Depuis plusieurs semaines, le ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau, semble avoir trouvé son sujet de prédilection pour monter dans les sondages : l’Algérie.
Entre une posture belliciste et des déclarations condamnables, il s’acharne à entretenir une tension artificielle avec l’Algérie et s’embourbe dans une obstination stérile pour servir ses intérêts, à savoir diriger le parti Les Républicains (LR).
Une stratégie scandaleuse qui ne convainc personne, et encore moins les écrivains algériens Kaouther Adimi et Yasmina Khadra, lesquels lui adressent une réponse mordante dans les colonnes du journal français L’Humanité.
Kaouther Adimi : Retailleau, c’est du « chkoupi »
L’écrivaine Kaouther Adimi s’est exprimée dans une tribune au vitriol, et elle ne prend pas de pincettes pour recadrer Bruno Retailleau et son obsession algérienne.
Chkoupi Retailleau – mon billet dans l’édition du jour @humanite_fr #Algerie A lire ici 👉https://t.co/vcxCvMRi24 pic.twitter.com/XpzUE2jNk0
— Kaouther Adimi كوثر عظيمي (@kaoutheradimi) March 20, 2025
Pour elle, Retailleau n’est qu’un « chkoupi », un terme acerbe qu’elle emprunte au parler algérien, et qui colle parfaitement au ministre de l’Intérieur français.
Issu du turc « çöp », le mot « chkoupi » signifie « déchets ». En algérien, il désigne quelque chose de gênant et sans utilité. Kaouther Adimi ne l’a donc pas choisi au hasard.
Elle explique : « Les pêcheurs algériens, lorsqu’ils ne remontaient rien d’autre que des algues et autres déchets qui venaient s’entremêler aux filets, disaient qu’ils n’avaient rien d’autre que du « chkoupi », c’est-à-dire rien d’utile, que du gênant ».
Une manière cinglante pour elle de signifier que Retailleau, malgré ses « gesticulations » politiques, n’a aucun poids réel dans les relations franco-algériennes.
L’écrivaine va encore plus loin en dénonçant une instrumentalisation politique obsessionnelle de l’Algérie, dans la mesure où Retailleau a fait de l’Algérie « son fonds de commerce ». Sa manœuvre favorite ? Souffler sur les braises du passé colonial et multiplier les polémiques.
Mais pendant que le sénateur LR s’agite, les Algériens ne se préoccupent pas de son existence, « ils ont bien d’autres tracas ».
Kaouther Adimi décrit une « mascarade portée par l’extrême droite », et une diversion qui voudrait opposer le peuple algérien et le peuple français qui ont « plus en commun que ce que l’époque ne veut bien laisser croire ».
Yasmina Khadra : « Une misérable fausse manœuvre »
De son côté, l’écrivain Yasmina Khadra replace la polémique Retailleau dans un contexte plus large, celui d’une crise politique profonde qui affecte la France. Il estime que l’obsession algérienne est une tentative de diversion orchestrée par un gouvernement en perdition.
« Le récent gouvernement […] panique plus que les précédents et s’évertue à privilégier la diversion au détriment du bon sens. Ne trouvant pas de solution à son problème, il lui cherche un coupable, en l’occurrence l’Algérie », écrit l’auteur à succès.
Désigner un coupable à l’extérieur pour esquiver les véritables problèmes internes… Une manœuvre vouée à l’échec. Comme l’affirme Yasmina Khadra, l’Algérie « n’a rien à voir avec les dérives politiques de l’État français ».
Il pointe également du doigt l’hystérie médiatique autour de cette crise inventée de toutes pièces, et appelle Alger à « ne pas aller sur le terrain miné sur lequel veulent l’attirer des carriéristes insolés », Retailleau et ses soutiens.
« Ce ne sont pas les tribunes incendiaires dans la presse, ni les diatribes claironnantes des va-t-en-guerre, encore moins les plateaux de télé formatés qui apporteraient un soupçon d’éclaircie à cette effarante mentalité de la provocation outrancière », fustige l’écrivain.
Enfin, il rappelle que les Français veulent des solutions, pas des polémiques, et que les relations entre les peuples ne se réduisent pas aux gesticulations politiques portées par Retailleau.
« Que le gouvernement Bayrou s’assagisse et se focalise sur la meilleure façon d’accomplir sa mission, plutôt que de se hasarder là où il n’a rien à glaner, sinon des risques qu’il serait stupide et suicidaire de courir », conclut-il.
À bon entendeur…