouvernement central. Le texte n’évoque à aucun moment les dispositifs possibles pour suspendre le gouvernement régional ou pour dissoudre le parlement local. Le gouvernement national doit en outre présenter un feuille de route présentant les mesures envisagées au président du Sénat.
Au regard des divisions qui existent au sein des partis politiques espagnols (le parti populaire et le Parti socialiste ouvrier espagnol notamment) et du risque de chaos qu’elle pourrait engendrer, l’option de l’article 155 semble être le dernier recours envisagé par l’exécutif central. Si le gouvernement décide de suspendre l’autonomie de la région pour en prendre directement les commandes, « cela ne ferait qu’élargir le soutien aux indépendantistes » rappelle la présidente séparatiste du Parlement catalan Carmen Forcadell.
3- Des élections anticipées ?
Le troisième scénario régulièrement évoqué est celui d’une dissolution du Parlement catalan, sans que l’indépendance soit proclamée. Cela pourrait aboutir à l’organisation tôt ou tard de nouvelles organisations régionales. Les partisans de l’indépendance pourraient espérer profiter des effets de la répression policière et de la dégradation de l’image du pouvoir central pour capitaliser un plus fort soutien et obtenir une plus large majorité au Parlement régional. Ce qui représente un risque politique majeur pour les conservateurs du camp rattaché à Rajoy.
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