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Ce qu’il faut retenir de la visite de Tebboune en Russie

Ce qu’il faut retenir de la visite de Tebboune en Russie

La visite d’État de trois jours du président Abdelmadjid Tebboune en Russie, entamée mardi 14 juin, peut être qualifiée d’historique.

Survenant dans un contexte mondial tendu par la guerre en Ukraine et les sanctions occidentales contre Moscou, ce déplacement a donné tout son sens au non-alignement historique de l’Algérie.

Abdelmadjid Tebboune a tenu devant Vladimir Poutine des propos très forts qui expriment l’attachement de l’Algérie à l’indépendance de sa décision. Dans la conjoncture internationale actuelle, de tels mots sont très lourds de sens.

« Les Algériens sont nés libres et le resteront dans leurs décisions et leur comportement« , a répondu le président algérien à une question sur d’éventuelles pressions occidentales, posée au forum économique de Saint-Pétersbourg auquel il a pris part vendredi 16 juin.

La veille, il avait été plus explicite lors de sa rencontre avec son homologue russe Vladimir Poutine. « Aujourd’hui, il y a une conjoncture et peut-être des pressions internationales, mais cela n’impacte pas notre amitié », a dit Tebboune à Vladimir Poutine.

Nonobstant ses résultats et ce qui a pu être échangé, cette visite en elle-même constitue un message fort. Poutine ne l’ignore pas et a tenu à l’exprimer : « Tous les présents saisissent bien ce que cela signifie de venir à Moscou pour nous rejoindre à ce forum« .

Ce déplacement de Tebboune en Russie a eu lieu au moment où celui prévu à Paris à la même période est incertain.

La visite du président algérien en France est annoncée pour cette seconde moitié de juin, mais depuis quelques jours, la presse française spécule sur son annulation ou son report, et ce n’est pas sans raison. Les relations entre les deux pays semblent traverser de nouveau une zone de froid.

La déception des attentes d’Alger auprès de Paris n’a pas échappé au président russe qui a subtilement rappelé les essais nucléaires effectués par la France dans le Sahara algérien.

La Russie a exprimé sa disposition à apporter sa contribution pour la décontamination des sites, ce qui laisse supposer que les Français ne sont pas pressés de le faire.

Au forum économique de Saint-Pétersbourg, le président Tebboune a vanté les avantages qu’offrent l’Algérie en matière d’investissement et réitéré la demande d’une adhésion rapide au groupe des Brics. Une adhésion qui pourrait permettre à l’Algérie d’accélérer la modernisation de son économie, d’accéder à des financements pour ses projets d’infrastructures et d’ouvrir les portes des marchés extérieurs à ses entreprises.

Pour l’Algérie, ce rapprochement avec Moscou est aussi une manière de rééquilibrer ses relations avec un allié historique avec lequel, a reconnu Tebboune, le partenariat n’a pas beaucoup avancé ces dernières années.

Algérie – Russie : un rééquilibrage nécessaire

Un rééquilibrage rendu nécessaire par l’intensification de la coopération énergétique entre l’Algérie et les pays européens, l’Italie notamment, au lendemain du déclenchement de la guerre en Ukraine.

L’Algérie a accepté d’augmenter les flux de gaz vers les pays du sud de l’Europe qui avaient entrepris de remplacer les approvisionnements russes.

La conjoncture régionale tendue (crise avec le Maroc, intrusion d’Israël au Maghreb, guerre au Mali et en Libye) dicte aussi à Alger de diversifier davantage ses partenaires et de renforcer ses liens avec une puissance de la trempe de la Russie, qui plus est un acteur impliqué au moins dans deux dossiers aux frontières de l’Algérie : la Libye et le Mali.

Sur ces deux dossiers, Tebboune et Poutine ont exprimé lors de leur rencontre la concordance de leur vues, ce qui augmente les chances de parvenir à une solution à la crise dans ces deux pays.

Avec cette visite réussie de son président à Moscou, l’Algérie se positionne comme un acteur régional influent en Afrique et dans le monde arabe, qui peut par exemple contrebalancer le rôle de l’Arabie saoudite et de son prince héritier Mohamed Ben Salmane.

Le président des Émirats arabes unis Mohamed Ben Zaïd est lui aussi dans cette optique. Il a lui aussi tenu à être présent à Saint-Pétersbourg et il a expliqué devant Poutine qu’il l’a fait en dépit des « pressions » et « menaces » de l’Occident.

On ne sait pas à ce stade s’il y aura un avant et un après 15 juin 2023, mais quelque chose est peut-être en train de bouger dans la géopolitique régionale et internationale. Poutine, intransigeant jusque-là sur le dossier ukrainien, a accepté une médiation de l’Algérie et une autre d’un panel de présidents africains.

Si les occidentaux ne peuvent plus parler au président russe depuis une année, l’Algérie et l’Afrique savent encore le faire.

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