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Ce que révèle la tourmente du groupe médias de Haddad

Ce que révèle la tourmente du groupe médias de Haddad

Ali Haddad, l’une des premières fortunes du pays, est en prison depuis près de trois mois. Les répercussions de cette chute brutale n’ont pas tardé à s’étendre à toutes les activités du groupe familial, dont la filiale médias composée de deux journaux quotidiens et deux chaînes de télévision.

Le groupe « Médias temps nouveaux », fondé il y a une dizaine d’années, est dans la tourmente, révélant d’une part les contradictions du champ médiatique algérien et la précarité de son modèle économique et soulevant de l’autre la problématique du devenir des entreprises de ceux qui ont fait les frais de la chute de Bouteflika.

La situation du Temps d’Algérie, Wakt el Djazaïr, Dzaïr TV et Dzaïr News est sous les feux de la rampe plus que les autres entreprises du groupe grâce à la montée au créneau de ses 400 travailleurs pour exprimer leur souci de sauver leur gagne-pain et dire leur angoisse d’un avenir incertain.

Nonobstant le passif du propriétaire et la ligne éditoriale qu’il a imprégné à ses médias durant le règne de l’ancien président, la presse et même d’autres corporations se sont solidarisées avec les journalistes et autres employés de « Médias temps nouveaux » et exprimé unanimement la nécessité de trouver une solution pour préserver les emplois. Mais une solution est-elle possible ?

Embûches juridiques

Beaucoup de pistes ont en tout cas fusé, parmi lesquelles une reprise par l’État, par un autre investisseur privé ou par les travailleurs. Au-delà des embûches juridiques qui pourraient se dresser devant la concrétisation de l’une ou l’autre de ces options, beaucoup de considérations objectives risquent de freiner le processus.

Pour le moment, les propriétaires ont opté pour le chemin le plus court : la mise en vente des deux journaux et des deux chaînes de télé. En attendant une offre de rachat sérieuse, une première mesure douloureuse a été prise, soit la fusion des chaînes Dzaïr TV et Dzaïr News en une seule entité à partir de ce mardi 25 juin, synonyme de réduction des coûts de fonctionnement, donc du nombre d’emplois.

La reprise par l’État, proposée par certaines voix est d’ores et déjà battue en brèche et n’a que très peu de chances, sinon aucune, d’aboutir pour une raison évidente : la bourse de l’État est déjà suffisamment grevée par une pléthore de médias écrits et audiovisuels qui plus est à l’efficacité discutable.

La conjoncture politique, conjuguée au poids des médias du groupe Haddad, leur modèle économique et leur situation juridique, ne devrait pas non plus encourager les investisseurs privés à se bousculer pour les reprendre. Pour ne pas les accréditer d’une audience limitée, aucun des journaux ou télés d’Ali Haddad n’émarge à la case des mastodontes du paysage médiatique algérien.

Repenser le modèle économique des médias algériens

Le Temps d’Algérie et Wakt el Djazaïr par exemple sont dans la tourmente financière à cause du tarissement de leur unique source de revenus, soit la publicité étatique prodiguée via l’agence ANEP qui, curieusement, a cessé de considérer les deux supports efficaces dès la minute qui a suivi la disgrâce politique de leur propriétaire. Les deux chaînes de télé sont dans la difficulté à peu près pour les mêmes raisons.

Le statut juridique des deux chaînes constitue un frein supplémentaire à même de décourager les plus téméraires. Créées en 2013 et 2014 respectivement, Dzaïr TV et Dzaïr News demeurent sans agrément et activent sous le statut de chaînes offshore, c’est-à-dire étrangères, sans aucune existence légale en Algérie.

Quel investisseur sensé peut engager son capital dans la reprise d’une affaire dont le succès ou la ruine ne tiennent pas aux règles de la compétition mais à des considérations qui échappent à toute logique commerciale ?

Une reprise du capital par les travailleurs demeure possible, quoiqu’elle dépende exclusivement de la volonté des propriétaires du groupe. Mais quand bien même Ali Haddad et ses frères consentiraient à céder leurs quatre médias au dinar symbolique, cela ne réglera pas la problématique dans le fond : les travailleurs hériteraient de la même précarité, les gros moyens financiers en moins.

L’urgence est certes de trouver une solution pour sauver le gagne-pain de centaines de familles, mais surtout de repenser le modèle économique des médias algériens. C’est l’unique voie pour leur garantir une existence pérenne.

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