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Chine – Afrique : une relation déséquilibrée

La Chine accueille ce lundi le Forum de coopération Afrique-Chine, un sommet de deux jours réunissant le géant d’Asie avec des dirigeants de 53 pays africains qui vise à célébrer la relation stratégique et la coopération économique qu’entretiennent les deux parties. L’Algérie est représentée à ce sommet par le Premier ministre Ahmed Ouyahia.

Dans son discours prononcé à l’ouverture du sommet, le président chinois Xi Jinping a annoncé que la Chine va consacrer 60 milliards de dollars supplémentaires au développement économique des pays africains, dont 15 milliards de dollars « d’aide gratuite et de prêts sans intérêts ».

En 2015, le président chinois avait déjà promis 60 milliards de dollars d’aide financière sur trois ans, incluant 5 milliards de prêts à taux zéro et 35 milliards de prêts à taux préférentiel, aux pays d’Afrique. C’est dire que le continent revêt une importance majeure pour la Chine, qui est le premier partenaire économique en Afrique depuis neuf ans.

Si le ministre des Affaires étrangères chinois évoque une coopération à bénéfices mutuels (win-win) entre la Chine et l’Afrique, dans les faits la balance semble toutefois pencher nettement plus du côté de la Chine.

Relation déséquilibrée

Selon le ministère du Commerce chinois, le volume des échanges commerciaux entre la Chine et le continent africain a atteint les 170 milliards de dollars en 2017, en progression de 14% par rapport à l’année précédente. Les importations chinoises en Afrique ont représenté 94.7 milliards de dollars, tandis que les exportations africaines vers la Chine se sont établies à 75.3 milliards de dollars en 2017. L’Afrique du Sud, l’Angola et le Nigéria sont les trois principaux partenaires africains de la Chine.

« La Chine, avec ses exportations subventionnées de produits à bas prix [vers l’Afrique], détruit les marchés africains qu’elle inonde : du vélo à la lampe de poche, de la bougie au réfrigérateur. La libéralisation des échanges avec la Chine a aussi contribué à empêcher l’industrialisation des pays africains », estime Robert Kappel, économiste spécialiste des politiques de développement à l’Université de Leipzig, cité par Deutsche Welle.

Un sentiment partagé par le président de l’Afrique du Sud, qui a plaidé ce lundi pour le règlement de certains déséquilibres entre les deux parties. « Très souvent, l’Afrique exporte des matières premières vers la Chine, tandis que la Chine nous exporte des produits finis (…) Cela limite le potentiel et la capacité de production de l’Afrique ainsi que la création d’emplois sur le continent africain », a-t-il regretté.

« La Chine accorde de gros crédits pour les chantiers d’infrastructures, comme la ligne ferroviaire Djibouti-Addis Abeba ou le train entre Mombasa et Nairobi. Ces constructions coûtent très cher et les États doivent les payer, les Chinois ne font pas de cadeaux. C’est bien là le problème : de nombreux États africains tombent dans le piège de la dette », a également expliqué le spécialiste Robert Kappel.

Une critique que le président chinois a partiellement adressée dans son discours ce lundi, assurant que la Chine « annulerait » une partie de la dette des nations africaines les moins développées, insulaires ou enclavées.

Influence diplomatique

Le soutien économique apporté par la Chine aux pays africains lui a également permis de renforcer grandement son influence diplomatique sur le continent.

« La Chine critique le ‘’néocolonialisme’’ des Européens et des États-Unis, qui tentent de maintenir leur influence par le biais de l’aide au développement. Cela existe, cette tentative de maintien d’influence, mais l’Union européenne pose aussi des conditions en matière de droits humains, par exemple, ce qui est positif. La Chine ne fait pas cela. Le gouvernement chinois n’a jamais critiqué nulle part les violations des droits de l’Homme », explique Helmut Asche, professeur de Leipzig spécialisé dans la politique de développement en Afrique, cité par Deutsche Welle.

Le chercheur allemand affirme en outre que contrairement à sa posture de non-ingérence politique dans les affaires intérieures africaines, la Chine jouerait de son influence en sous-main. Le dernier exemple en date serait le Zimbabwe, où le successeur du président Robert Mugabe, Emmerson Mnangagwa, serait parti en Chine afin d’obtenir l’aval de Pékin.

La Chine aurait également usé son influence afin de mener presque tous les États africains à rompre leurs relations diplomatiques avec Taïwan. Pas plus tard qu’en mai dernier, le Burkina Faso a annoncé la rupture de ses relations diplomatiques avec Taïwan. L’eSwatini (ex-Swaziland) est le seul pays à continuer de reconnaître Taiwan, et est l’unique absent du sommet actuel Chine – Afrique, n’ayant pas été convié à l’événement.

De son côté, le président chinois a vanté ce lundi une aide « sans conditions » à l’Afrique. “Les investissements de la Chine en Afrique ne s’accompagnent d’aucune condition politique. La Chine ne s’immisce pas dans les affaires intérieures de l’Afrique et ne lui impose pas sa volonté”, a affirmé Xi Jinping. Une pique en direction des États-Unis et de l’Europe.

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